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Vidéos et documents sur le site Internet de la multinationale
Equateur - corruption : Chevron implique l'entourage du président Correa

QUITO, mercredi 2 septembre 2009 (LatinReporters.com) - La multinationale pétrolière américaine Chevron affirme que le procès ouvert contre elle en Equateur pour dommages à l'environnement est vicié par une trame de corruption prévoyant des pots-de-vin pour un total de trois millions de dollars. Chevron implique le juge en charge du dossier, ainsi que "des personnes disant représenter le gouvernement équatorien et le parti Alianza Pais" du président Rafael Correa.

Dans un communiqué émis lundi, la compagnie pétrolière assure avoir adressé "à des autorités de l'Equateur et des Etats-Unis" la documentation et des vidéos, diffusées avec leur retranscription sur le site Internet de Chevron, prouvant la collusion entre le juge Juan Evangelista Nuñez Sanabria et l'entourage présidentiel. Chevron identifie notamment "Carlos Patricio Garcia Ortega, coordinateur politique d'Alianza Pais" et "Juan Pablo Novoa Velasco, avocat représentant le gouvernement équatorien".

La compagnie américaine prétend que lors de quatre réunions tenues en mai et juin derniers, dont deux à Quito au siège d'Alianza Pais, le juge et les proches supposés du président Rafael Correa ont été filmés à leur insu par un Equatorien, Diego Borja, et un Américain, Wayne Hansen, qui se présentaient comme des hommes d'affaires cherchant à conclure des contrats avec le gouvernement.

Les vidéos ainsi réalisées permettraient, selon Chevron, d'entendre le juge Nuñez affirmer qu'il rendra en octobre ou novembre prochains sa sentence, déjà prédéterminée malgré l'apport de nouvelles pièces au procès. Le magistrat déclarerait Chevron coupable et la contraindrait à verser au gouvernement équatorien une indemnisation de 27 milliards de dollars [bien 27 milliards; ndlr]. Toujours selon Chevron, le juge, sur les vidéos, assurerait à ses interlocuteurs qu'un recours probable de la société américaine serait rapidement rejeté.

Chevron, qui absorba Texaco en 2001, est poursuivie pour d'importants dommages à l'environnement dus aux extractions de pétrole de Texaco entre 1972 et 1995 dans l'Amazonie équatorienne. La population locale attribue une augmentation des cas de cancer à cette pollution, dont Chevron-Texaco rejette néanmoins la responsabilité sur la compagnie publique équatorienne Petroecuador. Représentant en principe des milliers d'affectés, les plaignants dans le procès contre Chevron sont regroupés dans un Front de Défense de l'Amazonie.

Pour réparer les dommages et notamment purifier l'eau de la région, le gouvernement de Quito fera probablement appel à des entreprises privées et c'est dans ce contexte que l'Equatorien Diego Borja et l'Américain Wayne Hansen cherchaient apparemment à conclure des contrats avec l'administration équatorienne.

Chevron souligne que les vidéos réalisées par ces deux hommes prouveraient qu'en contrepartie d'éventuels contrats, à conclure après la condamnation espérée de la multinationale pétrolière, les proches du gouvernement équatorien réclament des pots-de-vin totalisant trois millions de dollars, "se distribuant comme suit: un million pour le juge Nuñez, un million pour des représentants de la présidence de la République et un million pour les plaignants".

Charles James, vice-président de Chevron, demande en conséquence la récusation du juge Nuñez, l'annulation des décisions antérieures du magistrat et l'ouverture d'une "enquête exhaustive".

La porte-parole du Front de Défense de l'Amazonie, Karen Hinton, souhaite également une enquête, mais pour déterminer si les accusations de Chevron "sont fondées ou si elles sont le produit d'une campagne sale conçue et financée par la compagnie", d'autant que l'Equatorien Diego Borja travailla autrefois pour Chevron, qui le reconnaît.

Le juge Nuñez a démenti toute implication dans la trame de corruption. Au nom du gouvernement équatorien, le secrétaire juridique de la Présidence de la République, Alexis Mera, estime dans un communiqué que "Chevron tente de dévier le cours du procès" en utilisant des "conversations interceptées de manière délictueuse" dans la crainte d'une sentence défavorable.

D'autres dossiers gênent le président Correa

Le dossier Chevron rebondit au moment où le contrôleur général de l'Etat, Carlos Polit, examine encore la légalité des contrats, d'un montant global de plus de 80 millions de dollars, conclus avec des entreprises publiques par Fabricio Correa, frère du président Rafael Correa. Cette enquête a été ouverte suite à la révélation par les médias des liens d'affaires privilégiés entre Fabricio Correa et l'Etat.

Socialiste radical et allié de son homologue vénézuélien Hugo Chavez, le président Rafael Correa est d'autre part régulièrement prié par le principal parti d'opposition, la Société Patriotique de l'ex-président Lucio Gutierrez, de laisser la justice enquêter sur l'apport présumé de 400.000 dollars de la guérilla marxiste colombienne des FARC (Forces armées révolutionnaires de Colombie) à sa campagne présidentielle de 2006.

Attribuant généralement, comme Hugo Chavez, les critiques à une campagne de "l'impérialisme" ou de la "droite fasciste", Rafael Correa a toujours nié ce financement que la Colombie voisine affirme avoir découvert par des messages contenus dans des ordinateurs saisis au nº2 des FARC, Raul Reyes. Ce chef rebelle fut abattu lors d'un raid mené le 1er mars 2008 par l'armée colombienne contre un camp permanent de la guérilla au nord de l'Equateur.



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