II. PANORAMA ET PERSPECTIVES
LatinReporters.com, 4 avril 2011 – Haïti, Pérou,
Guatemala, Argentine et Nicaragua sont, dans l'ordre chronologique, les cinq
pays d'Amérique latine appelés à élire leur président
et leurs parlementaires en 2011. Divers autres scrutins sont programmés
en Equateur, au Mexique et en Colombie.
En 2010, la gauche avait perdu le Chili. Cette année, le Guatemala
pourrait lui tourner le dos. Sous réserve du résultat des élections
péruviennes, cela signifierait la poursuite d'un lent rééquilibrage
idéologique dans une région submergée au début
du siècle par un tsunami rose-rouge et où la droite et le centre
droit ne gouvernent actuellement que 38% des 570 millions de Latino-Américains,
au Mexique, au Chili, au Pérou, au Panama, au Costa Rica, au Honduras
et en Colombie.
A noter que les pays dominés par la gauche radicale (Venezuela, Cuba,
Nicaragua, Equateur et Bolivie) totalisent à peine 12% de la population
de l'Amérique latine. Ce pourcentage grimperait à 17% si le
nationaliste de gauche Ollanta Humala devenait président du Pérou
et s'il réactivait ses liens avec le président vénézuélien
Hugo Chavez. Aujourd'hui, il dit préférer le modèle brésilien.
L'Argentine, 40 millions d'habitants et 3e puissance latino-américaine,
ainsi que le Pérou, qui frôle les 30 millions d'habitants et
est devenu l'un des champions régionaux de la croissance économique
(8,8% en 2010), sont par leur importance relative les deux pays qui dominent
le calendrier électoral de 2011.
ARGENTINE. Quoique déjà tempérée, notamment par l'impact
de la criminalité, la vague de sympathie populaire que provoqua en
octobre 2010 la mort soudaine de son mari, l'ex-président Nestor Kirchner,
étaye encore la popularité de la présidente argentine
Cristina Fernandez de Kirchner. Elle apparaît dans les sondages comme
la favorite à sa propre succession aux élections du 23 octobre
2011. Péroniste de gauche, elle navigue, comme avant elle son défunt mari, entre
social-démocratie à la brésilienne et symptômes grandissants d'interventionnisme
public radical de type vénézuélien. La division des diverses oppositions et
l'apparente bonne santé économique de l'Argentine favorisent une nouvelle candidature
de la présidente.
Au
PÉROU, où la Constitution prohibe un nouveau mandat
d'Alan Garcia, président sortant, cinq des onze candidats à
la présidence conservent, selon les sondages, la possibilité
de survivre le 10 avril au premier tour de l'élection présidentielle.
Les tendances très mouvantes au sein de l'électorat compliquent
les pronostics.
Si au cours des trois premiers mois de 2011 semblait assuré
un come-back triomphal de "l'Indien qui croit au marché", l'ex-président
métis
Alejandro Toledo (2001-2006), les résultats de deux sondages
diffusés le 27 mars le reléguaient soudain à la 3e place, derrière
Ollanta Humala et
Keiko Fujimori, la fille de l'ancien président d'origine
japonaise Alberto Fujimori (1990-2000), condamné pour crimes contre l'humanité
et emprisonné à Lima. L'avantage d'Ollanta Humala s'est élargi dans des
sondages plus récents.
Surnommé à l'époque le "Chavez péruvien", mais se déclarant
aujourd'hui partisan du modèle brésilien, le lieutenant-colonel retraité Ollanta
Humala remporta le premier tour de la présidentielle de 2006, avant de s'incliner au second tour,
sur le score de 47,4%, devant le social-démocrate Alan Garcia (52,6%).
Au
NICARAGUA, le président sortant, le sandiniste
Daniel Ortega, allié
d'Hugo Chavez et des frères Castro, domine les sondages, quoiqu'avec
à peine plus de 30% des intentions de vote, grâce à la perpétuelle division
des libéraux. Mais sa nouvelle candidature présidentielle,
entérinée par une décision de justice très polémique,
viole la Constitution qui prohibe notamment, comme au Pérou, la réélection
immédiate.
Aussi le Nicaragua est-il agité par un conflit institutionnel
qui s'ajoute au souvenir des fraudes supposées perpétrées
par les sandinistes aux élections municipales de 2008. L'opposition,
l'Eglise nicaraguayenne, les Etats-Unis et l'Union européenne s'en
étaient alors émus. Dans ces circonstances, un regain de violence
risque de secouer le Nicaragua à l'approche des élections présidentielle
et législatives du 6 novembre.
Au
GUATEMALA, la Constitution prohibe toute réélection présidentielle,
consécutive ou non. Le président en exercice, le socialiste
modéré Alvaro Colom, ne sera donc pas candidat le 11 septembre.
Sa femme,
Sandra Torres de Colom, devrait également être écartée
par la Charte suprême pour son degré de parenté avec
le chef de l'Etat. Elle a néanmoins annoncé sa candidature
à la présidence.
Devant le tollé général,
le couple présidentiel, voulant manifestement conserver le pouvoir,
a entamé une procédure de divorce par consentement mutuel afin
de tenter de soustraire Sandra Torres à l'interdit constitutionnel.
Cette manoeuvre polémique pourrait être soumise à l'appréciation
de la justice. Actuellement, le favori des sondages est le
candidat de la droite, l'ancien général Otto Pérez Molina.
En 2007, il s'était incliné au second tour, avec 47,16% des
suffrages devant les 52,84% d'Alvaro Colom.
En
HAÏTI, le second tour de l'élection présidentielle
a opposé le 20 mars, dans un calme relatif, l'ancienne Première
dame
Mirlande Manigat au chanteur
Michel Martelly. La publication de sondages
à la sortie des urnes a été évitée. Le
victoire de Michel Martelly, avec 67,57% des suffrages, a été
annoncée le 4 avril. Le président élu n'a aucune expérience
politique. Divers observateurs le classent à droite.