L'OTAN se mondialise: elle interviendra "là où l'Alliance en aura décidé ainsi"En commençant par l'Afghanistan et l'Irak...
Réunis mardi et mercredi à Madrid, les ministres des Affaires étrangères des pays de l'Alliance atlantique se sont en effet déclarés "prêts à soutenir ou à diriger des opérations et à déployer des forces, là où l'Alliance en aura décidé ainsi, pour assurer notre sécurité commune". Ce saut historique au-delà des frontières de l'OTAN devrait surtout favoriser la lutte contre la prolifération des armes de destruction massive (ADM) et contre le terrorisme international, principal ennemi commun, selon les alliés, depuis l'extinction apparente du péril soviétique. Pour témoigner de cette évolution, qui concerne déjà l'Afghanistan, l'Irak (les diplomates préfèrent écrire "Iraq") et éventuellement bientôt le conflit israélo-palestinien, nous publions ci-dessous de larges extraits du communiqué officiel de la réunion de Madrid et des passages significatifs de la principale conférence de presse tenue dans la capitale espagnole par le secrétaire général de l'OTAN, Lord Robertson. Les phrases mises en gras et/ou soulignées par LatinReporters.com
dans le communiqué officiel et dans les déclarations de Lord
Robertson illustrent la vocation désormais mondialiste et antiterroriste
de l'Alliance Atlantique, vocation souhaitée par les Etats-Unis (et applaudie par l'Espagne), mais à
laquelle ne s'opposent ni la France ni l'Allemagne ni la Belgique. Ces pays s'étaient
pourtant heurtés à Washington en février et mars derniers, prétendant
éviter une implication de l'OTAN dans la guerre alors imminente contre l'Irak en freinant
une aide défensive des alliés à la Turquie.
Force de stabilisation
Extraits d'une conférence de presse donnée le 3 mai à Madrid par le
secrétaire général de l'OTAN, Lord Robertson.
"...D'où que vienne le défi, l'OTAN est prête
à défendre les intérêts de ses Etats membres
et c'est pourquoi nous prenons le relais en Afghanistan, car une menace
contre les nations de l'OTAN vient directement de cette région.
Il y aura des régions où, je n'en ai aucun doute, nous
pendrons l'initiative dans le futur, nous impliquant par une décision
de nos pays membres. Aujourd'hui en effet, durant nos discussions relatives
au Moyen-Orient, des ministres ont indiqué que si les conversations
de Charm-el-Cheikh et d'Akaba étaient couronnées de succès
et si une force de stabilisation était nécessaire dans la
région, l'OTAN ne devrait alors pas s'exclure de cette équation...
...Les limites à ce que l'OTAN fait et à ce dont l'OTAN
a besoin seront déterminées par les 19 nations de l'OTAN,
ou les 26 l'an prochain, de manière unanime. C'est le critère
qui sera utilisé. Et elles mesureront s'il est de l'intérêt
de la région euro-atlantique et des pays de l'Alliance d'être
impliqués au-delà de ce qui est connu habituellement comme
les régions traditionnelles...
Nous n'allons pas être des policiers globaux, mais nous ne
serons pas non plus des policiers de quartier européens. Nous devons
être prêts à aller, si nécessaire, là
où sont les menaces et si le centre de New York est attaqué
à partir du centre de l'Afghanistan, alors c'est là que les
intérêts de l'Alliance peuvent devoir être protégés.
Nous n'établissons donc pas de limites pour le moment, mais
nous créons des structures de sécurité qui, nous l'espérons,
empêcheront certains de prendre le risque d'attaquer des nations
alliées, rompant la paix et la sécurité, et nous aurons
les moyens de nous assurer qu'ils ne le feront pas..."
1. Nous nous rapprochons aujourd'hui de la concrétisation de
la vision que nous avions définie lors du Sommet de Prague, celle
d'une Alliance transformée, mieux à même de faire face
aux menaces et aux défis du XXIe siècle pour la sécurité
des populations, du territoire et des forces de nos pays, d'où qu'ils
viennent. A Prague, les chefs d'Etat et de gouvernement se sont engagés
à transformer l'OTAN en admettant de nouveaux membres, en la dotant
de nouvelles capacités et en nouant de nouvelles relations avec
nos partenaires. Le processus de transformation est maintenant bien entamé.
L'Alliance de l'Atlantique Nord, fondée sur les principes de la
démocratie, les libertés individuelles et le règne
du droit, demeure la base de notre défense collective et le forum
transatlantique essentiel pour la sécurité.
