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Guerre internationale antiterroriste

Après l'Afghanistan, la Colombie dans le collimateur

Analyse, par Christian Galloy

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BOGOTA / QUITO, 17 septembre 2001 (latinreporters.com) - Comme les montagnes d'Afghanistan, refuge du terroriste saoudien Oussama ben Laden, la forêt colombienne devrait être bientôt dans le collimateur de la guerre internationale contre le terrorisme déclarée par les Etats-Unis et d'autres pays occidentaux après l'attaque du 11 septembre contre New York et Washington.

La Colombie abrite, sur 42.000 km2 (la superficie de la Suisse), la plus grande base terroriste du monde occidental. Elle est dominée par les rebelles marxistes des FARC (Forces armées révolutionnaires de Colombie), ennemis déclarés des Etats-Unis et de l'économie occidentale de marché, mais amis des terroristes irlandais de l'IRA et basques de l'ETA.

L'attaque du 11 septembre contre les Etats-Unis a conféré au terrorisme le statut d'ennemi de l'humanité. Les terroristes, quels qu'ils soient, sont désormais les ennemis du monde civilisé et non plus simplement d'un gouvernement ou d'un type de société. Même l'Union européenne, souvent indulgente à l'égard de minorités violentes et des FARC en particulier, en appelle, par la voix de son responsable de Politique extérieure et de Sécurité, Javier Solana, à une "vaste coalition internationale, sans frontières et sans limites, pour lutter contre le terrorisme".  L'OTAN tient un discours similaire.

Dès lors, le terrorisme politique qui a fait plus de 200.000 morts depuis 1967 en Colombie devrait logiquement devenir l'un des objectifs de la nouvelle guerre internationale antiterroriste. Et ce d'autant plus que ce terrorisme est aujourd'hui financé par la production et le trafic de cocaïne, dont la Colombie est le premier producteur mondial. En Afghanistan, c'est l'héroïne qui soutient financièrement le gouvernement des talibans, protecteurs d'Oussama ben Laden.

Les deux branches de la guérilla colombienne, les FARC et l'ELN (Armée de libération nationale, pro-cubaine) ont depuis longtemps désigné les citoyens et intérêts américains comme "objectifs de guerre". Tant les FARC que l'ELN, ainsi que leurs adversaires des AUC (Autodéfenses unies de Colombie, paramilitaires), figurent aux côtés de l'Al-Qaeda d'Oussama ben Laden parmi la trentaine d'organisations étrangères désignées comme "terroristes" par les Etats-Unis.

Les attentats à la dynamite contre les oléoducs, le rançonnement de sociétés occidentales et les enlèvements et assassinats d'Américains et d'Européens en Colombie seront désormais des dossiers très sensibles et examinés en priorité à Washington et à Bruxelles.

La communauté internationale va aussi s'inquiéter davantage de l'utilisation du "laboratoire de paix" de 42.000 km2 que le président colombien Andres Pastrana a imprudemment cédé aux FARC dans le sud de la Colombie, en novembre 1998, dans l'espoir, vain jusqu'ici, d'y négocier la fin des hostilités. L'armée et la police ont été retirées de cette zone plus grande que certains pays européens. A l'intérieur et autour d'elle, les FARC contrôlent aujourd'hui la production de cocaïne, devenue la principale source de financement des 17.000 combattants de cette guérilla.

De "graves violations du droit humanitaire international" par les FARC étaient dénoncées en juillet dans un réquisitoire détaillé dressé par la prestigieuse organisation humanitaire Human Rights Watch (HRW), d'ordinaire critique de la violence de l'armée et des paramilitaires colombiens. Ce réquisitoire est considéré par nombre d'observateurs, dont un enquêteur de HRW, comme un premier pas vers une éventuelle action de la justice internationale contre les chefs des FARC, mis sur le même pied que Pinochet ou Milosevic.

Human Rights Watch affirme notamment que "les FARC sont responsables d'assassinats et d'enlèvements de civils, de prises d'otages, d'utilisations d'enfants soldats, de pseudo-jugements, de traitement cruel et inhumain de combattants capturés et de déplacement forcé de civils".

La plupart de ces exactions sont commises dans le "laboratoire de paix", devenu la plus grande base terroriste du monde occidental. Les FARC, en effet, y entraînent aussi leurs troupes et invitent, afin de profiter de leur expérience, des terroristes d'autres pays à y tester armes et explosifs.

Les liens des FARC avec l'Armée républicaine irlandaise (IRA) sont prouvés. Ceux avec les indépendantistes basques de l'ETA sont supposés en fonction de la similitude entre des attentats commis en Colombie et en Espagne. Le secrétaire général d'Interpol, Ronald Kenneth, relevait cette similitude en juin dernier après un attentat meurtrier à l'explosif perpétré à Bogota et attribué aux commandos urbains des FARC.

L'arrestation, le 11 août à l'aéroport de Bogota, de trois Irlandais de l'IRA accusés d'avoir entraîné dans le "laboratoire de paix" les guérilleros des FARC au maniement d'explosifs avait ému les chancelleries occidentales. A Washington, le porte-parole du département d'Etat, Philip Reeker, n'avait pas hésité à clamer que "de telles activités ne sont pas compatibles avec le processus de paix".

Dans le climat actuel de guerre internationale contre le terrorisme, la Colombie ne tardera donc pas à devenir l'un des points chauds de la planète. La cruauté de la narcoguérilla des FARC et sa doctrine antioccidentale ne pourront plus être considérées comme une simple affaire intérieure. Le gouvernement colombien, qui réclame comme d'autres une action internationale contre le terrorisme, risque de voir son souhait exaucé bientôt dans son propre pays.


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