Chili - Deux femmes vers la présidence: Bachelet et Alvear ne sont plus ministres
Deux stars du gouvernement chilien, la socialiste Michelle Bachelet (Défense) et la démocrate-chrétienne Soledad Alvear (Relations extérieures) sont remplacées officiellement ce vendredi. Leur sortie de l'exécutif, dans le cadre du remaniement ministériel inattendu annoncé mercredi par le président socialiste Ricardo Lagos, permettra aux deux femmes de se lancer dans la précampagne de l'élection présidentielle de décembre 2005. Dans les sondages, Michelle Bachelet et Soledad Alvear sont en tête parmi les précandidats à la présidence issus de la coalition de centre gauche Concertacion de Partidos por la Democracia (Concertation de partis pour la démocratie). La Concertation, comme on l'appelle couramment, est au pouvoir depuis la restauration de la démocratie, en 1990, après les 17 années de dictature du général putschiste Augusto Pinochet. Fille d'un prisonnier politique torturé à mort sous la dictature de Pinochet, médecin à l'aise dans son personnage souriant de mère de famille courante (elle a trois enfants), Michelle Bachelet fut en janvier 2002 la première femme chilienne et d'Amérique latine à prendre en mains l'armée, passant alors du portefeuille de la Santé à celui de la Défense. L'image de Michelle Bachelet participant sur un char de combat à l'organisation des secours lors d'inondations en 2002 a frappé les mémoires. Si, comme le souhaitent les socialistes, des élections primaires étaient organisées pour désigner le candidat de la Concertation à la présidentielle, la socialiste Michelle Bachelet l'emporterait. Mais la démocratie chrétienne, dont relève Soledad Alvear, préfère une désignation par un consensus négocié qui tiendrait compte de l'argument d'une souhaitable alternance, la présidence de la République étant déjà actuellement aux mains d'un socialiste, Ricardo Lagos. En concurrence au sein de la démocratie chrétienne avec l'ex-président Eduardo Frei, qui voudrait à nouveau briguer la charge suprême, Soledad Alvear, ex-ministre de la Justice, conduisait la diplomatie chilienne depuis mars 2000. Conclus sous sa houlette, l'Accord d'association du Chili avec l'Union européenne et le Traité de libre commerce avec les Etats-Unis ont fait briller l'étoile politique de cette dame séductrice aux apparences raffinées. Gênée par la popularité de ces deux femmes qui menacent les aspirations présidentielles de Joaquin Lavin, l'opposition de droite concentrait sur elles ses attaques antigouvernementales. Cette guérilla fragilisait particulièrement la politique extérieure chilienne, au moment où le différend territorial séculaire avec la Bolivie, riche en gaz naturel, se complique à cause du déficit énergétique qui perturbe plusieurs pays d'Amérique du Sud, dont le Chili. Outre la perspective de la présidentielle de 2005, la proximité des élections municipales du 31 octobre prochain alimente la combativité de l'opposition chilienne. "Dans le climat électoral que vit le pays se sont produites des attaques injustifiées et des situations qui ne sont pas à la hauteur des nécessités du Chili et qui menacent le bon fonctionnement du gouvernement et de l'Etat" reconnaissait mercredi le président Ricardo Lagos en annonçant le remaniement de son gouvernement. "Les personnes qui vont abandonner leurs charges ministérielles, ajoutait-il, ont réalisé leur tâche avec excellence, éclat, loyauté et avec un immense amour pour le Chili. Elles auront maintenant l'opportunité de continuer à servir le pays dans d'autres tâches". Le président Lagos a voulu mettre à profit l'effet de surprise. Un remaniement de l'exécutif n'était attendu qu'après les municipales du 31 octobre. Les éditorialistes des médias chiliens interprètent la manoeuvre anticipée comme visant à désarmer momentanément l'opposition, pour le moins à la veille des municipales, et à lancer Michelle Bachelet et Soledad Alvear dans la précampagne de l'élection présidentielle. Les deux stars de la Concertation ont en outre maintenant les mains libres pour intervenir ouvertement en faveur des candidats pro-gouvernementaux dans la campagne du scrutin municipal. Leurs interventions dans ce cadre pourraient leur permettre de maintenir, voire de renforcer, leur impact médiatique. A la Défense, Michelle Bachelet est remplacée par le démocrate chrétien Jaime Ravinet, qui abandonne le portefeuille du Logement et Urbanisme. Aux Relations extérieures, l'ex-député Ignacio Walker, également démocrate-chrétien, succède à Soledad Alvear. Il venait à peine d'être désigné ambassadeur du Chili en Italie. Les équilibres politiques entre les différentes composantes de la Concertation sont conservés globalement dans cette valse des portefeuilles qui a touché, outre les ministères de la Défense et des Relations extérieures, ceux de la Planification et du Logement et Urbanisme, ainsi que la direction de diverses entités administratives. Vous pouvez réagir à cet article sur notre forum
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