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1ère frappe des séparatistes basques depuis la fin de leur cessez-le-feu Espagne - attentat : l'ETA marque la rentrée politique à l'approche des législatives
Le gouvernement socialiste de José Luis Rodriguez Zapatero tenait vendredi son premier conseil des ministres après la pause de l'été. Parallèlement, le président français Nicolas Sarkozy effectuait le même jour une visite officielle au Pays basque français, base arrière de l'ETA, pour y évaluer notamment les résultats de la lutte antiterroriste menée en étroite collaboration avec la police espagnole. A Madrid, les socialistes gouvernementaux, déjà en campagne préélectorale, doivent désormais prouver qu'ils peuvent lutter efficacement contre l'ETA, dont les attentats ont fait 855 morts (chiffre du site Internet de la garde civile) et plus de 2.400 blessés depuis 1968. Paradoxalement, négocier avec les séparatistes fut pour M. Zapatero le pilier, pour le moins ébranlé, de l'actuelle législature. Le directeur général de la police et de la garde civile, Joan Mesquida, estime que l'attentat de Durango visait à provoquer une "boucherie". La camionnette piégée contenait, croit-il, de 80 à 100 kg d'explosifs. Et qu'à peine deux gardes civils aient été blessés légèrement serait un miracle. Perpétré dans la nuit, vers 3h30, l'attentat a endommagé notablement la caserne, des immeubles proches et plusieurs dizaines de véhicules. Retrouvée calcinée, une voiture que les terroristes auraient utilisée dans leur fuite portait des plaques d'immatriculation portugaises. Selon Joan Mesquida, cet indice renforcerait les soupçons sur l'existence d'une infrastructure de l'ETA au Portugal. Si l'on excepte deux mini-bombes inaperçues sur le parcours navarrais du dernier Tour de France cycliste, l'ETA viendrait donc de frapper pour la première fois depuis son annonce, le 5 juin dernier, de la fin de son cessez-le-feu. Celui-ci avait été décrété en mars 2006 dans le cadre de négociations dites de paix avec le gouvernement de M. Zapatero. Les pourparlers coururent à l'échec après l'attentat spectaculaire du 30 décembre 2006 contre l'aéroport de Madrid. Dans la logique particulière des terroristes séparatistes, cette action qui coûta la vie à deux immigrés équatoriens devait "reconduire" le processus de paix, sans mettre fin à la trêve. Sur le fond, les négociations ont buté, comme toutes les précédentes, sur deux exigences historiques de l'ETA: droit des Basques à l'autodétermination et rattachement de la Navarre au Pays basque. "Tôt ou tard, tous les terroristes finiront en prison... Ils n'atteindront jamais leurs objectifs. Nous devons leur opposer l'action ferme de la police et de la justice et l'unité de tous les démocrates" a déclaré vendredi à Madrid à l'issue du conseil des ministres Maria Teresa Fernandez de la Vega, vice-présidente et porte-parole du gouvernement espagnol. Le parti interdit Batasuna, bras politique de l'ETA, a attribué le retour de la violence à l'intransigeance du gouvernement lors des négociations de paix avortées et a ignoré l'appel à la condamnation de l'attentat de Durango que lui lançait le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) de M. Zapatero. La galaxie nationaliste dite modérée, majoritaire au Pays basque, a condamné, elle, l'attentat. Le Parti Populaire (PP, opposition conservatrice) de Mariano Rajoy a réitéré sa disposition à définir avec le PSOE une politique antiterroriste commune, tout en reprochant aux socialistes "d'être réticents à récupérer les canaux de communication politique avec le principal parti de l'opposition". Quant à l'influente Association des Victimes du Terrorisme (AVT), proche du PP, elle se dit convaincue que les négociations entre socialistes et ETA se poursuivent et que "tout fait partie d'une stratégie bien définie dans laquelle le gouvernement et la bande [l'ETA] ont besoin l'un de l'autre". Cela semble insinuer que le gouvernement de M. Zapatero et l'ETA auraient mis en scène un semblant de retour au binôme violence-répression à l'approche des législatives afin que paraisse désormais sans objet l'hostilité du PP et de l'AVT à toute négociation avec les séparatistes. Des sondages et les élections municipales et régionales du 27 mai dernier ont montré que cette hostilité pouvait apporter à l'opposition de consistants dividendes électoraux. La théorie du complot, très en vogue au sein de la droite espagnole, se nourrit aussi de l'hypothèse non vérifiée d'une participation directe ou indirecte de l'ETA et/ou de socialistes aux attentats islamistes de Madrid du 11 mars 2004. Ils firent 191 morts et 1.824 blessés et forcèrent trois jours plus tard la victoire inattendue de M. Zapatero aux élections législatives. © LatinReporters.com - Amérique latine - Espagne
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