XIe sommet ibéro-américain: S.O.S. économique et blablabla antiterroriste
Le sommet de Lima promet de combattre le terrorisme "sous toutes ses formes et manifestations, où qu'elles se produisent et quiconque les commette, de n'accorder ni aide ni refuge à leurs auteurs, promoteurs ou participants". Des chefs d'Etat offrirent leurs condoléances et leur appui à l'Espagne, représentée à Lima par le roi Juan Carlos et le président du gouvernement Jose Maria Aznar, après la mort, vendredi au Pays basque, de deux policiers abattus probablement par les séparatistes de l'ETA. Mais personne ne déplora ni ne mentionna le massacre, connu également pendant le sommet, de 18 villageois colombiens assassinés par la guérilla marxiste des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC). Les FARC sont l'un des trois mouvements armés colombiens considérés par les Etats-Unis à la fois comme terroristes et narcotrafiquants. Washington n'exclut pas de combattre ces mouvements après la défaite des talibans en Afghanistan. Néanmoins, jusqu'à présent, aucun chef d'Etat latino-américain, pas même le président Andres Pastrana de Colombie, n'a qualifié les FARC de terroristes, malgré leurs massacres répétés de civils, leurs enlèvements contre rançon d´hommes, de femmes et d'enfants, leurs extorsions sous la menace et leur narcotrafic devenu leur principale ressource financière, leur recrutement forcé d'enfants-soldats et leurs contacts avec divers mouvements terroristes d'autres pays. A propos des FARC, le président brésilien Fernando Henrique Cardoso et le vénézuélien Hugo Chavez invitent même les journalistes à ne pas confondre "insurgés" et "terroristes". Un discours en somme similaire à celui tenu dans certains pays musulmans à propos des talibans et d'Oussama ben Laden. La volonté proclamée de combattre le terrorisme "sous toutes ses formes" tout en tolérant l'une de ses expressions les plus sanglantes en Colombie renferme pour le moins une contradiction, qui confirme l'hypocrisie postérieure aux attentats du 11 septembre contre les Etats-Unis. La condamnation verbale de ces attentats dans les capitales latino-américaines ne s'était accompagnée d'aucun appui concret à la nation qui est le premier partenaire économique de l'Amérique latine et qui accueille par millions ses émigrés. En plaçant résolument, à Lima, la lutte antiterroriste mondiale sous l'égide des Nations Unies, l'Amérique latine a confirmé ses réticences à emboîter le pas à Washington. Paradoxalement, les Etats-Unis, principale puissance économique mondiale, sont, avec l'Union européenne, les destinataires du S.O.S. économique lancé par le sommet de Lima. Les dirigeants latino-américains demandent à Washington et à Bruxelles d'abaisser leurs barrières commerciales et de supprimer les subsides à leur agriculture. Les pays latino-américains plaident aussi en faveur de l'allégement de leur dette et de la réforme des aides au développement, qu'ils estiment trop orientées vers l'Afrique. Enfin, pour faire contrepoids à l'influence américaine, l'Amérique latine juge nécessaire une "alliance stratégique" avec l'Europe, que l'Espagne favorisera lors de sa prochaine présidence de l'Union européenne, au premier semestre 2002. Le sommet de Lima s'est toutefois gardé de remettre en question la Zone de libre-échange des Amériques (ZLEA), vivement souhaitée par Washington, qui devrait s'étendre de l'Alaska à la Terre de Feu à partir de 2005.
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