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Le Bavard Latino
Bolivie-Venezuela: Evo, aspirant kamikaze dans les hélicos d'Hugo

Evo Morales (veste de cuir sur pull rayé) sort le 20 juillet 2008 du Super Puma qui s'écrasera deux heures plus tard (Photo ABI). A gauche, Hugo Chavez sur une bicyclette "Atomica" (Photo Marcelo Garcia - Prensa Presidencial).
LA PAZ, jeudi 24 juillet 2008 (LatinReporters.com) - "Hugo m'envoie ses hélicos, mais alors, lui, pourquoi va-t-il à vélo?" se demande peut-être le président bolivien Evo Morales après le nouveau crash, le second en 13 mois, de l'un des 4 hélicoptères mis à sa disposition par son amigo bolivarien du Venezuela, le président Hugo Chavez.

Le 20 juillet, avec le Super Puma immatriculé FAB-752, portant sur le fuselage les drapeaux bolivien et vénézuélien, Evo Morales atterrissait, comme le montre ci-dessus la photo de l'agence officielle ABI, dans le district minier de Huanuni.

Rester copain avec les mineurs, experts en dynamite qu'ils savent découper pour en faire dans les manifestations de gros pétards convaincants, est prudent avant le référendum révocatoire du 10 août. Les Boliviens devraient alors dire oui au maintien à la présidence de leur premier chef d'Etat indien. Mais au cas où ils diraient non, il faudrait peut-être leur faire comprendre qu'on ne trahit pas une révolution.

Moins de deux heures après avoir redécollé, le même Super Puma s'écrasait en explosant près de la localité de Colomi, à 270 km au sud-est de La Paz. Tous ses occupants, quatre militaires vénézuéliens, dont le pilote, et un officier bolivien périssaient. Le même appareil aurait dû récupérer le lendemain le miraculé Evo Morales.

"Comme le Super Puma et son équipage étaient du Venezuela, on permettra à des experts de ce pays de participer à l'enquête" a déclaré le ministre bolivien de la Défense, Walker San Miguel. "On ne parle que d'hypothèses. Je ne peux pas vous dire catégoriquement qu'il s'agit d'un problème technique, d'un facteur climatique ou d'un attentat" a ajouté le ministre.

Mieux vaut ne pas songer à un attentat, car en octobre 2007 Hugo Chavez menaçait de faire de la Bolivie un nouveau Vietnam en cas d'assassinat de son allié socialiste Evo Morales. De quoi frémir à mesure que s'avère l'efficacité des hélicoptères maniés par des militaires vénézuéliens.

C'est grâce à eux que la carrière d'aspirant kamikaze d'Evo Morales débuta le 28 juin 2007. Ce jour-là, un hélicoptère Alouette III fourni aussi par le bouillant Chavez s'écrasa près de Cochabamba peu après avoir transporté le président amérindien. Quatre militaires, deux vénézuéliens et deux boliviens, perdirent alors la vie.

Des deux Super Puma et deux Alouette III, au total quatre hélicoptères de fabrication française (tiens, tiens...) dépêchés par Caracas avec équipages et mécaniciens pour sécuriser les déplacements d'un Evo Morales néanmoins toujours en vie, il n'en reste donc que deux, un de chaque type. Selon le ministre bolivien de l'Intérieur, Alfredo Rada, Evo continuera à les utiliser, mais il fera réviser quelques systèmes de sécurité. Un réflexe qui témoigne de la sagesse indienne aymara.

Quant au vélo dont Hugo Chavez faisait en juin dernier la promotion à la télévision vénézuélienne, il est peu probable qu'il séduise Evo. Pour aller d'une ville à l'autre sur l'Altiplano bolivien, il faut en effet franchir des cols de 4.000 m d'altitude. Le risque d'accident serait alors à la fois musculaire et cardiaque.

En outre, la bicyclette de Chavez est une "Atomica", fabriquée au Venezuela en coopération avec l'Iran, compagnon au sein de l'Axe du mal. Choisie pour tourner en dérision l'hostilité des Etats-Unis envers la recherche nucléaire iranienne, l'appellation Atomica n'est pas exempte de risques. On ne va tout de même pas faire pédaler les Boliviens sur ces Atomica qui pourraient servir de prétexte à des représailles intercontinentales de l'aviation israélienne. (Dans la psychose de complots impérialistes qui règne au palais présidentiel de La Paz, toutes les éventualités sont probablement analysées).

Au Venezuela même, les hélicos fournis par Hugo à Evo font jaser. Antonio Ledezma, candidat possible de l'opposition à la mairie de Caracas aux élections de novembre prochain, rappelle que le social-démocrate Carlos Andres Perez, l'unique chef d'Etat vénézuélien chassé de la présidence par décision de justice, le fut en 1993 pour une malversation de fonds publics proche de la présente affaire des hélicos.

C'est en effet pour contribuer à la sécurité de la présidente du Nicaragua, Violeta Chamorro, élue démocratiquement après plus de dix ans de dictature sandiniste, que Carlos Andres Perez eut l'audace de puiser dans les fonds réservés à raison de 17 millions de dollars de l'époque.

Même actualisée, cette somme est manifestement inférieure à l'investissement d'Hugo Chavez pour la sécurité -si l'on peut dire- de son ami et aspirant kamikaze Evo Morales.

Auteur: Le Bavard Latino



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