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Pour enrayer la fuite des capitaux

Argentine: gel partiel et dollarisation accrue des dépôts bancaires

Domingo Cavallo
© Accion por
la Republica
BUENOS AIRES, 3 décembre 2001 (latinreporters.com) - Depuis ce lundi, les Argentins ne peuvent plus retirer de leur banque ou caisse d'épargne plus de 250 pesos ou dollars en liquide par semaine (les deux monnaies cohabitent au pair en Argentine depuis 1991). Les transferts financiers vers l'étranger sont aussi limités et la dollarisation des dépôts bancaires encouragée.

Annoncées le week-end par Domingo Cavallo, ministre de l'Economie, ces mesures visent à enrayer une fuite galopante des capitaux alors que l'Argentine, menacée de banqueroute, a entamé la délicate reconversion de sa dette publique de 132 milliards de dollars.

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Le gel partiel des comptes bancaires n'est pas aussi drastique que l'échange obligatoire de dépôts contre des titres publics décidé en 1989 par le président péroniste Carlos Menem. Aujourd'hui, à condition de payer par chèque ou d'utiliser des cartes de crédit ou de débit, les Argentins continuent à disposer de la totalité de leurs avoirs. Seuls les retraits en liquide sont limités.

L'intention gouvernementale est de conserver les liquidités dans le système bancaire pour éviter son effondrement. La presse argentine parle de "banquérisation" forcée de l'économie.

Inquiétant depuis février dernier, le retrait de fonds bancaires s'est accéléré en juin. Plus de 13 milliards de dollars sont sortis du système financier au cours des six derniers mois. Vendredi dernier, alors que la presse évoquait déjà un probable gel partiel des retraits en liquide, les Argentins faisaient la queue devant les banques et les caisses d'épargne, retirant 700 millions de dollars en une seule journée. Les banques appelaient alors le gouvernement à la rescousse et le président Fernando de la Rua signait samedi le décret instaurant les mesures restrictives.

La méfiance des Argentins et des détenteurs étrangers de capitaux résulte de plus de trois années de récession économique et du poids de la gigantesque dette publique. Vendredi, le risque pays argentin, qui mesure la méfiance des investisseurs, atteignait 3.340 points, soit le double du risque pays nigérian et le triple du risque pays turc.

Au début du mois de novembre, plusieurs agences internationales de notation financière classaient l'Argentine dans la catégorie des pays en défaut de paiement pour modification unilatérale des conditions octroyées à ses créanciers. Dans le cadre de la restructuration de sa dette publique, l'Argentine oblige en effet pratiquement ses créanciers à accepter de nouveaux titres du Trésor argentin portant un intérêt maximum de 7% en échange de titres servant en moyenne 11%, certains atteignant même 23%. Buenos Aires évalue que les intérêts de la dette pourraient ainsi être réduits de 4 milliards de dollars par an.

Selon le ministre Domingo Cavallo, le gel partiel des retraits bancaires en liquide est "temporaire". Il s'étendra sur une période de 90 jours, au terme de laquelle l'Argentine espère avoir restructuré sa dette dans des conditions satisfaisantes. Même les salaires sont frappés par la "banquérisation" forcée. Depuis plusieurs mois, le gouvernement multiplie les pressions sur les employeurs pour qu'ils versent les salaires via des comptes bancaires au lieu de les payer en liquide. La "banquérisation" vise également à accroître les recettes fiscales, l'Etat prélevant 0,6% sur chaque mouvement de capital.

Les nouvelles restrictions portent aussi sur les transferts financiers vers l'étranger, interdits de manière permanente, sauf ceux relatifs au commerce extérieur. Les Argentins sortant du pays ne pourront pas emporter plus de 1.000 dollars en liquide, mais l'usage de leur carte de crédit à l'étranger n'est pas restreint.

Afin de décourager la spéculation sur une éventuelle dévaluation du peso (depuis 1991, un peso = un dollar), le décret présidentiel dollarise davantage l'économie. Les titulaires de comptes en pesos pourront les convertir en dollars sans payer de commission. Les dépôts restés en pesos ne pourront pas être rémunérés davantage, malgré le risque supérieur lié à cette monnaie, que ceux libellés en dollars. Banques et caisses d'épargne ne sont même plus autorisées à accepter de nouveaux dépôts en pesos ni à octroyer des prêts dans cette monnaie. Désormais, les Argentins devront donc économiser et emprunter en dollars.

Arrêtés à la date du 28 novembre dernier, les dépôts en pesos dans les établissements financiers argentins s'élevaient à 23,1 milliards et ceux libellés en dollars à  49,2 milliards.

Plusieurs analystes estiment que les nouvelles mesures réduiront davantage les dépenses des Argentins, risquant de provoquer "l'implosion" de l'économie nationale, déjà durement frappée par une longue récession.

Rodolfo Daer, dirigeant de la Confédération générale du travail (CGT), la plus importante centrale syndicale d'Argentine, critique "l'acte autoritaire" du ministre Domingo Cavallo et accuse l'administration du président Fernando de la Rua "d'improvisation permanente" dans le domaine économique.


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