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Lula: 60,83% - Alckmin: 39,17% Brésil: réélu président, Lula promet croissance, unité et priorité aux pauvres
Candidat du Parti des travailleurs (PT, gauche), premier ouvrier élu chef de l'Etat brésilien (en 2002 avec 61,3% des voix) et icône de la gauche latino-américaine, Lula a obtenu au second tour de l'élection présidentielle 60,83% des suffrages (48,61% au premier tour) contre 39,17% à son adversaire Geraldo Alckmin (41,64% au premier tour), candidat du Parti de la social-démocratie brésilienne (PSDB, centre droit). En dépit de l'obligation de vote, 18,99% des 126 millions d'électeurs brésiliens ne se sont pas rendus aux urnes. Décrochant son second (et constitutionnellement dernier) mandat de quatre ans avec quelque 58,3 millions de voix, chiffre record dans l'histoire électorale du Brésil, Lula gagne 11,6 millions de suffrages par rapport au premier tour du 1er octobre. Par contre, les 37,5 millions de voix de Geraldo Alckmin marquent un recul de 2,4 millions en comparaison du même premier tour. Lula l'emporte dans quatre des cinq ensembles régionaux du pays, Nord, Nord-Est, Centre-Ouest et Sud-Est. Alckmin n'est en tête que dans le Sud, alors qu'au premier tour il dominait en plus le Sud-Est et le Centre-Ouest. Les résultats du second tour réduisent ainsi la portée des multiples analyses sur une cassure régionale qu'auraient dessinée les votes du premier tour entre un Brésil des pauvres et un autre des riches. Il est néanmoins vrai que le poumon économique du pays, l'Etat et la ville de Sao Paulo, demeure le fief de Geraldo Alckmin. Cela n'a pas empêché Lula d'y fêter sa victoire. Portant un tee-shirt frappé de l'inscription "A vitória é do Brasil" (La victoire est celle du Brésil), l'ex-ouvrier métallurgiste, âgé de 61 ans, a fait ses premières promesses post-électorales aux milliers de sympathisants qui l'acclamaient en agitant des drapeaux sur l'Avenida Paulista de Sao Paulo. Après avoir salué ce "moment magique" de la démocratie brésilienne, capable de "mettre en haut ceux qui viennent d'en bas", Lula a annoncé pour 2007 une croissance de 5%, soit le double du taux actuel. La faible croissance par rapport aux autres pays d'Amérique du Sud fut l'une des principales critiques, avec la corruption, adressée par Alckmin à Lula.
Mais Lula a prévenu qu'il maintiendra "une politique fiscale dure", mots que les observateurs traduisent par discipline budgétaire. "On ne peut pas dépenser plus que ce qu'on gagne... Au-delà des revendications de mes compagnons syndicalistes, on ne pourra donner aux gens que ce que permet la responsabilité" a lancé le président réélu. Cette profession de foi dément peut-être un récent virage plus marqué à gauche parfois imputé à Lula, qui semble plutôt vouloir conserver la confiance qu'il a gagnée lors de son premier mandat au sein des milieux financiers, mais au prix de critiques de l'aile dure du PT. En contrepartie, Lula accordera "la priorité absolue aux plus pauvres". Ses programmes sociaux d'aide immédiate, telle la Bourse-Famille, lui avaient permis de se présenter à l'élection présidentielle comme "le candidat des pauvres", un slogan qui contribua à sa victoire. En politique intérieure, minée par l'impossibilité de tout parti de réunir à lui seul une majorité tant de députés que de sénateurs (un morcellement confirmé par les législatives du 1er octobre), Lula prône l'unité en faveur des priorités économiques qui seraient coulées dans un plan de développement national. Lula tentera par ailleurs de mener à bien une réforme politique visant à garantir la fidélité des parlementaires au parti qui les a fait élire. Les transfuges et marchandages politiques pour tenter de construire une majorité parlementaire ont été à l'origine de scandales de corruption qui éclaboussent depuis plus d'un an le PT de Lula. Il s'y référait implicitement en affirmant, dimanche soir à la foule de ses partisans en liesse, que le gouvernement "n'a désormais plus le droit moral, éthique ni politique de commettre des erreurs". Le dialogue national souhaité par Lula pourrait être favorisé par le soutien d'une majorité de gouverneurs des Etats élus également ce mois d'octobre. Le PT ne contrôle directement l'exécutif régional que dans 5 des 27 Etats du Brésil, mais alors qu'une majorité des Etats était hostile à Lula lors de son premier mandat, 15 des 27 gouverneurs l'appuieront probablement désormais. Le président a par ailleurs apprécié la courtoisie de son adversaire Geraldo Alckmin, qui avait félicité Lula par téléphone avant même le décompte total des bulletins de vote. Sur le plan continental, Lula a renouvelé sa confiance dans le développement du Mercosur, marché commun sud-américain créé par le Brésil, l'Argentine, le Paraguay et l'Uruguay et qu'a rejoint cette année le Venezuela d'Hugo Chavez. Selon le président brésilien, le Mercosur doit devenir pour l'ensemble de l'Amérique latine le mécanisme d'intégration de référence. Alors que sur ce chapitre Hugo Chavez ne cesse d'attribuer à Washington un rôle déstabilisateur, Lula s'est gardé, dimanche, de critiquer les Etats-Unis.
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