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Difficile équilibre entre justice sociale et libertés Assemblée constituante élue en Equateur : Rafael Correa a cherché le plébiscite
Dernière heure QUITO, dimanche 30 septembre 2007 (LatinReporters) - Les 130 membres de l'Assemblée constituante élus le 30 septembre en Equateur doivent dans les huit mois élaborer une nouvelle Constitution. L'ambition du président Rafael Correa est que la nouvelle charte offre aux 13,9 millions d'Equatoriens, dont un tiers d'Amérindiens, le "socialisme du 21e siècle" cher à son allié vénézuélien Hugo Chavez. L'élection de la Constituante sera "notre victoire finale sur le néolibéralisme" prédisait il y a quelques jours Rafael Correa. En menaçant de démissionner si son mouvement Alliance Pays ne dominait pas la nouvelle assemblée, il a cherché le plébiscite. Le dernier sondage lui attribuait au moins 66 élus, soit la majorité absolue. De quoi aller de l'avant vers un socialisme qui, ne cesse-t-il de préciser, sera "équatorien" malgré les liens avec Hugo Chavez. Vainqueur de la présidentielle en novembre 2006 et du référendum d'avril 2007 qui a ouvert la voie à la Constituante, le président Correa reste très populaire dans un pays qui compte 60% de pauvres. Il a pu doubler l'aide aux plus démunis, passée de 15 à 30 dollars par mois, grâce à la flambée des prix du pétrole. L'Equateur en est le 5e producteur latino-américain avec 540.000 barils quotidiens. Son appui à l'unité sud-américaine, le refus de proroger au delà de 2009 l'utilisation par les Etats-Unis de la base aérienne de Manta, la volonté de renégocier les contrats avec les multinationales et son opposition aux "ingérences" du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale confèrent à Rafael Correa une image d'homme nouveau qui éclipse les vieux partis de droite et de gauche, considérés comme corrompus par la majorité des Equatoriens. Mais l'autoritarisme de Rafael Correa illustre l'éternelle difficulté d'équilibrer justice sociale et libertés. Des groupes de civils violents se réclamant de lui ont conditionné ces derniers mois des décisions de députés et de la justice. En outre, le président Correa insulte et menace les médias de manière répétitive. Comme ses homologues de gauche bolivien Evo Morales et vénézuélien Hugo Chavez, il inscrit les critiques journalistiques à son égard dans un "complot impérialiste" permanent. Le directeur de la section Liberté de presse de la Société interaméricaine de presse (SIP), l'Argentin Ricardo Trotti, y voyait en mars dernier une stratégie concertée entre les régimes en place à Caracas, La Paz et Quito pour miner la crédibilité des médias non-gouvernementaux, les plus susceptibles de mettre à jour des scandales impliquant le pouvoir. [Interview de Ricardo Trotti au journal équatorien El Universo; 4 mars 2007]. Dans le registre du complot, le 3 août dernier à l'Académie de guerre, Rafael Correa invitait l'armée équatorienne à défendre son "gouvernement citoyen" contre "des grèves, des attentats, de fausses accusations et de nouveaux scandales [des accusations de corruption dans le cadre de transactions avec le Venezuela visent l'actuel ministre de l'Economie, le socialiste Ricardo Patiño; ndlr] que préparent des groupes qui savent que les citoyens vont vaincre le 30 septembre". L'analyste militaire Luis Hernandez, colonel à la retraite, répliquait alors dans les médias que "les forces militaires ne sont pas l'armée particulière d'un président ou d'un parti politique". Enfin, Rafael Correa estime que l'élection de l'Assemblée constituante autorise la liquidation immédiate de l'actuel Congrès (Parlement monocaméral) qu'il ne domine pas pour n'y avoir pas présenté de candidats aux législatives de 2006. En coordination avec l'Assemblée constituante, une "commission législative" assurerait la transition institutionnelle jusqu'à l'élection probable en 2008 [sur ce point les indications officielles restent floues] d'un nouveau Parlement dont les pouvoirs seraient définis par la nouvelle Constitution. Discrédité aux yeux de nombreux Equatoriens et qualifíé "d'égout" par Rafael Correa, le Congrès fut néanmoins élu légitimement sous l'oeil d'observateurs internationaux. En mars dernier, 57 de ses 100 députés, opposés au monopole présidentiel sur le projet d'Assemblée constituante, furent destitués et remplacés par leurs suppléants sur décision du Tribunal suprême... électoral! Une décision appuyée par Rafael Correa. © LatinReporters.com - Amérique latine - Espagne
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