Retour / BackBernard Kouchner à Caracas et Bogota 6 ans otage des FARC: Betancourt, Colombie, France et Vichy
par Christian Galloy, directeur de LatinReporters
MADRID, jeudi 21 février 2008 (LatinReporters.com) -
Les collabos du gouvernement
de Vichy formé en 1940 par Pétain prétendaient préserver
les Français de la barbarie nazie. En 2008, les collabos des FARC
et de leur représentant international, Hugo Chavez, prétendent
préserver de la barbarie terroriste une demi-Française, ex-candidate
à la présidence de la Colombie, Ingrid Betancourt.
Enlevée le 23 février 2002, Mme Betancourt est séquestrée
depuis six ans par la guérilla narco-marxiste des Forces armées
révolutionnaires de Colombie (FARC), officiellement terroriste aux
yeux de l'Union européenne, des Etats-Unis et du gouvernement de Bogota.
Au Venezuela, voisin de la Colombie, le président Hugo Chavez est
l'allié déclaré des FARC. Il s'est érigé
de facto en leur représentant international, appelant, à la
tribune du Parlement vénézuélien, la communauté
mondiale à les reconnaître et à les biffer des listes
d'organisations terroristes. M. Chavez rêve d'étendre sa révolution
dite bolivarienne à la Colombie qui deviendrait, comme l'ambitionnent
les FARC, la République bolivarienne du Sud.
Lors d'élections présidentielles avalisées par l'Organisation
des Etats américains et par l'Union européenne, le conservateur
colombien Alvaro Uribe a été élu à la majorité
absolue dès le premier tour tant en 2002 qu'en 2006. Les sondages situent
sa popularité actuelle à plus de 80%. Selon les collabos du
couple FARC-Chavez, ces résultats s'expliqueraient par les
menaces sur la population de paramilitaires associés au pouvoir. Le
4 février dernier, de 2 à 4,8 millions de Colombiens, selon
les diverses estimations, ont manifesté dans le pays et à l'étranger
contre les FARC. Les collabos de l'alliance FARC-Chavez ont ignoré cette mobilisation
historique ou l'ont attribuée au moins partiellement à l'appel de paramilitaires, leur
conférant une extravagante représentativité.
Les FARC détiennent plus de 700 séquestrés, hommes,
femmes et enfants. Seule une quarantaine d'otages dits "politiques", dont
Ingrid Betancourt et trois Américains, est réservée
par la guérilla à un éventuel "échange humanitaire"
contre quelque 500 guérilleros emprisonnés, y compris deux
chefs rebelles extradés et condamnés aux Etats-Unis. Le sort
des autres séquestrés est lié au paiement d'une forte
rançon.
Voulant à la fois monopoliser les espoirs des otages et de leurs familles,
se mettre sous les projecteurs des médias, appuyer politiquement le
Venezuela bolivarien et ridiculiser le gouvernement colombien d'Alvaro Uribe,
les FARC libèrent unilatéralement au compte-gouttes certains
séquestrés. Deux otages "politiques" étaient remis
le 10 janvier dernier à des émissaires de Hugo Chavez. Quatre
autres le seront prochainement.
Pour y négocier "l'échange humanitaire" qui rendrait la liberté
à Ingrid Betancourt, les collabos de l'axe FARC-Chavez prétendent,
comme la guérilla, forcer le président Alvaro Uribe à
démilitariser les municipalités de Florida et Pradera. Elles
couvrent dans le sud-ouest colombien 800 km², sept fois la superficie
de Paris intra-muros, et comptent plus de 110.000 habitants. La démilitarisation
réclamée par les FARC, unilatérale car ne devant pas
à leurs yeux concerner les guérilleros, laisserait cette population
à la merci des insurgés.
Dans ce contexte et à la veille du 6e anniversaire de l'enlèvement
d'Ingrid Betancourt, le président français Nicolas Sarkozy
a dépêché en Amérique du Sud son chef de la diplomatie,
le ministre Bernard Kouchner, reçu les 20 et 21 février d'abord
à Caracas par Hugo Chavez, puis à Bogota par Alvaro Uribe.
Rendant compte de la première partie du périple du ministre
Kouchner, l'AFP (Agence France Presse), écrit notamment: "M. Kouchner a semblé satisfait de sa rencontre avec M. Chavez...
Le président vénézuélien lui a dit, selon des
diplomates français, qu'il croyait d'autres libérations "unilatérales"
possibles, mais qu'il faudrait renforcer le processus en mettant en place
un groupe de soutien, comprenant des pays latino-américains et l'Organisation
des Etats américains."
Dans le drame des otages en Colombie, Hugo Chavez apparaît donc à
nouveau comme le porte-parole des FARC, réclamant une internationalisation
du dossier afin de faciliter ou même concrétiser de fait
la reconnaissance de la guérilla par diverses chancelleries.
