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Colombie: l'armée frappe la guérilla pour la forcer à négocier

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Dossier Colombie

BOGOTA, 27 août 2001 (LatinReporters.com) - Une offensive sans précédent de l'armée colombienne vise à forcer la guérilla à s'engager dans de véritables pourparlers de paix. Le chef des forces armées, le général Fernando Tapias, affirme que gagner la guerre ne signifie pas exterminer tous les rebelles, mais les affaiblir jusqu'à ce qu'ils comprennent que la négociation est la meilleure issue. Plus de 2.200 guérilleros des FARC (Forces armées révolutionnaires de Colombie), soit 14% des effectifs de cette guérilla marxiste, étaient toujours encerclés dimanche dans le sud-est colombien par 6.000 soldats munis de viseurs nocturnes et appuyés par une armada d'hélicoptères.

Avec plus de cent morts et un nombre encore indéterminé de déserteurs qui se rendent, les FARC subissent dans cette offensive leur plus grave défaite depuis l'ouverture, en janvier 1999, de négociations avec le gouvernement de Bogota. Les FARC ont toujours rejeté tout cessez-le-feu pendant ces négociations jusqu'à présent stériles.

La longue colonne de guérilleros était sortie du "laboratoire de paix" de 42.000 km2, grand comme la Suisse, que le président colombien Andres Pastrana avait cédé aux FARC dans le sud de la Colombie, en novembre 1998, afin d'y négocier la fin d'une guerre civile qui a fait plus de 200.000 morts depuis 1964.

Selon les services de renseignement militaires, la colonne des FARC prétendait notamment rouvrir en direction du Venezuela et du Brésil des couloirs pour l'exportation de cocaïne et l'importation d'armes, les guérilleros payant parfois avec la drogue leurs fournisseurs de matériel de guerre. La colonne aurait dû ensuite revenir se mettre en sécurité dans le "laboratoire de paix", dont l'armée et la police ont été retirées en 1998.

L'armée colombienne et l'opinion publique y voient une nouvelle preuve que les FARC ont dénaturé le "laboratoire de paix" pour le transformer en atelier de la guerre. Dans cette zone et autour d'elle, les FARC contrôlent la production de cocaïne, désormais leur principale source de financement. Dimanche, dans le département du Putumayo, près de la frontière avec l'Equateur et à proximité relative du "laboratoire de paix", la brigade antinarcotique s'est emparée d'une raffinerie de pétrole artisanale construite par les FARC. Elle pouvait produire quotidiennement 7.500 litres d'une essence utilisée dans la fabrication de la cocaïne.

Dans le "laboratoire de paix", les FARC entraînent aussi leurs troupes et emprisonnent les civils enlevés contre rançon. Les guérilleros invitent en outre, afin de profiter de leur expérience, des terroristes d'autres pays à y tester armes et explosifs. 

Les liens des FARC avec l'Armée républicaine irlandaise (IRA) sont prouvés. Ceux avec les indépendantistes basques de l'ETA sont supposés en fonction de la similitude entre des attentats commis en Colombie et au Pays basque. Le secrétaire général d'Interpol, Ronald Kenneth, relevait cette similitude en juin dernier après un attentat meurtrier à l'explosif perpétré à Bogota et attribué aux commandos urbains des FARC.  

L'arrestation, le 11 août à l'aéroport de Bogota, de trois Irlandais de l'IRA accusés d'avoir entraîné dans le "laboratoire de paix" les guérilleros des FARC au maniement d'explosifs a ému les chancelleries occidentales. A Washington, le porte-parole du département d'Etat, Philip Reeker, n'a pas hésité à clamer que "de telles activités ne sont pas compatibles avec le processus de paix". Le président colombien Andres Pastrana est ainsi averti que les Etats-Unis, qui financent l'essentiel de la lutte contre la guérilla et le narcotrafic en Colombie, apprécieraient peu l'octroi de nouvelles concessions à la guérilla.

L'utilisation abusive du "laboratoire de paix" par les FARC, la poursuite des leurs attaques meurtrières contre villages, casernes et prisons, ainsi que de leurs enlèvements de civils contre rançon ont convaincu le président Pastrana de promulguer, le 16 août, la "Loi de sécurité et défense nationales". Critiquée par des juristes et des associations de droits de l'homme, mais approuvée démocratiquement par une large majorité parlementaire, cette loi permet au chef de l'Etat de créer des "théâtres d'opération" dans lesquels l'armée, de sa propre initiative, peut déclencher des opérations antiguérilla.

Cette loi a facilité la rapide neutralisation des 2.200 guérilleros aujourd'hui encerclés. D'une manière générale, le droit d'initiative octroyé légalement aux militaires leur permet désormais de surprendre la guérilla. Avant la promulgation de la nouvelle loi, l'armée n'était autorisée qu'à des contre-attaques et subissait donc des pertes avant de pouvoir réagir.

Selon le dernier sondage Gallup, l'armée colombienne serait appuyée par 72% de la population. Elle détrône ainsi l'Eglise catholique de la tête du palmarès de la popularité. La guérilla, elle, ne recueille que 5% d'opinions favorables.

Un autre sondage indique qu'à peine 7% des Colombiens se déclarent "de gauche", contre 14%, en moyenne, de l'ensemble des Latino-Américains. Un éditorialiste du journal libéral de Bogota "El Tiempo" y voit le résultat des atrocités commises contre la population civile tant par la guérilla marxiste des FARC que par les guérilleros guévaristes de l'ELN (Armée de libération nationale). La guérilla aurait donc anéanti politiquement la gauche démocratique, alors que la Colombie nécessite pourtant de profondes réformes sociales pour vaincre la pauvreté et la corruption.

L'ELN compte 4.500 combattants et les FARC 16.500. Les négociations du gouvernement avec ces deux mouvements sont suspendues. La guérilla réplique actuellement par une vague d'attentats à l'explosif attribuée principalement à l'ELN.


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