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Jacques Delors dans un "conseil des sages" autour de M. Zapatero
UE: Cuba, chômage et Mr. Bean troublent la présidence espagnole
MADRID, mercredi 6 janvier 2010 (LatinReporters.com) -
Eurodéputé socialiste espagnol refoulé de Cuba alors
que l'Espagne prétend rapprocher l'Union européenne (UE) de
l'île des frères Castro, annonce de 800.000 chômeurs de
plus en 2009 en Espagne au moment où son chef de gouvernement, M.
Zapatero, réunit un "conseil des sages" sur une sortie de crise en
Europe et piratage du site Internet de la présidence espagnole de
l'UE, le désopilant Mister Bean s'y substituant à M. Zapatero
... Le semestre espagnol à la tête de l'UE démarre ainsi
très fort !
L'Espagne socialiste "condamne" Cuba Cheville ouvrière du groupe socialiste au Parlement européen pour les relations avec l'Amérique latine, l'eurodéputé espagnol Luis Yañez Barnuevo était refoulé lundi à l'aéroport de La Havane. Il venait d'y atterrir avec sa femme Carmen Hermosin, députée au Parlement espagnol. En voyage privé avec visa touristique, le couple rembarquait le même jour dans un avion à destination de l'Espagne. Luis Yañez est connu pour ses positions en faveur de "l'opposition démocratique", dit-il, à la "dictature" cubaine. Dans un article publié en décembre 2007, il mettait sur le même pied Fidel Castro et le dictateur espagnol Franco (mort en 1975), les désignant comme "deux Galiciens qui, au fond, s'admiraient". [Ndlr: Franco était Galicien et le père des frères Fidel et Raul Castro était un émigré espagnol venu de Galice]. Convoqué au ministère espagnol des Affaires étrangères pour présenter "des explications pertinentes", l'ambassadeur de Cuba à Madrid, Alejandro Gonzalez, a justifié le 5 janvier le refoulement de l'eurodéputé par "l'application de lois internes cubaines" indique un communiqué officiel espagnol. Le secrétaire d'Etat espagnol pour l'Ibéro-Amérique, Juan Pablo De Laiglesia, a exprimé à l'ambassadeur la "condamnation" par l'Espagne du refoulement de Luis Yañez et l'espoir "que ne se reproduiront plus des incidents de ce type, qui ne contribuent pas au développement des relations entre les deux pays" précise le même communiqué. "Ce n'est pas une bonne nouvelle. Je crois que les Cubains se sont trompés" a estimé pour sa part devant des correspondants de la presse européenne le ministre espagnol des Affaires étrangères, Miguel Angel Moratinos. Il a toutefois ajouté que cet incident n'est pas de nature à remettre en cause la volonté de l'Espagne de convaincre ses partenaires européens, pendant la présidence espagnole de l'Union européenne qui a débuté le 1er janvier, d'assouplir leur position à l'égard de Cuba. Luis Yañez partage cette opinion. Contre l'avis de son opposition conservatrice et malgré l'hostilité ou les doutes de plusieurs pays européens (Suède, République tchèque, Royaume-Uni, Allemagne), le gouvernement socialiste espagnol de José Luis Rodriguez Zapatero prône une normalisation des relations de l'UE avec Cuba. Elle reposerait sur la signature d'un accord de coopération et l'abandon de la "position commune" européenne qui lie la normalisation à des progrès en matière de droits de l'homme. Mais l'Espagne n'a donc pas la tâche facilitée par l'attitude pour le moins peu reconnaissante de Cuba. Chômage record et "conseil des sages" Dans le cadre de la présidence espagnole de l'UE au premier semestre 2010, José Luis Rodriguez Zapatero a réuni le 5 janvier à Madrid un "conseil des sages" pour discuter de la sortie de crise en Europe et de son projet de "gouvernement économique européen". Cherchant manifestement un impact médiatique qui freinerait la chute de sa popularité due à la gestion catastrophique de la crise en Espagne, M. Zapatero s'est entouré de: - Jacques Delors, ex-ministre français de l'Economie et des Finances et ex-président de la Commission européenne (de 1985 à 1995); - Felipe Gonzalez, ex-président du gouvernement