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Argentine: prison pour l'ex-ministre "super Cavallo", soupçonné de trafic d'armes

Domingo Cavallo
© Accion por la República
BUENOS AIRES, jeudi 4 avril 2002 (latinreporters.com) - Voici à peine un an, les médias l'appelaient "sauveur de la nation", "super ministre" ou "super Cavallo"... Depuis hier, il est en prison. Au cours des cent dernières années, en Argentine, nul n'a été plus longtemps que lui ministre de l'Economie. Mais les émeutes de la faim forçaient en décembre dernier sa démission. Père du "corralito", le fameux gel des comptes bancaires, Domingo Cavallo est désigné aujourd'hui comme l'un des responsables de la ruine de l'Argentine. Aussi son emprisonnement, par un juge qui le soupçonne de trafic d'armes, fait-il plus sourire que pleurer.

L'incarcération de Domingo Cavallo "me procure une immense joie" s'est exclamée la députée de gauche Elisa Carrio, une pasionaria anticorruption actuellement en tête des sondages de popularité.

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Catalogué comme néolibéral, promoteur en 1991 de la parité dollar-peso abandonnée en janvier dernier par le président Eduardo Duhalde, "super Cavallo" est en réalité, sur le plan idéologique, un prototype tout-terrain.

Président de la Banque centrale de la République d'Argentine sous la dictature militaire, ministre des Affaires étrangères puis de l'Economie du président péroniste Carlos Menem, à nouveau ministre de l'Economie du président radical de centre gauche Fernando de la Rua, chassé comme lui en décembre 2001 par les émeutes de la faim qui firent plus de 30 morts, Domingo Cavallo a servi tous les régimes, démocratiques ou non, qui se sont succédé depuis un quart de siècle en Argentine.

Il est aujourd'hui rattrapé par un vieux dossier de contrebande d'armes remontant aux années 1991 à 1995. Alors chef de l'Etat, Carlos Menem signa pendant cette période trois décrets, contresignés notamment par son ministre de l'Economie Domingo Cavallo, autorisant la vente d'armes au Panama et au Venezuela. Mais les livraisons furent déviées vers l'Equateur et la Croatie. Ces deux pays étaient pourtant sous embargo international, l’Equateur pour son conflit avec le Pérou et la Croatie dans le cadre de la guerre qui ravageait l'ex-Yougoslavie.

Ce détournement d'armes provoqua une longue enquête judiciaire qui aboutit, le 7 juin 2001, à l'arrestation de Carlos Menem. Outre l’ex-président étaient aussi détenus l’un de ses anciens ministres de la Défense, Antonio Gonzalez, son chef des forces armées de l’époque, le général Martin Balza, et l’ex-beau-frère et conseiller de Carlos Menem, Emir Yoma.

Cinq mois et demi plus tard, les juges de la Cour suprême estimaient par six voix contre deux et une abstention que l'accusation d'association illicite portée contre les prévenus n'avait pu être prouvée. Carlos Menem retrouvait la liberté le 20 novembre. Les autres inculpés étaient également relaxés.

Pendant cette procédure, le seul signataire des décrets suspects à n'être pas inquiété par la justice fut Domingo Cavallo. Nombre de commentateurs attribuèrent ce privilège à sa toute puissance de ministre alors encore "sauveur de la nation".

Mais Domingo Cavallo ayant perdu son piédestal, le voilà aujourd'hui dans la mire d'une justice qui, en Argentine, fait souvent preuve d'une efficacité inversement proportionnelle à la puissance des prévenus.

Alors que l'ex-président Carlos Menem fut accusé d'être le "chef d'une association illicite" s'adonnant à la contrebande d'armes -accusation déclarée sans fondement par la Cour suprême- Domingo Cavallo, lui, est mis en cause dans la même affaire de contrebande pour le laxisme des douanes, qu'il était censé gérer aussi en sa qualité de ministre de l'Economie. Que 6.500 tonnes d'armes aient pu quitter le pays vers une destination autre que celle indiquée officiellement laisse supposer que des consignes avaient été données pour ne pas pratiquer les contrôles de rigueur.

La justice veut en outre savoir pourquoi à peine 80 millions de dollars ont été retrouvés dans les caisses de l'Etat pour la vente de ces armes évaluées à 200 millions de dollars.

Dans dix jours ouvrables au plus tard, le juge fédéral Julio Speroni devra soit libérer Domingo Cavallo, soit le renvoyer devant un tribunal. Le trafic d'armes, avec circonstance aggravante lorsque commis par un fonctionnaire public, est frappé en Argentine d'une peine de 4 à 12 ans de prison.

Divers observateurs estiment que la procédure ouverte contre Domingo Cavallo pourrait faire surgir dans le dossier du trafic d'armes des éléments neufs mettant à nouveau en cause l'ex-président Carlos Menem, qui ambitionne d'être le candidat péroniste à l'élection présidentielle de 2003.

Domingo Cavallo est par ailleurs soumis, depuis le mois de mars, à deux mises en examen relatives à sa gestion du ministère de l'Economie. L'une pour inviter les banques à ne pas respecter les sentences de tribunaux contraires au gel des comptes d'épargne, l'autre pour son rôle dans une gigantesque opération de restructuration de la dette publique.


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