Pérou: émeutes contre les premières privatisations du président Toledo
Tractebel, filiale belge de la multinationale française Suez-Lyonnaise des Eaux, acquérait vendredi, pour 167 millions de dollars, deux sociétés publiques péruviennes productrices d'électricité, Egasa et Egesur. Cette première privatisation sous la présidence d'Alejandro Toledo a provoqué des manifestations violentes à Arequipa, la grande ville du sud-péruvien, région où siègent les entreprises vendues.
Pendant trente jours, l'état d'urgence y suspendra les garanties constitutionnelles relatives notamment à l'inviolabilité du domicile, à la liberté de réunion et à la libre circulation. Echaudées par la banqueroute de l'Argentine, pays qui a privatisé dans les années 1990 ses principales entreprises publiques, les autorités d'Arequipa et de nombreuses organisations sociales de la région craignent que la privatisation d'Egasa et d'Egesur ne renchérisse l'électricité et n'accroisse le chômage. Un tribunal avait suspendu la vente des deux entreprises, la possession de la majorité des actions étant revendiquée par la région d'Arequipa, qui ne voulait pas vendre. Mais le gouvernement de Lima a passé outre et le représentant de l'acheteur, la société belge Tractebel, estime que la signature des derniers documents a rendu la privatisation irréversible. Néanmoins, le maire d'Arequipa, Juan Manuel Guillen, a annoncé un nouveau recours en justice. Dans un message à la nation, le président Toledo affirmait dimanche soir qu'il respecterait les décisions des tribunaux, mais que son "gouvernement démocratique et d'autorité" poursuivrait sa politique de privatisations afin de dégager les ressources nécessaires à l'aménagement d'infrastructures, notamment la construction d'écoles et de routes. Du côté de l'opposition, Lourdes Flores, dirigeante de l'Union nationale, troisième parti politique du Pérou, a prié Alejandro Toledo d'expliquer aux Arequipiens pourquoi il vient de vendre des entreprises publiques qu'il avait pourtant promis de ne pas privatiser lors de la campagne électorale de l'an dernier. Confronté à un fort mécontentement social et à la résurgence du terrorisme du mouvement maoïste Sentier Lumineux, Alejandro Toledo, premier président péruvien d'origine amérindienne, a vu sa popularité s'effondrer de 60 à 20% au cours des douze derniers mois. Les syndicats reprochent au chef de l'Etat et à ses ministres de qualifier régulièrement "d'ennemis de la démocratie" ceux qui manifestent contre la politique économique et sociale du gouvernement. Dans deux autres pays d'Amérique du Sud, le Paraguay et l'Equateur, une forte opposition populaire et les réticences d'autorités régionales paralysent actuellement les privatisations d'entreprises publiques. Vous pouvez réagir à cet article sur notre forum
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