Bolivie: l'ambassadeur des Etats-Unis ne veut pas un président "cocalero"Les candidats critiquent vivement cette "pression intolérable"
"Je veux rappeler à l'électeur bolivien que s'il élit ceux qui veulent que la Bolivie redevienne exportatrice de cocaïne, il mettra en péril le futur de l'aide des Etats-Unis" déclarait mercredi le diplomate américain lors de l'inauguration d'un aéroport dans le Chapare. Cette région productrice de coca est le fief d'Evo Morales, défenseur actif de la libre culture de cette plante. Aux côtés du président sortant, Jorge Quiroga, l'ambassadeur
Manuel Rocha signa à cette occasion un accord additionnel d'assistance
de 48 millions de dollars des Etats-Unis à la Bolivie pour soutenir
le Programme de développement alternatif destiné à
encourager l'éradication de la coca. "Une Bolivie dirigée par des gens qui ont bénéficié du narcotrafic ne pourrait espérer que les marchés des Etats-Unis restent ouverts à ses exportations de textiles et de gaz naturel" ajouta l'ambassadeur Manuel Rocha. Depuis 1997, le gouvernement colombien, avec l'aide de l'armée, a éliminé 40.000 hectares de coca dans le Chapare. L'ambition est que " la feuille sacrée des Incas ", comme on l’appelle dans les Andes, ne couvre plus en Bolivie que les hectares assurant une consommation traditionnelle ou médicale étrangère au trafic de cocaïne. Conduits par Evo Morales, qui brigue la présidence pour le Mouvement vers le socialisme (Movimiento al Socialismo, MAS), les producteurs de coca réclament l’abandon de cette politique de "coca zéro". Les programmes de culture de substitution ne sont à leurs yeux que de vagues promesses et ils doutent de leur rentabilité s’ils venaient à se concrétiser. Le président Jorge Quiroga a évité de commenter les déclarations de l'ambassadeur des Etats-Unis, mais a tout de même noté que les Boliviens sont libres d'élire qui ils veulent. Les candidats à la présidence, eux, ont réagi vivement. Estimant que lui-même et les candidats du MAS aux législatives, convoquées aussi pour le 30 juin, ont été menacés par le diplomate américain, Evo Morales a annoncé qu'il se plaindra auprès de la mission de l'OEA (Organisation des Etats américains) dépêchée pour veiller à la régularité des élections. Avec humour, Evo Morales a néanmoins remercié l'ambassadeur Manuel Rocha de son "aide" et a proposé de le nommer chef de sa campagne électorale, convaincu que les critiques du diplomate lui apporteront de nombreux votes supplémentaires. Le défenseur des "cocaleros" occupe la quatrième place dans le dernier sondage, avec 11% des intentions de vote. Pour sa part, le favori du scrutin présidentiel, Manfred Reyes Villa, a averti qu'aucun pays étranger ne peut "envahir la souveraineté d'un peuple". "Personne ne peut dire pour qui nous devons voter et toute pression ou menace pour influencer le vote est intolérable" s'est exclamé l'ex-président Gonzalo Sanchez de Losada, à nouveau candidat à la magistrature suprême. Un autre ex-président et candidat, Jaime Paz Zamora, a fait dire par son porte-parole que "les Boliviens doivent définir leurs préférences électorales sans pressions et dans le cadre de notre démocratie". Peu avant les déclarations polémiques de l'ambassadeur des Etats-Unis, le président de la Chambre américaine de commerce de Bolivie, Carlos Alberto Lopez, avait souligné "l'alarme et l'incertitude" que suscite, selon lui, l'accroissement du rôle de l'Etat proposé par les candidats à la présidence. Carlos Alberto Lopez estime que si la Bolivie souhaite attirer les investisseurs étrangers, elle doit maintenir les règles du jeu et la sécurité juridique. Au cours des cinq dernières années, près de la moitié (48%) du total des investissements étrangers en Bolivie est venue des Etats-Unis. Vous pouvez réagir à cet article sur notre forum
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