2. L'adhésion à l'Alliance de la Bulgarie, de l'Estonie,
de la Lettonie, de la Lituanie, de la Roumanie, de la Slovaquie et de la
Slovénie renforcera la sécurité pour tous dans la
région euro-atlantique et consolidera notre communauté de
valeurs partagées. Nous nous réjouissons de ce que nos homologues
de ces pays se joignent à nous aujourd'hui à Madrid.
3. L'OTAN entreprend de nouvelles opérations répondant
aux intérêts de sécurité communs de tous les
Alliés. Nous saluons la participation d'Alliés à
la Force internationale d'assistance à la sécurité
(ISAF) à Kaboul, en Afghanistan, et le rôle que l'Allemagne
et les Pays-Bas jouent actuellement dans la mission en tant que pays chefs
de file. A compter du mois d'août, l'OTAN prendra le rôle principal
en assumant la coordination, le commandement et le contrôle stratégiques
de l'ISAF. La Force continuera d'opérer sous mandat des Nations
Unies. Le rôle accru de l'OTAN renforcera l'efficacité et
la soutenabilité de l'ISAF, et, avec les équipes de reconstruction
régionale que déploient plusieurs Alliés et Partenaires,
consolidera l'engagement de la communauté internationale à
œuvrer pour un Afghanistan pacifique et démocratique. La décision
d'utiliser les moyens et capacités de l'OTAN pour garantir la continuité
de l'ISAF démontre aussi que nous sommes prêts à
soutenir ou à diriger des opérations et à déployer
des forces, là où l'Alliance en aura décidé
ainsi, pour assurer notre sécurité commune.
4. L'Alliance vient de mettre fin au déploiement d'aéronefs
de surveillance, de systèmes de défense antimissile et de
protection nucléaire, biologique et chimique, dont l'objet était
de défendre la Turquie contre une éventuelle attaque de l'Iraq.
L'OTAN a également aidé la Turquie à se préparer
à de possibles situations d'urgence humanitaire. Nous nous sommes
régulièrement consultés au cours de la crise iraquienne,
notamment en vertu des dispositions de l'article 4 du Traité de
Washington.
5. L'OTAN a accédé à la requête de
la Pologne, qui a sollicité un soutien en prévision du rôle
qu'elle jouera cet été dans la stabilisation de l'Iraq.
Les autorités militaires de l'OTAN travaillent avec des responsables
polonais afin que l'Alliance puisse contribuer à satisfaire leurs
besoins. Le Conseil de l'Atlantique Nord procédera régulièrement
à un réexamen de la contribution de l'OTAN aux efforts de
stabilisation.
Nous nous félicitons de l’adoption de la résolution 1483
du Conseil de sécurité des Nations Unies. Les Alliés
se tiennent prêts et examinent comment contribuer à sa mise
en œuvre.
6. Depuis Prague, une étape importante a été franchie
vers la mise en place d'un authentique partenariat stratégique entre
l'OTAN et l'UE comme convenu entre nos deux organisations. Les décisions
prises en mars, qui ont mis la touche finale aux arrangements Berlin Plus,
représentaient le point culminant de travaux intensifs menés
depuis les propositions formulées par l'OTAN au Sommet de Washington.
Nous soulignons notre détermination à faire de notre partenariat
stratégique avec l'UE une réalité, en commençant
par notre coopération dans l'ex Yougoslavie, où les efforts
concertés de l'Alliance et de l'Union ont transformé les
perspectives pour la région. Nous notons avec satisfaction la mise
en place d'une opération de l'UE dans l'ex République yougoslave
de Macédoine, faisant appel aux moyens et aux capacités
de l'OTAN sous le commandement du DSACEUR. Nous soulignons notre engagement
à poursuivre la coopération dans les Balkans dans un esprit
de transparence pour la réalisation de nos objectifs communs.
7. L'OTAN et l'UE ont un intérêt commun, qui est d'assister
les pays des Balkans sur la voie d'une intégration plus poussée
dans les structures euro atlantiques. Nous prévoyons que le sommet
UE Balkans qui se tiendra le 21 juin à Thessalonique contribuera
de manière significative à nos efforts communs en ce sens.
L'OTAN continuera à jouer un rôle essentiel dans la sécurité
régionale en poursuivant ses opérations et les programmes
du PPP, et en travaillant avec l'UE. L'OTAN et l'UE élaborent le
cadre d'un dialogue renforcé et une approche concertée de
la sécurité et de la stabilité dans les Balkans occidentaux.
Le développement du partenariat entre l'OTAN et l'UE dans les Balkans
est de plus en plus important pour la poursuite de la stabilisation de
cette région, et la planification future devrait en tenir compte.
10. Nous réaffirmons notre soutien à l'intégrité
territoriale et à la souveraineté de tous les pays des Balkans.
