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Un communiqué commun apaise la polémique politico-judiciaire
Venezuela et Espagne contre le terrorisme: ETA citée, les FARC non

MADRID, dimanche 7 mars 2010 (LatinReporters.com) - La crise diplomatique entre le Venezuela et l'Espagne semble évitée. La fureur du président vénézuélien Hugo Chavez est retombée. Cinq jours après avoir été accusé par la justice espagnole d'appuyer une alliance terroriste entre indépendantistes basques de l'ETA et guérilla colombienne des FARC, le gouvernement de Caracas a émis le 6 mars avec celui de Madrid un communiqué affirmant leur volonté commune de combattre le terrorisme.

Voici la traduction intégrale de ce bref communiqué commun [en pdf, l'original diffusé à Madrid] :

"Les gouvernements d'Espagne et du Venezuela ratifient leur condamnation la plus énergique du terrorisme sous toutes ses formes et manifestations.

Le gouvernement vénézuélien réfute et dément les informations publiées sur une supposée collaboration avec l'organisation terroriste ETA, dont il rejette sans réserve les activités.

Les deux gouvernements réitèrent leur engagement à poursuivre leur collaboration dans les domaines judiciaire et policier, mettant effectivement en oeuvre les instruments de coopération existants. L'Espagne et le Venezuela déclarent leur ferme volonté d'approfondir leur relation amicale et fructueuse, basée sur une ample coopération dans tous les domaines, y compris celui de la lutte antiterroriste."

Le gouvernement du président Hugo Chavez dément donc "une supposée collaboration" avec l'organisation séparatiste basque ETA, qu'il qualifie de "terroriste". Mais pas le moindre mot sur la guérilla marxiste des FARC (Forces armées révolutionnaires de Colombie). Ses liens avec l'ETA sont pourtant sous enquête à Madrid depuis 2008 et dans son acte d'accusation rendu public le 1er mars, le juge d'instruction espagnol Eloy Velasco indiquait que son enquête "met en évidence la coopération gouvernementale vénézuélienne à la collaboration illicite entre les FARC et l'ETA". Selon le magistrat, cette collaboration visait notamment à préparer des attentats en Espagne contre des personnalités venant de Colombie, y compris l'actuel président colombien, Alvaro Uribe.

Inculpant sept membres des FARC et six de l'ETA, le juge Velasco rappelait que ces deux mouvements sont catalogués comme terroristes par l'Union européenne (UE). Mais la plupart des pays latino-américains évitent de qualifier ainsi la guérilla marxiste colombienne, lui recommandant néanmoins d'abandonner les armes et de ne tenter de conquérir le pouvoir que par les urnes.

Hugo Chavez, lui, appelle depuis plusieurs années la communauté internationale à reconnaître tant les FARC que l'ELN (Armée de libération nationale) et à octroyer à ces deux guérillas colombiennes un statut de belligérant, auquel sont liés des droits politiques et diplomatiques et une liberté de mouvement à l'abri de mandats d'arrêts internationaux.

Aussi, dans le communiqué commun hispano-vénézuélien, la condamnation du "terrorisme sous toutes ses formes" n'est-elle qu'un exercice de style déconnecté de la réalité, puisque la narco-guérilla des FARC, officiellement terroriste aux yeux de l'UE et donc de l'Espagne [ndlr.: ainsi que des Etats-Unis, du Canada, du Pérou et de la Colombie], est en grâce et à ses entrées au palais présidentiel de Caracas.

Etapes de la polémique politico-judiciaire :

1. La justice espagnole accuse le gouvernement vénézuélien du président Hugo Chavez de complicité avec deux organisations terroristes (ETA et FARC) qui préparent, ensemble, des attentats contre des personnalités colombiennes "en Espagne ou dans un autre pays de l'Union européenne".

2. Le président du gouvernement espagnol, le socialiste José Luis Rodriguez Zapatero, exige en conférence de presse "des explications" du Venezuela.

3. Hugo Chavez réagit avec virulence contre un acte judiciaire qu'il attribue à la fois "aux résidus du colonialisme espagnol", à un "complot de l'empire yankee" et à une offensive de "l'extrême droite fasciste européenne". Le président Chavez avertit en outre M. Zapatero qu'il n'a "rien à lui expliquer" et exige qu'il "respecte le peuple et le gouvernement du Venezuela".

4. Le ministre espagnol des Affaires étrangères, Miguel Angel Moratinos, corrige le chef de son propre gouvernement, prétendant que ce ne sont pas des "explications", mais des "informations" que M. Zapatero demande à Caracas.

5. Hugo Chavez applaudit ce changement d'attitude, y voyant une preuve de "la maturité" de M. Zapatero, et les deux gouvernements mettent fin à la crise diplomatique naissante ou pour le moins l'apaisent en diffusant le communiqué commun du 6 mars.

Considéré par des analystes espagnols comme le faire-valoir en Europe des frères Castro et d'Hugo Chavez, le ministre Moratinos avait dit par téléphone à Chavez lui-même, qui l'a révélé, que le gouvernement de Madrid "n'avait rien à voir" avec l'accusation de la justice, autonome en Espagne.

Conclusion de l'analyste Arcadi Espada dans le quotidien madrilène de centre droit El Mundo : "Un acte judiciaire accuse le gouvernement vénézuélien de graves délits et la victime doit demander pardon au présumé coupable pour lui avoir demandé des explications".

Faut-il accuser l'Espagne socialiste, actuelle présidente de l'Union européenne, de faire allégeance, par complicité idéologique et par intérêt économique, à l'ancien lieutenant-colonel putschiste maintes fois plébiscité par les Vénézuéliens? Attendons tout de même les résultats de la prochaine visite à Caracas, annoncée par le ministre Moratinos, du directeur général de la police espagnole, Francisco Javier Velazquez.


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