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Les proches du président réactivent "l'Etat major du peuple" Bolivie: l'armée délivre trois ministres d'Evo Morales séquestrés dans un climat social tendu
Les ministres Carlos Villegas (Planification), Celinda Sosa (Développement économique) et Walter Villaroel (Mines) étaient enfermés mardi soir au siège du Comité civique de Puerto Suarez après avoir été insultés lors d'une assemblée au cours de laquelle ils expliquaient pourquoi le gouvernement s'oppose à la construction de l'usine. Mille cinq cents emplois dépendent de ce chantier. "Cet investissement étranger est illégal et viole l'article 25 de la Constitution" a rappelé à La Paz le ministre de la Présidence, Juan Ramon Quintana. L'article 25 interdit l'établissement d'entreprises et de personnes étrangères à moins de 50 km des frontières. Or, c'est dans cette frange, à proximité du Brésil, qu'EBX-Bolivia, filiale de la société brésilienne EBX, construit depuis neuf mois des hauts fourneaux. Formé en janvier dernier, le gouvernement nationaliste de gauche d'Evo Morales a suspendu la licence d'EBX-Bolivia, à laquelle il est aussi reproché de vouloir utiliser du charbon végétal très polluant. Les Comités civiques de Puerto Suarez menacent de bloquer les routes et l'aéroport de la région, utilisant les mêmes armes qu'Evo Morales lorsque ce dernier, alors leader syndical, paralysait la Bolivie et provoquait la chute de deux présidents avant d'être élu triomphalement à la tête de l'Etat en décembre dernier. Principal syndicat sous contrôle de "l'Etat major du peuple"? Sur le plan national, la Centrale ouvrière bolivienne (COB, principal syndicat) a appelé les travailleurs à descendre dans la rue le 21 avril pour soutenir les revendications, surtout salariales, de multiples secteurs. Contre "l'aventurisme" de Jaime Solares, président de la COB et ex-allié d'Evo Morales dans les luttes sociales, les partisans du chef de l'Etat réactivent "l'Etat major du peuple". Surgi de manière informelle en 2003 dans la chaleur de la mobilisation contre l'ex-président conservateur Gonzalo Sanchez de Lozada, "l'Etat major du peuple", sans statuts légaux connus, fut à l'époque proclamé lors d'une assemblée de mouvements sociaux, dont la COB. Le coordinateur de sa réactivation, Hugo Moldiz, un proche du président Morales, définit aujourd'hui "l'Etat major du peuple" comme l'instrument politique du nouveau gouvernement, appuyé par "plus de 25 institutions sociales et politiques" et luttant pour la "révolution démocratique initiée le 18 décembre" 2005 (date de la victoire d'Evo Morales aux élections présidentielle et législatives). Au risque d'être perçu comme une garde prétorienne présidentielle, "l'Etat major du peuple" décidait mardi de de créer des "comités de défense de la démocratie" sur l'ensemble du territoire bolivien et de prendre le contrôle de la COB. La réalité de ce contrôle reste à démontrer. Des soubresauts sont possibles. Depuis le début du mois d'avril, une succession de conflits sociaux et un chapelet de grèves et de barrages routiers ont marqué la fin de l'état de grâce du président Morales, investi le 22 janvier dernier. Ont été touchés les transports, l'enseignement, le réseau hospitalier et le secteur stratégique du gaz, dont l'exportation vers l'Argentine et le Brésil est réduite à cause d'une dispute régionale pour la propriété de l'un des plus importants gisements de gaz naturel de la région de Tarija. Par ailleurs, les riches départements orientaux de Tarija et de Santa Cruz, où Evo Morales et son Mouvement vers le socialisme (MAS) furent minoritaires aux élections de décembre, s'estiment délaissés par le nouveau gouvernement et agitent la menace de paralysies régionales. Tarija et Santa Cruz sont les greniers énergétique et alimentaire de la Bolivie. Enfin, au nom de son indépendance, le Pouvoir judiciaire a entamé avec le président Morales, accusé "d'intromission déstabilisatrice", un bras de fer aux conséquences imprévisibles. © LatinReporters.com - Amérique latine - Espagne
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