Ceux-ci doivent continuer de construire des démocraties multiethniques
durables, d'éradiquer la criminalité organisée et
la corruption et d'asseoir l'état de droit. Ils doivent coopérer
au niveau régional, y compris en mettant en œuvre la Plate forme
commune adoptée à la conférence régionale d'Ohrid
sur la sécurité et la gestion des frontières, tenue
les 22 et 23 mai. Ils doivent aussi remplir pleinement leurs obligations
internationales, y compris en traduisant en justice à La Haye toutes
les personnes mises en accusation par le Tribunal pénal international
pour l'ex-Yougoslavie (TPIY). Nous restons déterminés à
aider à construire, en étroite coopération avec l'ONU,
l'UE, l'OSCE et d'autres organisations internationales, une Europe du Sud-Est
pacifique, stable et démocratique, où tous les pays de la
région prendraient eux-mêmes en charge le processus de réforme
et seraient intégrés dans les structures euro-atlantiques.
11. Le terrorisme continue de représenter une grave
menace pour les populations, les forces et le territoire des pays de l'Alliance,
ainsi que pour la paix et la sécurité internationales. Il
représente aussi une menace pour le développement et le fonctionnement
des institutions démocratiques, pour l'intégrité territoriale
des Etats et pour les relations pacifiques entre ceux ci. Nous exprimons
notre sympathie aux victimes du terrorisme. Nous rejetons catégoriquement
le terrorisme et le condamnons sous toutes ses formes et dans toutes ses
manifestations, et nous réitérons notre détermination
à combattre ce fléau aussi longtemps qu'il le faudra. Nous
mettons en œuvre un concept militaire de défense contre le terrorisme,
nous améliorons l'état de préparation du secteur civil
et nous travaillons en étroite liaison avec nos Partenaires dans
ce domaine. Des forces navales de l'Alliance continuent à patrouiller
en Méditerranée, notamment pour aider à exercer une
dissuasion à l'égard d'attaques terroristes contre la navigation
commerciale dans le détroit de Gibraltar. Pour lutter efficacement
contre le terrorisme, notre réponse doit être multiforme et
globale. Cela exigera une mise en œuvre complète de l'agenda
de Prague pour la transformation de l'OTAN, et la poursuite d'une étroite
coopération avec d'autres organisations internationales et avec
nos Partenaires.
12. Nous restons résolus à décourager et à
déjouer toute attaque armée, y compris toute attaque terroriste
dirigée de l'étranger, dont nous serions l'objet ainsi
qu'à nous défendre et à nous protéger contre
elle, conformément au Traité de Washington et à la
Charte des Nations Unies. Des capacités militaires modernes
et efficaces, mises à disposition par l'ensemble des pays de l'OTAN,
sont essentielles pour permettre à l'Alliance de mieux mener à
bien la gamme complète de ses missions. Les récentes opérations
ont clairement montré l'importance des améliorations définies
comme prioritaires dans l'Engagement capacitaire de Prague (PCC). La concrétisation
d'une autre initiative lancée à Prague, celle qui concerne
la Force de réaction de l'OTAN (NRF), est en bonne voie. A la réunion
qu'ils tiendront prochainement, les Ministres de la défense de nos
pays feront le point sur la mise en œuvre du PCC et de la NRF. Nous prévoyons
également qu'ils approuveront de nouvelles dispositions de commandement,
rationalisées, qui satisferont aux exigences opérationnelles
pour toute la gamme des missions de l'Alliance.
13. Nous trouvons encourageantes les améliorations apportées
dans d'autres secteurs importants, notamment l'amélioration de la
préparation du secteur civil face au risque d'attaques contre des
populations civiles au moyen d'armes de destruction massive (ADM), une
meilleure défense contre les cyberattaques et les progrès
accomplis dans l'examen des options pour une protection efficace du territoire,
des forces et des centres de population de l'Alliance contre l'éventail
complet des menaces liées à l'utilisation de missiles, en
recourant à une combinaison appropriée d'efforts politiques
et de défense, en même temps qu'à la dissuasion. Nos
efforts dans ce sens seront compatibles avec l'indivisibilité de
la sécurité des Alliés.
14. La politique de soutien de l'Alliance à la maîtrise
des armements, au désarmement et à la non-prolifération
continuera de jouer un rôle majeur dans la réalisation de
ses objectifs de sécurité, y compris celui qui consiste à
prévenir la dissémination et l'emploi des ADM et de leurs
vecteurs. L'Alliance souligne qu'il est important de respecter et de renforcer
les accords internationaux de maîtrise des armements et de désarmement
et les régimes multilatéraux de non prolifération
et de contrôle des exportations. En particulier, nous soulignons
notre engagement en faveur d'un renforcement du Traité de non prolifération,
mécanisme primordial de non prolifération et de désarmement,
et du respect intégral de ce Traité par tous les Etats qui
y sont parties. Nous accroîtrons également les efforts que
nous menons en commun pour garantir la sécurité des substances
nucléaires et radiologiques. Le rôle du Centre
ADM, au sein du Secrétariat international de l'OTAN, est actuellement renforcé
afin d'aider l'Alliance à faire face aux menaces que constituent
les armes de destruction massive et leurs vecteurs.
