Accueil   |  Politique   |  Economie   |  Multimédia   |  Société   |  Pays+dossiers   | Forum 
Google
 
Web LatinReporters.com
Référendum, putsch, "faucons du Pentagone", Etats-Unis, Europe, Uribe, Aznar...

Venezuela - "Je suis un danger pour l'oligarchie de Colombie, du Brésil, d'Argentine..." nous dit le président Chavez

par Norma Domínguez pour LatinReporters.com

Le président Hugo Chavez pointe le doigt vers les Etats-Unis, accusant "les faucons du Pentagone" de vouloir imposer leur hégémonie à l'Amérique latine
Photo Norma Domínguez
BUENOS AIRES, dimanche 31 août 2003 (LatinReporters.com) - Lorsqu'il dit lutter pour "les intérêts du peuple" et contre la pauvreté, Hugo Chavez, président du Venezuela, estime que cette ambition soulève une résistance au-delà des frontières vénézuéliennes. "Je suis un danger pour l'oligarchie colombienne, équatorienne, bolivienne, brésilienne, argentine..." nous disait-il le 20 août à Buenos Aires, lors d'une visite officielle en Argentine.

Il pointe aussi le doigt vers les Etats-Unis, contre "les faucons du Pentagone" qu'il accuse de vouloir étendre leur "hégémonie sur tout un continent". Quant au référendum révocatoire voulu par l'opposition vénézuélienne pour le chasser du pouvoir, Hugo Chavez croit qu'il n'aura pas lieu en 2003.

Le Venezuela est-il démocratique? "Evidemment qu'il est démocratique, mais il ne l'était pas" répond le président Chavez. "Dans notre pays, poursuit-il, il y eut de 1958 à 1998 ce qu'on appelait une démocratie, très sui generis, qui permit la corruption et favorisa l'enrichissement d'élites et de minorités et plongea dans la pauvreté et le sous-développement la grande majorité des Vénézuéliens. Une démocratie qui expropria le peuple de ses droits fondamentaux à la santé, à l'éducation, au logement, au travail... c'est-à-dire à la vie".

A mi-parcours exactement de son second mandat présidentiel obtenu en 2000 avec quelque 60% des votes, Hugo Chavez estime que les nouvelles lois "de la terre, de la pêche, des hydrocarbures, du système ferroviaire, de l'électricité, du gaz, etc." témoignent de la volonté de son gouvernement de servir "les intérêts du peuple".

VOIR AUSSI:

Invalidation des
signatures pour un
référendum contre
le président Chavez

Venezuela-Interview
de Roy Chaderton,
ministre des Affaires
étrangères

Dossier Venezuela

Aussi ne croit-il pas, en dépit de sondages négatifs, que son appui électoral se soit effrité. Il en veut pour preuve la réaction populaire au putsch avorté qui l'écarta brièvement du pouvoir en avril 2002. Selon Hugo Chavez, "plus de gens que ceux qui avaient voté pour moi sortirent alors dans les rues. J'avais été élu par 3,7 millions de personnes, mais, pour défendre mon gouvernement et pour me réclamer, ils furent au moins 8 millions dans les rues de l'ensemble du pays".

Pourquoi alors l'image d'une opposition immense face à un gouvernement supposé inefficace et autoritaire? "Tout simplement à cause des médias" répond Hugo Chavez. "Prenons par exemple, suggère-t-il, la manifestation (de l'opposition) de ce 20 août. L'opposition prétend avoir réuni 600.000 manifestants sur l'avenue Libertador de Caracas, une quantité impossible en fonction de l'espace physique réel, qui ne peut accueillir que 30.000 personnes. Mais les chaînes de télévision prennent les images que l'opposition souhaite. Nous avons découvert que, souvent, elles montrent de vieilles images en affirmant que c'est du direct, puis la CNN enchaîne , répétant au monde entier des images de soi-disant 600.000 personnes".

"L'équité médiatique, ajoute le président Chavez, est impossible, car quatre grands canaux privés s'entendent et s'unissent en outre à des alliés internationaux, tandis que l'Etat ne dispose que d'un seul canal... La faille tectonique de mon gouvernement, c'est la faille communicationnelle et c'est une faille horrible et terrible".

Référendum révocatoire? "Pas en 2003"

Le président vénézuélien affirme que "parfois, dans certains pays, comme la Colombie, des médias disent régulièrement que Chavez s'est réuni avec les chefs guérilleros colombiens et ils le font même avec des photos truquées... Un oligarque colombien a dit un jour que Chavez était plus dangereux pour la Colombie que la propre guérilla. En fait, ils ont peur de Chavez, car Chavez peut avoir un impact sur le peuple colombien et peut générer des réponses organisées et politiques dans la population. Je suis ainsi un danger non seulement pour l'oligarchie colombienne, mais aussi pour l'équatorienne, la bolivienne, la brésilienne, l'argentine... Et le danger n'est pas seulement Chavez, mais aussi ce que suscite le processus vénézuélien. Ils ont peur des peuples, des nouveaux leaderships qui peuvent surgir".

Quant au référendum révocatoire visant à chasser Hugo Chavez du pouvoir et au dépôt par l'opposition de plus de trois millions de signatures afin d'obtenir la convocation d'un tel référendum prévu par la nouvelle Constitution bolivarienne, le président vénézuélien déclare qu'il "ne bougera pas le petit doigt pour que ce référendum ait lieu". ("Yo no voy a mover una paja...", soit, littéralement: "Je ne bougerai pas un brin de paille...").

