Porto Rico : recul militaire tactique de George Bush à Vieques
Au Pentagone, on cite mai 2003 comme date limite de ce recul militaire tactique destiné à séduire l’électorat hispanique et à favoriser l’éventualité que Porto Rico devienne le 51e des Etats-Unis d’Amérique. La ville de New York élira dans quelques mois son maire et ses conseillers municipaux. Un million de Portoricains y vivent et y représentent 70% de l’électorat hispanique. Dans la 5e Avenue, le 10 juin dernier, les candidats démocrates et républicains à la mairie marchaient en tête des centaines de milliers de participants au traditionnel Défilé national portoricain. Partout, des pancartes clamaient " Paix à Vieques ". On y distinguait aussi la sénatrice démocrate Hilary Clinton et le gouverneur républicain de l’Etat de New York, George Pataki, qui briguera sa réélection en 2002. Quant au futur politique de Porto Rico, des sources républicaines prêtent au président Bush l’intention de lancer cette année encore un processus qui permettrait à cette île des Antilles de choisir soit sa pleine intégration aux Etats-Unis, soit la séparation. Territoire des Etats-Unis dès 1898, Porto Rico élit son propre gouvernement depuis 1948. En 1952, l’île est devenue " Etat libre associé " des Etats-Unis, jouissant d’une certaine autonomie. Le gouvernement fédéral américain y contrôle, notamment, la défense, les relations extérieures, le commerce et la monnaie. Les Portoricains jouissent de la nationalité américaine depuis 1917. La fin prochaine des exercices de bombardement de l’US Navy à Vieques est une décision qui pourrait grossir les rangs des partisans de l’intégration de Porto Rico aux Etats-Unis. Petite île peuplée de 9.400 des 3.500.000 Portoricains, située à 10 km à l’est de l’île principale, Vieques abrite depuis 1940 un polygone de tir de l’US Navy couvrant 3% de sa superficie. Le site permettant des manœuvres combinées par terre, mer et air, le Pentagone considère Vieques comme centre d’entraînement vital. Les forces américaines du Golfe persique y sont aguerries. Mais les autorités portoricaines affirment que les résidus des munitions tirées pendant plusieurs dizaines d’années provoquent à Vieques une mortalité supérieure à la moyenne de Porto Rico. Affections cardiaques, cancers et diabètes y seraient anormalement nombreux. Lors des manoeuvres d’avril dernier, des milliers de Portoricains avaient manifesté à Vieques et à San Juan, capitale de Porto Rico, contre les exercices de bombardement. Des congressistes et des sénateurs, dont Hilary Clinton, avaient relayé la protestation jusqu’à Washington. Plus de cent quatre-vingts manifestants qui avaient envahi le polygone de tir furent arrêtés et déférés devant les tribunaux. Certains sont encore emprisonnés. Le Parlement de Porto Rico décidait mardi dernier d’organiser un référendum qui permettra aux 9.400 habitants de Vieques de se prononcer le 29 juillet soit pour la fin immédiate des exercices de l’US Navy, soit pour l’arrêt définitif des manoeuvres en mai 2003, soit pour leur prolongation indéfinie. Ce référendum en court-circuitera un autre, négocié sous la présidence de Bill Clinton et prévu pour novembre prochain, mais qui ne considère que les deux dernières des trois alternatives du référendum décidé par le parlement portoricain. La décision du président Bush d'abandonner le polygone de tir de Vieques dans un délai " raisonnable " rendra peut-être inutiles ces référendums, dont les résultats constitueraient à coup sûr un affront pour Washington. En outre, soumettre à référendum une question de sécurité nationale, comme l’avait accepté Bill Clinton, n’est pas du goût de l’administration Bush. Les observateurs croient néanmoins que les Portoricains maintiendront leur référendum du 29 juillet. Même si sa valeur n'est que consultative, il exercera une pression morale sur Washington pour hâter l'arrêt définitif des exercices de bombardement.
© LatinReporters.com - Amérique latine - Espagne Le texte de cet article peut être reproduit s'il est clairement attribué à LatinReporters.com avec lien actif vers notre site (ou mention de notre adresse http://www.latinreporters.com si reproduction sur support autre qu'Internet). |