15. Les sept démocraties qui ont été invitées
à Prague à entreprendre des pourparlers d'adhésion
ont bien progressé sur la voie qui doit mener à leur admission
dans l'Alliance. Nous sommes heureux de la signature, en mars 2003, des
protocoles d'accession, ainsi que des progrès enregistrés
dans le processus de ratification. Nous félicitons les pays invités
pour leurs contributions à la sécurité internationale,
en solidarité avec l'Alliance. Nous accueillons avec satisfaction
les réformes accomplies par les sept pays et les calendriers d'achèvement
des réformes qu'ils ont soumis, et nous les encourageons à
poursuivre leurs efforts de réforme jusqu'à l'adhésion
et au delà afin de renforcer leur contribution à l'Alliance.
Nous nous réjouissons à la perspective de les accueillir tous
au sein de l'Alliance à notre Sommet de mai 2004.
16. Cette vague d'élargissement ne sera pas la dernière.
La porte de l’OTAN reste ouverte. Nous félicitons l'Albanie, l'ex-République
yougoslave de Macédoine et la Croatie pour les efforts de réforme
qu'elles continuent de mener et leur attachement à la coopération
régionale. Ces pays devront poursuivre la mise en œuvre des vastes
réformes dans les domaines politique, économique, de défense
et autres identifiés dans le cadre du processus du MAP, pour faire
progresser leur dossier de candidature. Nous voulons qu'ils réussissent,
et nous continuerons de les soutenir et de les aider dans leurs efforts
de réforme. Le Plan d'action pour l'adhésion restera le moyen
de suivre les progrès accomplis par les pays candidats, et nous
encourageons chacun d'eux à assumer la responsabilité du
processus de réforme et à poursuivre énergiquement
ses objectifs clés en matière de réforme.
17. Le Partenariat de l'OTAN avec des pays des diverses régions
de l'Europe et des régions stratégiquement importantes
du Caucase et de l'Asie centrale a grandement contribué à
la sécurité et à la stabilité dans l'ensemble
de la zone euro atlantique. Les contributions apportées par les
Partenaires dans les Balkans et en Afghanistan en sont une preuve éclatante,
et resteront importantes, surtout à mesure que l'OTAN assumera un
rôle plus grand dans le cadre de la mission de l'ISAF. Compte tenu
des nouvelles opérations dans lesquelles l'OTAN s'engage, une interopérabilité
renforcée avec les Partenaires prendra une importance accrue. Nous
engageons les Partenaires à coopérer étroitement avec
l'Alliance à la mise en œuvre du Plan d'action du Partenariat contre
le terrorisme.
20. Le Conseil OTAN Russie (COR), au sein duquel les Etats membres
de l'OTAN et la Russie travaillent ensemble en tant que partenaires égaux
dans des domaines d'intérêt commun, continue de réaliser
des progrès substantiels, comme ce fut notamment le cas lors de
la première réunion tenue à Moscou, le mois dernier.
Nous avons, entre autres, élaboré des évaluations
détaillées de la menace terroriste dans la région
euro atlantique et avancé dans l'analyse des dangers que présente
la prolifération. Nous étudions les possibilités de
coopération dans le domaine de la défense contre les missiles
de théâtre, et nous jetons les bases d'une coopération
future en matière de maintien de la paix... Nous espérons
aussi réaliser des progrès à propos des mesures de
confiance dans le domaine nucléaire et de la sûreté
de la gestion des substances nucléaires et radiologiques.
26. Face aux menaces et aux défis du XXIe siècle, une
coopération transatlantique effective en matière de sécurité
demeure essentielle. Avec ses nouvelles opérations, ses nouvelles
capacités, ses nouveaux membres et l'évolution de ses relations
politiques, l'Alliance transformée d'aujourd'hui démontre
que l'Europe et l'Amérique du Nord restent associées dans
un partenariat solide et durable pour le maintien de leurs valeurs partagées,
leur sécurité commune et leur défense collective.
27. Nous sommes profondément reconnaissants au gouvernement espagnol
d'avoir accueilli cette réunion. Les phrases mises en gras et/ou soulignées l'ont été par LatinReporters.com pour mettre en relief des passages illustrant la nouvelle vocation mondialiste et antiterroriste de l'OTAN. Vous pouvez réagir à cet article sur notre forum
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