Selon Hugo Chavez, les signatures déposées par l'opposition "sont clairement illégales, car non recueillies selon les procédés constitutionnels". Admettant néanmoins implicitement qu'un référendum révocatoire serait possible si l'opposition suivait une procédure légale, le président Chavez estime que "de toute façon, je ne crois pas qu'il (le référendum) puisse se faire en 2003, car la fin de l'année est au coin de la rue et il faudrait encore accomplir de nombreuses formalités pour valider les signatures, les vérifier, etc.".

Autre chapitre qui irrite souvent le chef d'Etat vénézuélien: compte tenu d'accusations -qu'il réfute- le liant aux guérillas marxistes colombiennes, quelles sont ses relations avec la Colombie présidée par Alvaro Uribe?

"Les relations personnelles sont bonnes, mais, à certains égards, Uribe n'aide pas beaucoup" répond Hugo Chavez. "Par exemple, je viens de lire une déclaration qu'il a faite à un journal colombien, selon laquelle il m'aurait dit à Asunción qu'il m'autorisait à dire aux FARC (Forces armées révolutionnaires de Colombie, guérilla marxiste) de négocier avec lui et qu'il trouverait une solution en cinq minutes... C'est un message qui peut se lire de plusieurs façons, car Uribe pourrait être en train de dire à la Colombie et au monde qu'il croit que je suis le lien avec les FARC ou que j'ai un contact direct avec elles.. Cela n'aide en rien à une relation franche et sincère".

"Relations très difficiles" avec les Etats-Unis

Chapitre plus sensible encore: les relations entre le Venezuela et les Etats-Unis. "Des relations très difficiles" diagnostique le président Chavez. A ses yeux, "elles sont nécessairement difficiles, car les Etats-Unis ont un gouvernement qui veut s'imposer et qui prétend fouiner là où il n'a rien à faire. Il semble qu'il y ait à Washington un courant voulant imposer ses vues et ses critères à l'Amérique latine".

"Eux (les Etats-Unis) ont ouvertement appuyé le gouvernement putschiste (en avril 2002) et ils prétendirent alors que j'étais un tyran, que le tyran était tombé, des affirmations qu'ils n'ont d'ailleurs jamais rectifiées" regrette Hugo Chavez.

Pour le président vénézuélien, l'objectif des Etats-Unis serait "d'encourager une opposition afin de tenter de se débarrasser de Chavez. Car ils prétendent dominer ce continent et Chavez pourrait être, comme l'a dit le chef de la CIA avant le putsch, contraire aux intérêts des Etats-Unis... Ce n'est pas que je sois contraire aux intérêts américains, mais, pour moi, le Venezuela est le plus important. L'Amérique latine aussi est importante. Je ne peux subordonner les intérêts de mon peuple et la Constitution du Venezuela à la prétention hégémonique des faucons du Pentagone sur tout un continent. Cela, jamais".

Hugo Chavez préfère l'Europe, dont "l'attitude est très différente de celle des Etats-Unis. Non seulement à l'égard du Venezuela, mais aussi, je crois, à l'égard du monde et de l'Amérique latine". Et notre interlocuteur de souligner "la grande compréhension et l'appui de gouvernements tels que celui du président Chirac, en France, et celui de Vladimir Poutine, en Russie... La relation est aussi très bonne avec l'Italie, surtout sur le plan économique". Par contre, elle est "moins (bonne) avec Aznar".

Le président du gouvernement espagnol, José Maria Aznar, n'est effectivement pas populaire au palais présidentiel de Caracas. Le gouvernement de Madrid, explique Hugo Chavez, "a commis une très grave erreur, comme les Etats-Unis, en émettant le jour du putsch un communiqué reconnaissant pratiquement un gouvernement (putschiste) qu'ils appelaient de transition. Et le plus grave est que l'Espagne le fit au nom de l'Union européenne, sans la consulter. D'autres gouvernements de ce bloc (européen) expliquèrent que cette position était celle de l'Espagne et non de l'Union européenne".

"Cela a lamentablement refroidi des relations qui avaient bien débuté, poursuit le président Chavez. J'ai été à Madrid plusieurs fois. Aznar fut même l'unique chef de gouvernement européen à visiter officiellement le Venezuela sous ma présidence, en 1999. En outre, le roi d'Espagne est un bon ami. J'ai avec lui une relation personnelle extraordinaire, mais ces affaires politiques l'ont réduite quelque peu".

Des voeux pour le futur? Hugo Chavez commence par l'économie: "Les prochains mois seront ceux de la récupération économique. Les rapports de la Banque centrale du Venezuela disent que cette récupération a commencé. Le prix du pétrole est à 25,5 dollars (le baril), la production quotidienne atteint 3.150.000 barils. Nous relançons les plans de logement et les plans agricoles. Pa exemple, nous battons cette année le record de production de riz."

Puis, le point d'orgue: "Nous allons laisser à la traîne tous ces courant fascistes qui s'amenuisent chaque jour. Je m'imagine un pays poursuivant sa marche sur la base du projet bolivarien"...

Vous pouvez réagir à cet article sur notre forum


  Accueil   |  Politique   |  Economie   |  Multimédia   |  Société   |  Pays+dossiers  
 

© LatinReporters.com - Amérique latine - Espagne
Le texte de cet article peut être reproduit s'il est attribué, avec lien, à son auteur et à LatinReporters.com