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Crise pape-islam: en Espagne, 3 journaux sur 4 pour Benoît XVI

Benoît XVI en juillet 2006 à Valence (Espagne)
© V Encuentro Mundial de las Familias
MADRID, dimanche 17 septembre 2006 (LatinReporters.com) - La "réalité historique" et la "liberté d'expression" sont invoquées par une majorité de grands journaux espagnols pour soutenir le pape Benoît XVI, cible de la colère du monde musulman qui accuse le souverain pontife d'avoir associé l'islam à la violence.

Dans un discours prononcé le 12 septembre à l'université de Ratisbonne (Allemagne), le pape citait les propos sur le djihad (guerre sainte) tenus au 14e siècle devant un érudit persan par l'empereur byzantin Manuel II Paléologue: "Montre-moi ce que Mahomet a apporté de neuf et tu ne trouveras que des choses perverses et inhumaines, tel son commandement de diffuser par l'épée la foi qu'il prêchait".

Benoît XVI ajoutait, dans son même discours, que "l'empereur explique ainsi minutieusement les raisons pour lesquelles la diffusion de la foi par la violence est irrationnelle. La violence contraste avec la nature de Dieu et la nature de l'âme".

Sept mois après la crise des caricatures de Mahomet, le tollé dans le monde islamique a été immédiat au niveau populaire, médiatique et diplomatique. Des églises ont été attaquées samedi en Cisjordanie et en Irak.

Ce nouvel incendie entre civilisations était analysé samedi par quatre grands journaux espagnols, deux de gauche (El Pais et El Periodico), un libéral de centre droit (El Mundo) et un conservateur catholique (ABC).

Proche du gouvernement socialiste de José Luis Rodriguez Zapatero, qui prône une "Alliance des civilisations" entre l'Occident et le monde musulman, El Pais est le seul à critiquer le chef de l'Eglise catholique. Sous le titre "Dangereux malentendu", l'éditorialiste du journal regrette le manque "d'instinct politique" qui différencierait le pape actuel du "grand politique" qu'était son prédécesseur Jean Paul II. El Pais ajoute que "le discours du pape Ratzinger en tant que réflexion contre le fanatisme religieux n'aura pour effet immédiat et manifeste que d'accroître ce phénomène".

"Nous sommes dans une situation similaire à l'affaire des caricatures de Mahomet... Comme alors, on doit défendre la liberté d'expression, un droit dont ne sont pas exclus les dirigeants religieux" estime par contre l'éditorialiste d'El Periodico. "Il serait ingénu, poursuit-il, de penser que Benoît XVI a été imprudent et il est probablement plus exact de considérer qu'il était conscient de ce qui pouvait survenir en exprimant son opinion... Il serait injuste de lui demander de renoncer au débat intellectuel parce que d'autres préfèrent le cri à la confrontation dialectique".

Reprochant à ceux qui critiquent le pape de "diffuser une interprétation biaisée" de ses paroles, l'éditorialiste du quotidien ABC écrit pour sa part que "les représentants du monde musulman, religieux ou politiques, vivant ou non dans des pays européens, doivent accepter la liberté d'expression et de pensée en vigueur dans les sociétés occidentales et qui, dans ce cas, protège le Saint-Père".

Enfin, El Mundo reproduit un article de Magdi Allam, éditeur adjoint du Corriere della Sera. Cet influent journaliste et écrivain, musulman italien d'origine égyptienne, prétend que le pape est aujourd'hui menacé pour avoir exposé "la réalité historique", que "tout musulman honnête et rationnel devrait accepter".

"L'idéologie de la haine est une réalité ancestrale qui existe au sein de l'islam depuis ses origines, à cause de son refus de reconnaître et respecter la pluralité des communautés religieuses" précise Magdi Allam. "Je suis atterré de constater, conclut-il, que même les musulmans dits modérés ont renoncé au signe de la raison et se sont rangés du côté de la guerre sainte, dont ils seront sans doute les principales victimes".




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