Polémique autour d'un culte fondateur du catholicisme en Amérique latine
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Juan Diego et la Vierge de Guadalupe. Peinture anonyme du 18e siècle |
La polémique porte atteinte à l'un des cultes fondateurs du catholicisme en Amérique latine, celui de la Vierge de Guadalupe, patronne du Mexique et "reine des Amériques", qui serait apparue à Juan Diego en décembre 1531. Construite à Mexico sur le lieu supposé de cette rencontre mystique, la basilique de Guadalupe est le sanctuaire le plus visité du continent.
Ce sont précisément trois prélats qui ont officié dans la basilique, dont son doyen émérite Mgr Guillermo Schulenberg, et un professeur de l'Université pontificale de Mexico, le père Manuel Olimon Nolasco, qui ont adressé au pape une lettre commune sollicitant la suspension de la canonisation.
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Sans s'opposer à la sanctification de Juan Diego, la lettre des prélats en demande le report aussi longtemps que l'existence de cet Indien béatifié en 1990 ne sera pas prouvée de manière irréfutable.
Précisant que des chercheurs
reconnus et impartiaux mettent en doute à la fois l'authenticité
et le contenu de documents relatifs à Juan Diego, le père
Manuel Olimon Nolasco se demande si "l'urgence de canoniser" ne répond
pas aux intérêts de ceux qui visent leur propre promotion
en brandissant "le drapeau des groupes indigènes".
L'un des historiens et écrivains les plus réputés du Mexique, Miguel Leon Portilla, partage les doutes des prélats. Il remarque que les premiers textes parlant de l'apparition de la Vierge de Guadalupe à l'Indien Juan Diego datent de 1648, soit 117 ans après les faits supposés.
Miguel Leon Portilla note en outre qu'avant la conquête espagnole, un temple aztèque s'élevait à Mexico sur la colline Tepeyac, où la Vierge est censée être apparue à Juan Diego et où se dresse aujourd'hui la basilique de Guadalupe. L'historien en déduit que le culte de la Vierge associé au mythe de son apparition à l'Indien visait probablement à supplanter la déesse Tonantzin, mère de la création des Indiens aztèques.
C'est en les qualifiant "d'ennemis de l'Eglise" que le secrétaire de la Conférence épiscopale mexicaine, Mgr Francisco Javier Gonzalez, réplique à ceux qui mettent en doute l'existence de Juan Diego. A son avis, les prélats contestataires mériteraient la suspension, voire l'excommunication.
L'un des principaux défenseurs de la canonisation au sein de l'archidiocèse de Mexico, Mgr Jose Luis Guerrero, souligne que la lettre envoyée à Rome par les prélats porte la date du 3 décembre 2001, de 17 jours antérieure à la signature, par le Pape Jean-Paul II, du décret de reconnaissance du miracle de la colline Tepeyac. Mgr Jose Luis Guerrero en déduit que le pape n'a pas tenu compte des objections des prélats hantés par le doute et que la polémique devrait donc être close.
Le dernier mot reviendra toutefois aux cardinaux qui se réuniront prochainement en consistoire avec le souverain pontife.
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