espagnol et actuel leader du Groupe de réflexion sur le futur de l'UE; - Pedro Solbes, ex-commissaire européen et ex-ministre espagnol des Finances; - Elena Salgado, actuelle ministre espagnole des Finances. Selon une source gouvernementale espagnole, les discussions ont été "très utiles" et ont porté essentiellement sur le "renforcement de la politique de coordination économique" en Europe face à la crise qui a débuté en 2008. C'est curieusement le ministère espagnol du Travail qui a terni l'impact médiatique de la première réunion du "conseil des sages" en diffusant le même jour le bilan annuel du chômage. En 2009, 794.640 chômeurs supplémentaires ont été enregistrés en Espagne. Le nombre total actuel des sans-emploi a quasi doublé en deux ans. Le ministère du Travail le fixe à 3.923.603. Mais l'enquête trimestrielle de population active effectuée par l'Institut national de statistique (INE), considérée dans les milieux économiques espagnols comme le meilleur reflet de la situation réelle, chiffrait déjà fin septembre 2009 le nombre de chômeurs à 4.123.300, un record historique. Les résultats de la dernière enquête de l'INE seront connus ce mois de janvier. Pour sa part, Eurostat estimait fin octobre 2009 à 19,3% le taux de chômage en Espagne. A Madrid et dans d'autres capitales européennes, des éditorialistes jugent paradoxale l'ambition de M. Zapatero de jeter, lors des six mois de la présidence espagnole de l'UE, les bases d'un "gouvernement économique européen", alors qu'il a fait de l'Espagne le malade de l'Europe. Des analystes s'étonnent aussi du crédit soudain octroyé par M. Zapatero à Felipe Gonzalez et Pedro Solbes. Il les ignorait lorsque tous deux lui reprochaient ces derniers mois l'absence de ligne directrice claire dans sa gestion peu soucieuse des équilibres financiers. Au nom du Parti Populaire (PP, opposition conservatrice espagnole), son responsable pour les affaires économiques, l'ex-ministre Cristobal Montoro, a salué "la prouesse d'avoir réuni sur une seule photo", celle du "conseil des sages" qu'il a qualifiée de "photo du chômage", tous les responsables, à ses yeux, de la catastrophe économique actuelle en Espagne. Il a aussi attiré "l'attention" sur la militance socialiste de l'ensemble des participants au "conseil des sages", alors que la majorité des pays de l'Union européenne sont gouvernés, a précisé Cristobal Montoro, par "des partis du centre droit libéral". Cette dernière étiquette est aussi celle, avec une nuance sociale-chrétienne, du président dit stable du Conseil européen, le Belge Herman Van Rompuy. Le sommet européen informel sur l'économie qu'il a convoqué pour le mois de février fera-t-il grand cas du "conseil des sages" de M. Zapatero? Mister Bean président semestriel de l'UE Outre Cuba et le chômage, le piratage humoristique de son site Internet officiel a troublé aussi la présidence espagnole de l'UE. Le service de communication de M. Zapatero ne cesse de démentir ce piratage. Il explique laborieusement que "l'utilisation d'une capture de page de recherche du site pour faire un photomontage" ne signifierait pas la violation "d'accès non autorisés". Il n'empêche que des milliers d'internautes ont vu au matin du 4 janvier l'inénarrable gaffeur Mister Bean, personnage vedette de l'acteur Rowan Atkinson, éclipser la photo de M. Zapatero en page d'accueil du site. La popularité du comique britannique, au visage ahuri sous des sourcils en accent circonflexe comme ceux du leader socialiste espagnol, a provoqué un tel afflux de visiteurs que l'accès au site a été bloqué toute la journée. Le choix d'un gaffeur pour supplanter M. Zapatero n'est sans doute pas innocent. Les 11,2 millions d'euros investis au titre de la présidence espagnole de l'UE dans la communication, y compris le site Internet officiel et sa sécurité, expliquent la mauvaise humeur mêlée de honte des assesseurs d'image de José Luis Rodriguez Zapatero. © LatinReporters.com - Amérique latine - Espagne |