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Washington et Bruxelles redouteraient un effet domino

L'Argentine en crise croit qu'on l'aidera pour préserver l'Amérique latine d'une extension de la colère

Sur le marché libre, le peso
a perdu 50% de sa valeur
BUENOS AIRES, dimanche 20 janvier 2002 (latinreporters.com) - L'Argentine traverse la crise politique, économique et sociale la plus grave de son histoire, mais l'ampleur même du marasme convainc les Argentins que ni les Etats-Unis ni l'Union européenne ne les abandonneront et les aideront via le Fonds monétaire international (FMI).

A Buenos Aires, le gouvernement et la presse sont en effet persuadés que Bruxelles et surtout Washington redoutent un effet domino de la colère des Argentins sur les institutions -sinon sur les économies- d'autres pays d'Amérique latine, une région qui compte 211 millions de pauvres, soit 44% de sa population.

Des sources gouvernementales argentines relayées par des médias de Buenos Aires suggèrent que "la situation institutionnelle" de l'Amérique latine préoccupe Washington. Une extension de la colère des Argentins dans un sous-continent miné par de fortes inégalités sociales aurait des effets régionaux déstabilisateurs, s'ajoutant à ceux provoqués par la guérilla marxiste de Colombie et par le virage pro-cubain du Venezuela pétrolier du populiste Hugo Chavez.

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La crise argentine n'est plus seulement économique et financière, admettent des analystes politiques. Elle provoque en fait une liquéfaction progressive de la deuxième puissance d'Amérique du Sud.

Le blocage des comptes bancaires brise en effet le commerce extérieur de l'Argentine et ruine sa classe moyenne. Le moratoire de la dette publique fait fuir les investisseurs. Sur le marché libre, le peso a perdu 50% de sa valeur par rapport au dollar depuis la dévaluation du 6 janvier. Des salaires ne sont plus versés. Les systèmes de retraite et de santé sont grippés. La classe politique, la justice et les banques sont les cibles de manifestations de plus en plus violentes.

Le président argentin Eduardo Duhalde met en garde contre "une guerre civile" et "un bain de sang". Son appel à un vaste "dialogue social" laisse de marbre une classe moyenne dont l'épargne, 65 milliards de dollars, est bloquée pour éviter l'écroulement du système financier.

Malgré ce blocage, Moody's, influente agence internationale de notation financière, estimait vendredi que "le système financier de l'Argentine pourrait être en faillite à court terme". Toute transaction intérieure deviendrait alors quasiment impossible. Fleuron du libéralisme américain, Moody's n'en conseille pas moins au gouvernement argentin de reconnaître l'insolvabilité des banques, puis de les nationaliser, de les recapitaliser et de les revendre.

Dans ce schéma, la classe moyenne argentine perdrait tout. Elle était pourtant la frange de la société la mieux disposée à l'égard du libéralisme économique prôné par les Etats-Unis. Sa désillusion inquiète d'autant plus Washington.

Quant aux sociétés de pays de l'Union européenne, qui contrôlent en Argentine la majorité des banques et des services publics privatisés, elles s'inquiètent désormais du ralentissement économique que la crise argentine commence à provoquer dans la région, notamment au Brésil et au Chili.

Un début d'effet domino boursier, que les experts estimaient pourtant improbable, est déjà perceptible à Sao Paulo et Santiago du Chili. Si la crise argentine devenait régionale, fût-ce partiellement, elle secouerait alors des investissements européens considérables et l'onde de choc traverserait l'Atlantique avec plus de force qu'aujourd'hui, frappant principalement l'Espagne, la France et l'Italie.

Sur un plan à la fois économique et politique, les Etats-Unis craignent encore qu'une non-assistance à l'Argentine en péril n'accentue les tentations protectionnistes et antiglobalisation du président Duhalde, ce qui menacerait la Zone de libre-échange des Amériques (ZLEA), dont Washington souhaite le lancement en janvier 2005.

La ZLEA fait hésiter le Brésil. Le Venezuela y est ouvertement hostile. Une attitude négative de l'Argentine signifierait que plus de la moitié de l'Amérique du Sud (en superficie, population et produit intérieur brut) pourrait rester en marge d'un projet qui, selon l'expression du président George W. Bush, contribuerait à faire de ce siècle "le siècle des Amériques".   

L'ensemble de ce diagnostic catastrophiste explique pourquoi, malgré le préalable d'un "plan économique cohérent" exigé de Buenos Aires par Washington, Bruxelles et le FMI, les Argentins croient qu'une une nouvelle aide financière de plusieurs milliards de dollars leur sera octroyée.

Mais existe-t-il encore en Argentine des structures politiques et financières capables de gérer cette aide?


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