MADRID, samedi 16 avril 2011 (LatinReporters.com) - Que
Kadhafi coule le porte-avions espagnol Principe de Asturias, que Zapatero pose nu
en Semaine sainte à la une d'El Pais ou que le FMI déclare l'Espagne
en faillite... Bof, on s'en occuperait après 18 jours extraordinaires présidés
par le Dieu Football. Du 16 avril au 3 mai, quatre chocs Real Madrid - F.C. Barcelona (Barça)
mettront moralement en jeu les titres de meilleur club et de meilleur footballeur
de la planète.
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Cristiano Ronaldo (à gauche) et Lionel Messi lors d'un match amical Portugal-Argentine,
le 9 février 2011 à Genève. (Photo Fanny Schertzer) |
Comme les Ibères, des centaines de millions de sportifs globalisés
en pantoufles, dans 140 pays des cinq continents, seront cloués devant
leur téléviseur par l'intensité prévisible des
quatre "clásicos".
Le Real Madrid, club le plus titré de l'univers,
et son bourreau qui le repousse dans l'ombre depuis plusieurs années,
le Barça, charpente de La Roja championne d'Europe et du monde, s'affronteront
ce 16 avril en Liga nationale, le 20 avril en finale de la Coupe du Roi,
puis, au niveau européen, le 27 avril en match aller de demi-finale
de la Ligue des champions et, le 3 mai, en match retour de cette même
demi-finale.
Dans son Camp Nou de Barcelone, capitale de la Catalogne, le Barça
avait infligé au Real Madrid un cuisant 5-0 lors de leur dernier
duel en Liga, le 29 novembre 2010. Ambiance donc de revanche ce soir au
stade Santiago Bernabéu du Real. Si ce choc et les trois suivants s'inscrivent
éventuellement dans un douteux symbolisme politique, selon lequel le
Real représenterait l'Espagne centralisatrice et le Barça la
Catalogne indépendantiste, le bilan final de ce marathon inédit
de "clásicos" n'en sera pas moins surtout sportif.
Facile d'admettre en effet qu'aux yeux des fans du foot, en Espagne et
ailleurs, le club le plus brillant ces 18 prochains jours deviendra de facto,
au-delà des classements officiels, le Saint-Siège du ballon
rond. Sous réserve, bien entendu, de confirmation en finale de la
Ligue des Champions, le 28 mai à Londres, face au Manchester United
ou au Schalke 04.
Supergalactique du Real contre extraterrestre du Barça
Les quatre empoignades Real Madrid - F.C. Barcelona seront aussi quatre
duels au sommet Ronaldo - Messi. Le Portugais Cristiano Ronaldo est le supergalactique
du Real et l'Argentin Lionel Messi l'extraterrestre du Barça avec,
cette saison, 48 buts en 45 matchs.
Et autant prendre explicitement parti pour n'abuser
personne. Ronaldo est l'image d'une vanité qui n'a d'égale
que celle de son compatriote José Mourinho,
entraîneur du Real. Messi, lui, est d'une modestie si naturelle qu'elle
ne peut engendrer que sympathie, d'autant que la prudence oratoire de l'entraîneur
du Barça, Josep Guardiola, ne blesse personne.
Surnommé La Puce pour son taille (1,69 m) ou Le Messie pour ses miracles
sur la pelouse, Leo Messi a déjà remporté avec le Barça,
à seulement 23 ans, douze titres majeurs, notamment en 2009, année d'un
sextuplé historique qui vit le club catalan conquérir tous
les titres espagnols et internationaux possibles.
Ballon d'or 2009 et 2010, donc officiellement meilleur footballeur mondial,
Messi affiche le bonheur d'un gosse lorsqu'il joue. Ses
buts, il semble les dédier au ciel, comme si, modestement, son propre
talent n'était pas décisif.
Ronaldo, lui, bombe le torse lorsqu'il marque et agite un visage martial
en direction des gradins, réclamant visiblement la reconnaissance
et les applaudissements qui lui seraient dus. On l'a vu, lors de frictions
avec un footballeur de l'équipe adverse, palper du pouce et de l'index une liasse de
billets imaginaires, comme pour dire à son adversaire "Et toi, combien vaux-tu?",
chacun sachant que le Real Madrid déboursa la somme record de 94 millions d'euros
en 2009 pour acquérir Ronaldo.
Conception plus séduisante du sport
Dans la même veine, l'entraîneur du Real, Mourinho, méprisait
publiquement en mars dernier son prédécesseur, le Chilien
Pellegrini, et la ville de Malaga en affirmant que "la différence
entre moi et Pellegrini est que si le Real Madrid me congédiait,
je n'irais pas entraîner le Malaga, mais un grand club".
Selon le quotidien madrilène El Pais, informé par de malicieux
footballeurs du Real, Ronaldo est soucieux de ses abdominaux, de sa coiffure,
de ses goals et surtout de ses titres. Il ne pourrait dissimuler son
"impatience spirituelle" à reconquérir le Ballon d'or que
lui a arraché Messi, qu'il surnommerait "le nain", sans jamais citer
son nom.
Aussi l'astre portugais devrait-il tenter de récupérer, au moins
moralement, son ancienne auréole de numéro un mondial lors du marathon des quatre
"clásicos". Mais puisse Messi le surpasser à nouveau. Il y
va moins de la gloire du Barça que d'une conception plus séduisante
du sport.