Bernard Kouchner, poursuit l'AFP, "devait plaider cette cause à
Bogota auprès du président Uribe, en lui rappelant que les
Farc ont rejeté toute médiation de l'Eglise catholique.
Il devait aussi faire valoir à M. Uribe, selon des diplomates français,
que c'est dans son intérêt d'avoir derrière lui cette
affaire d'otages, qui empoisonne sa vie sur la scène internationale."
Le Venezuela bolivarien et la France sarkozyste sauraient donc mieux que le président
colombien, élu deux fois à la majorité absolue, ce qui
convient ou non à la Colombie.
L'AFP, toujours inspirée par "des diplomates français", va
encore plus loin, lâchant cet avertissement: "En
cas de décès d'Ingrid Betancourt, aujourd'hui très
affaiblie, M. Uribe pourrait en outre être tenu pour responsable s'il
n'a pas fait les gestes nécessaires à temps, fait valoir la
France".
La boucle est ainsi bouclée. De 1940 à 1944, sous
Vichy, les salauds étaient les résistants qui troublaient l'ordre,
mais non les envahisseurs nazis ni leurs collabos. Et en 2008, les salauds ne
seraient pas les preneurs d'otages ni leurs collabos, mais ceux qui, comme
le président Alvaro Uribe, refusent un chantage propre à
donner des ailes à de nouvelles séquestrations en Colombie
et dans le monde.
A ce prix, comme en 1940, mieux vaut être aujourd'hui Américain
que Français, même sous Bush.
Selon El Tiempo
BERNARD KOUCHNER, BREDOUILLE À BOGOTA
BOGOTA, vendredi 22 février 2008 (LatinReporters) - "Non, Monsieur
le ministre, ce n'est pas le moment de parler du Venezuela". Selon l'influent
quotidien El Tiempo, le président colombien Alvaro Uribe aurait opposé
cette sèche négative à la demande du ministre français
des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, de réadmettre
le Venezuela de Hugo Chavez parmi les pays avalisés par Bogota pour faciliter un
échange d'otages de la guérilla des FARC contre des guérilleros
emprisonnés.
Le dialogue entre les deux hommes, le 21 février à la Casa
de Nariño (palais de la présidence colombienne), "fut respectueux,
mais sans chaleur" indique El Tiempo.
Le journal colombien fait état d'un "autre moment de préoccupation",
lorsque le président Uribe opposa la défense de la Constitution
et des lois colombiennes à la "suggestion" de Bernard Kouchner de
suspendre les opérations militaires qui pourraient mettre en danger
la vie des otages.
Quelques heures plus tard, le ministre colombien de la Défense, Juan
Manuel Santos, annonçait que l'armée avait localisé
le lieu où les FARC détiennent quatre ex-parlementaires colombiens
dont la guérilla a annoncé la prochaine libération.
Le ministre a ajouté que l'armée n'interviendrait pas afin
de faciliter cette libération.
Commentaire de LatinReporters
Le ministre Kouchner revient donc bredouille de Bogota. Il semble qu'au sein d'un département du Quai d'Orsay, siège du ministère français
des Affaires étrangères, un parfait irresponsable complique
les relations entre la France et la Colombie et, partant, peut-être
aussi les mécanismes pouvant mener à la libération d'Ingrid
Betancourt. Sinon, comment expliquer, outre les déclarations outrageantes
attribuées par l'AFP à des "diplomates français" (article
ci-dessus), l'incroyable innocence de Bernard Kouchner lorsqu'il suggère
au président colombien de confier à nouveau, dans un dossier
intérieur sensible, des responsabilités officielles au président
Hugo Chavez.
Ce dernier a clamé publiquement, à la tribune de son Assemblée nationale, ses
affinités idéologiques
"bolivariennes" avec la guérilla des FARC. Il entretient en outre
avec la Colombie un climat pré-guerrier pour soulever au Venezuela,
disent les opposants à Hugo Chavez, un nationalisme masquant les échecs
de sa gestion et sa chute vertigineuse de popularité.
Quant à la crainte qu'inspirent à la France les opérations
de l'armée colombienne pour des raisons humanitaires liées
à la vie des otages des FARC, notons que la fermeté peut ouvrir
des horizons humanitaires insoupçonnés. Il est par exemple
légitime de se demander si ce n'est pas la pression militaire croissante
sur la guérilla marxiste qui oblige cette dernière à
procéder désormais à des libérations d'otages
au compte-gouttes. Il y va pour les rebelles, qui semblent avoir perdu toute
capacité opérationnelle d'envergure, de continuer à
exister politiquement grâce à l'écho médiatique
de ces libérations. En cela, ils sont aidés par leur allié
idéologique, le président vénézuélien
Hugo Chavez.
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