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L'éthanol au centre du 2e sommet Brésil / Etats-Unis en 3 semaines Reçu par Bush, Lula contredit Castro sur les biocarburants
"L'éthanol ne menace pas l'environnement" affirmait Lula en titre d'une libre opinion signée dans le Washington Post de vendredi, la veille de sa rencontre avec le président Bush, la septième entre les deux chefs d'Etat et la seconde en trois semaines. Ensemble, le 9 mars dernier à Sao Paulo, ils avaient lancé un partenariat sur l'éthanol. Le Brésil et les Etats-Unis en assurent plus de 70% de la production mondiale. Quarante-huit heures avant le sommet de Camp David, à la une du quotidien Granma, organe du Comité Central du Parti communiste de Cuba, Fidel Castro signait une longue mise en garde contre les conséquences catastrophiques, sur l'environnement et les ressources en nourriture, qu'il attribue à la production de carburants verts à partir de cultures en principe alimentaires. Dans ce premier article signé depuis son hospitalisation en juillet 2006, le Lider Maximo tirait à boulets rouges sur les Etats-Unis, qui extraient leur éthanol du maïs, les désignant comme les responsables potentiels de la "mort prématurée de milliards de personnes" que pourrait menacer la famine. Lors de la conférence de presse clôturant samedi le sommet de Camp David, le président brésilien a contredit longuement Fidel Castro sans le citer et a confirmé en ces termes l'importance donnée par Brasilia à sa collaboration avec Washington: "Le mémorandum signé [le 9 mars] à Sao Paulo [sur l'éthanol] est la base d'un partenariat ambitieux qui nous permettra d'affronter les plus grands défis de ce siècle naissant: d'abord résoudre la crise de l'énergie qui affecte presque tous les pays du monde; ensuite, protéger l'environnement menacé par le réchauffement global de la planète; et enfin, combattre la pauvreté et l'exclusion sociale par la création de nouveaux emplois et l'augmentation du revenu des travailleurs les plus pauvres". Le Brésil, lui, tire son éthanol de la canne à sucre et, se voulant rassurant en matière d'environnement, Lula écrivait dans son article publié vendredi par le Washington Post: "L'éthanol ne menace pas la forêt tropicale, étant donné que le sol de l'Amazonie n'est pas apte à la culture de la canne à sucre. Celle-ci ne menace pas non plus la production d'aliments... A peine un pour cent [des terres cultivables du Brésil] sont utilisées pour la canne à sucre nécessaire à l'éthanol". Toujours selon Lula, "le véritable défi pour assurer la sécurité alimentaire consiste à vaincre la pauvreté ... La propagation de la canne à sucre, du soja et d'autres oléagineux destinés aux biocarburants garantira aux familles des paysans les plus nécessiteux les moyens [matériels] de s'alimenter". Le principal allié de Fidel Castro, le président Hugo Chavez du Venezuela, avait maudit aussi les biocarburants au début du mois de mars, lors d'une tournée latino-américaine visant à réduire la portée de celle effectuée à la même date par le président Bush. Que Luiz Inacio Lula da Silva soit le premier chef d'Etat latino-américain reçu à Camp David par George W. Bush illustre, comme la fréquence de leurs rencontres, l'ampleur de leur rapprochement. Lula est l'une des icônes de la nouvelle gauche latino-américaine, mais aux yeux de Washington traiter le Brésil, avec sa superficie semi-continentale et ses 190 millions d'habitants, en leader naturel du sous-continent latino-américain devrait à la fois conforter le néo-réalisme d'un Lula désormais converti à la social-démocratie et freiner l'expansionnisme, facilité par la manne pétrolière, de l'idéologie radicalement antiaméricaine d'Hugo Chavez. Cela n'empêche pas le président brésilien de conserver, comme un arbitre au-dessus de la mêlée, d'excellentes relations avec le Venezuela et Cuba. Les biocarburants donnent de la consistance au dessein de Washington. Lula avertit toutefois que le commerce international de l'éthanol et plus tard du biodiesel risque d'être freiné par des politiques protectionnistes comme celle des Etats-Unis en faveur de leurs producteurs de maïs tournés vers l'éthanol. Le président brésilien attribue à ce protectionnisme la hausse de près de 80% du prix de céréales nord-américaines. [Hausse qui crée des problèmes sociaux, notamment au Mexique, gros importateur de maïs américain; ndlr]. Outre les Etats-Unis et le Brésil, l'Union européenne, la Chine, l'Inde, l'Afrique du Sud et la Colombie ont, parmi d'autres, proclamé leur ambition de recourir aux biocarburants. Le réchauffement planétaire, la flambée des prix du pétrole et les risques d'une trop forte dépendance à l'égard des grands exportateurs d'hydrocarbures (pays du Moyen-Orient et Venezuela) favorisent cette évolution. Selon Lula, la proportion d'éthanol qui se substitue à l'essence au Brésil, pionnier en ce domaine, assure déjà au pays son autosuffisance pétrolière. © LatinReporters.com - Amérique latine - Espagne
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