Les Latinos arbitres de l'élection présidentielle américaine
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John Kerry en campagne à Albuquerque, dans l'Etat du Nouveau Mexique. Le vote latino y est décisif. Photo Kerry-Edwards 2004, Inc. from Sharon Farmer |
WASHINGTON, vendredi 29 octobre 2004 (LatinReporters.com) - Sur 40
millions d'Hispaniques installés aux Etats-Unis, principale minorité
avec 13,7% de la population du pays, quelque 13 millions de nationalité
américaine pourraient voter à la présidentielle du
2 novembre. Des associations de Latinos estiment qu'au moins 7 millions d'entre
eux voteront effectivement, contre 5,9 millions en 2000. Leur poids n'est
réel que dans un nombre restreint d'Etats, mais ils pourraient arbitrer le
duel entre le président républicain sortant George Bush et
son rival démocrate John Kerry, au coude à coude dans les sondages.
Traditionnellement, les Hispaniques ont une fibre plus démocrate
que républicaine. George Bush avait mobilisé 35% du vote latino
en novembre 2000, beaucoup moins que les 62% en faveur du démocrate
Al Gore. Un sondage du Pew Hispanic Center estime que 45% des Hispaniques
se définissent actuellement comme démocrates et à peine
20% comme républicains. Plus concret, un sondage du Washington Post
attribue à Kerry 54% des intentions de vote des Latinos, contre 37%
à Bush.
Bush et Kerry opposés sur l'immigration
WASHINGTON, samedi 30 octobre 2004 (LatinReporters.com) - A trois jours de l'élection
présidentielle, s'exprimant en
espagnol sur la chaîne de télévision Univision dans des
interviews préenregistrées, John Kerry et George Bush ont sollicité
le vote de la communauté hispanique dans le programme "Sabado Gigante"
(Samedi géant), le plus populaire parmi la communauté latino
des Etats-Unis.
"Moi, j'ai un plan de légalisation pour celui qui la mérite" a assuré
le candidat démocrate après avoir affirmé que le président
Bush, lui, "ne veut pas légaliser" les immigrés sans-papiers.
L'augmentation du salaire minimum, la couverture médicale des enfants
non couverts par une assurance santé et l'accès à l'université
de fils et de filles de sans-papiers sont d'autres mesures prônées
par Kerry et qu'il a présentées comme favorables pour la communauté
hispanique.
Le président Bush a défendu son plan de régularisation
temporaire des immigrés illégaux, qui devraient retourner dans
leur pays "à la fin de leur période de travail".
George Bush s'est opposé à une amnistie indéfinie des
sans-papiers, estimant injuste de les faire passer avant les candidats à
l'immigration qui suivent une longue procédure légale pour
entrer aux Etats-Unis ou en acquérir la nationalité.
Le président sortant a par ailleurs affirmé que la culture hispanique s'identifierait aux valeurs
républicaines par l'importance qu'elle accorde "à la foi, à la famille et
au travail dur".
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Les analystes s'accordent à estimer que le vote hispanique sera capital
pour faire basculer en faveur de l'un ou l'autre candidat les Etats du Nouveau
Mexique, de l'Arizona, du Nevada, du Colorado et de Floride.
Ces cinq Etats ne rassemblent que 56 des 538 grands électeurs, la majorité de
270 ou plus étant nécessaire pour accéder à la Maison blanche.
(Le candidat vainqueur dans un Etat en rafle tous les grands électeurs, sauf au Nebraska
et dans le Maine). Mais George Bush fut élu président grâce à
l'infime avantage de 537 votes obtenu il y a quatre ans en Floride, où l'appuyait la
forte colonie d'exilés cubains, s'adjugeant ainsi les 27 grands
électeurs de cet Etat au milieu d'une polémique politico-judiciaire teintée
d'accusations de fraudes.
Certes, les deux tiers des électeurs latinos se concentrent dans
les Etats de Californie, de New York, de l'Illinois et du Texas. Mais là,
ils n'ont pratiquement aucun poids, car ils ne pourraient en principe y renverser
une tendance très marquée, démocrate dans les trois
premiers de ces Etats et républicaine au Texas, dont George Bush fut
le gouverneur.
En majorité d'origine mexicaine, les Latino-Américains résidant
aux Etats-Unis sont sensibles au message plus social des démocrates
(couverture des soins de santé, défense des classes moyennes,
soutien de l'école publique). Néanmoins, ils ne sont pas indifférents
à l'éthique familiale et religieuse dont se prévalent
George Bush et les républicains.
Brian Gifford, chercheur à l'Université californienne de Berkeley,
estime que 12% des militaires américains morts ou blessés en
Irak étaient d'origine hispanique. Selon plusieurs sondages, une majorité
de Latinos jugerait que la guerre d'Irak n'en valait pas la peine. Le Mexique, principale
source d'émigration vers les Etats-Unis, avait refusé de soutenir Washington tant
dans la guerre d'Irak que dans la bataille diplomatique internationale qui avait
précédé l'invasion militaire.
L'importance du vote hispanique n'a pas été reflétée
par les trois débats télévisés entre George Bush
et John Kerry. L'Amérique latine fut la grande absente de quatre heures
et demie de joutes verbales entre les deux candidats. A peine deux minutes
ont été consacrées à l'immigration illégale,
venue principalement du Mexique.
Des meetings ciblés dans les Etats indécis ont compensé
cette distanciation. Tant John Kerry que George Bush y maîtrisaient
suffisamment l'espagnol pour clamer "Amigos, necesito vuestros votos!".
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