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Seconde mort de Che Guevara...

Colombie: l'Europe condamne à son tour "la guérilla terroriste"

Par Christian Galloy

BOGOTA, samedi 23 février 2002 (LatinReporters.com) - C'est comme si Che Guevara, symbole romantique de la révolution, venait de mourir une seconde fois. Car l'offensive militaire sans précédent qui frappe depuis jeudi en Colombie la guérilla marxiste des FARC ne soulève que des applaudissements, parallèlement à quelques regrets et craintes humanitaires.

Pire encore pour les insurgés héritiers spirituels du "Che": les voilà traités de "terroristes" par des gouvernements européens d'ordinaire complaisants envers les révolutions dites de gauche. Le monde a donc vraiment changé depuis les attentats islamistes du 11 septembre dernier contre les Etats-Unis.

"L'Europe pense revoir sa politique envers les FARC" titrait vendredi le grand journal libéral colombien "El Tiempo". Comme la plupart des médias de Bogota, il citait Josep Piqué, ministre espagnol des Relations extérieures et président en exercice du Conseil des ministres de l'Union européenne.

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Justifiant la décision du président colombien Andres Pastrana de rompre les pourparlers de paix avec les FARC (Forces armées révolutionnaires de Colombie) et de lancer l'armée à la reconquête de l'enclave de 42.000 km2 cédée en novembre 1998 à cette guérilla dans l'espoir de mettre fin à près de 40 ans de guerre civile larvée, Josep Piqué déclarait jeudi à Madrid: "L'Union européenne doit revoir sa politique à l'égard des groupes armés en fonction de l'attitude de ces groupes. Les FARC ont démontré leur volonté nulle de paix, leur caractère terroriste et leurs liens avec le narcotrafic et je crois que nous devons agir en conséquence."

"Continuer à tuer, à kidnapper et à être impliqué dans le narcotrafic n'est pas compatible avec une volonté de paix" précisait le président du Conseil européen des ministres.

Josep Piqué approfondissait sa nouvelle perception du conflit colombien en ajoutant: "Je crois que dans les circonstances actuelles, le Plan Colombie est plus nécessaire que jamais". Le jugeant trop militariste, l'Union européenne s'est tenue jusqu'à présent à l'écart du Plan Colombie, financé essentiellement par les Etats-Unis. Ce plan est axé sur la lutte contre le narcotrafic par des moyens militaires, mais aussi par la promotion de cultures et d'activités alternatives qui aideraient les paysans colombiens à délaisser la coca, dont les feuilles sont la matière première de la cocaïne.

La "gauche plurielle" qui gouverne la France condamne elle aussi les FARC, confirmant ainsi qu'aucune révolution, fût-elle de gauche, n'est désormais respectable si elle méprise le droit humanitaire.

"Le rejet le plus ferme des actes de terrorisme qui ont miné (en Colombie) le processus de paix" était exprimé vendredi à Paris par Bernard Valero, porte-parole du ministère français des Relations extérieures. Mettant dans le même sac guérilla et paramilitaires d'extrême droite, le porte-parole exigeait "le respect du droit humanitaire international" et dénonçait "les enlèvements, attentats et crimes perpétrés par les groupes armés en Colombie", réclamant aussi aussi la libération de tous leurs otages, "entre eux le sénateur Gechem Turbay et les quatre autres parlementaires détenus par les FARC".

Jorge Eduardo Gechem Turbay, président de la Commission de paix du sénat colombien, fut enlevé mercredi par les FARC, après le détournement par des guérilleros de l'avion de lignes intérieures dans lequel il voyageait. Cette action et plus de cent attentats terroristes à l'explosif perpétrés par les FARC en à peine trente jours décidèrent le président Pastrana à rompre les pourparlers de paix et à déclencher jeudi contre la guérilla marxiste l'une des plus vastes offensives militaires de l'histoire de la Colombie.

En rejetant les FARC dans la catégorie des mouvements terroristes, l'Union européenne donne raison aux Etats-Unis. Cette guérilla figure en effet depuis 1998 sur la liste des organisations terroristes internationales dressée par Washington.

Désormais marginalisées sur le plan international comme dans leur propre pays (un sondage révélant que 95% des Colombiens approuvent la rupture des pourparlers de paix avec la guérilla), les FARC semblent avoir perdu leur guerre sur le plan moral.

Sur le plan militaire, la guérilla se relèvera difficilement de la perte de son enclave de 42.000 km2. Depuis 1998, elle y recevait les armes achetées sur les marchés parallèles et y organisait l'exportation de cocaïne, principale source de financement des FARC.  L'enclave, dont le président Pastrana avait retiré armée et police, servait aussi à la guérilla de camp d'entraînement, de dépôt de munitions, de prison pour civils (y compris femmes et enfants) enlevés contre rançon et de tremplin pour des offensives contre diverses régions de Colombie.

Avec leurs 17.000 combattants, dont plusieurs milliers d'adolescents mineurs parfois recrutés sous la menace, les FARC conservent la capacité de perpétrer des attentats et de mener des attaques ponctuelles. Mais, désormais, la communauté internationale, comme les Colombiens, considérera leurs actions comme terroristes. L'image d'une prétendue révolution populaire est définitivement brisée.


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