Unique objet du VIe Congrès du PC cubain, en avril 2011
Cuba : texte du projet économique et social de Raul Castro
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En présence du président vénézuélien Hugo
Chavez (à gauche), en visite à La Havane pour le 10e anniversaire
de l'Accord intégral de coopération Cuba-Venezuela, le président Raul
Castro (centre) annonce le 8 novembre la convocation du VIe Congrès du PC cubain
pour la 2e quinzaine d'avril 2011. La "bataille économique" en sera
l'unique objet. AIN photo, Sergio Abel Reyes, sdl |
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LA HAVANE, vendredi 12 novembre 2010 (LatinReporters.com) - "Le seul et unique thème" du VIe Congrès
du Parti communiste de Cuba (PCC), en avril 2011, sera "la bataille économique"
affirmait en début de semaine le président Raul Castro. Le
PCC, dont Fidel Castro (frère de Raul) demeure le premier secrétaire,
aura alors pour seule tâche d'approuver le " Projet des grandes lignes
de la politique économique et sociale", soumis à un débat
national jusqu'au 28 février 2011.
Raul Castro préside la Commission chargée de la politique économique
qui a élaboré ce projet contenant 291 propositions. Il est
disponible à Cuba sous forme de brochure, au prix de quelques centimes dans les bureaux
de poste et chez les marchands de journaux. LatinReporters en relève
ci-dessous des extraits qui témoignent d'une volonté de corriger
le modèle économique cubain ou qui marquent les limites fixées
actuellement à cette évolution, appelée officiellement à La Havane
"actualisation du socialisme".
Le "socialisme", la "planification" et "l'entreprise socialiste d'Etat" domineront,
mais le marché, avec ses prix liés à l'offre et à
la demande, est reconnu comme agent économique et social. Il faudra
évaluer l'ampleur réelle de ce virage avant de croire à
une révolution de la Révolution. On notera aussi, dans le projet,
une distinction entre l'égalité des chances et l'égalitarisme.
Ce dernier est rejeté, comme dans le modèle social-démocrate
européen. Le projet va jusqu'à admettre que l'évolution
proposée créera entre les citoyens des "inégalités"
que devrait "atténuer" une nouvelle fiscalité.
Le 13 septembre dernier, la Centrale des travailleurs de Cuba (CTC), unique
syndicat officiel de l'île, avait annoncé la suppression de
500.000 emplois publics avant la fin avril 2011, la privatisation d'activités
professionnelles qu'exerceront des indépendants ayant accès
au crédit, l'extension des coopératives au-delà du secteur
agricole et un nouveau système fiscal.
Le 24 septembre, le régime cubain donnait son feu vert, selon le quotidien
Granma, organe officiel du Parti communiste, à la location de maisons
payée en dollars et à l'embauche d'employés dans
des petits commerces. Ces réformes inédites visent, comme
les nouvelles ouvertures aux commerces indépendants et à l'activité
des coopératives, à compenser le licenciement annoncé
de 500.000 salariés du secteur public.
Le 25 octobre, le gouvernement de Raul Castro annonçait le prélèvement
d'un impôt allant jusqu'à 50% des revenus pour les petits
entrepreneurs privés.
L'adoption en avril 2011 par le VIe Congrès du PCC du "Projet des
grandes lignes de la politique économique et sociale" donnera un cadre
global à cette évolution dont le Commandant suprême de
la Révolution, Fidel Castro, reconnaissait sans doute la nécessité
en prononçant début septembre sa fameuse phrase controversée
"Le modèle cubain ne fonctionne même plus pour nous".
Extraits du "Projet des grandes lignes de la politique économique et sociale"
[ Texte intégral de ses 291 propositions; 32 pages pdf en espagnol ]
• "La bataille économique
constitue aujourd'hui, plus que jamais, la tâche principale et le
centre du travail idéologique des cadres, car d'elle dépend
le caractère durable et la préservation de notre système
social". (Phrase de Raul Castro en avant-propos, page 1)
• Accroître la productivité du travail, élever la
discipline et le niveau de motivation du salaire et les stimulants, éliminant
l'égalitarisme des mécanismes de distribution et de redistribution
du revenu. Comme élément de ce processus, il sera nécessaire
de supprimer des gratuités indues et des subsides personnels excessifs.
(Page 6, avant-dernier paragraphe)
• La politique économique dans la nouvelle étape correspondra
au principe que seul le socialisme est capable de vaincre les difficultés
et de préserver les conquêtes de la Révolution et que
dans l'actualisation du modèle économique primera la planification
et non le marché.
Dans la politique économique proposée, le socialisme est
l'égalité des droits et l'égalité des chances
pour tous les citoyens, mais non l'égalitarisme. Le travail est à
la fois un droit et un devoir, un motif de réalisation personnelle
pour chaque citoyen, et il devra être rémunéré
conformément à sa quantité et qualité. (Page
7, sous le titre "Lineamientos...")
• Le modèle de gestion doit reconnaître et stimuler -outre
l'entreprise socialiste d'Etat, qui occupe la première place dans l'économie
nationale- les entreprises à capital mixte, les coopératives,
les usufruitiers de terres, les bailleurs d'établissements, les travailleurs
indépendants et d'autres formes qui pourraient contribuer à
élever l'efficience du travail social. (Page 8, point 2)
• On développera des marchés approvisionnant à prix
de gros et sans subsides le système d'entreprises budgétisé,
les coopérativistes, les bailleurs, les usufruitiers et les travailleurs
indépendants. (Page 8, point 9)
• Les entreprises d'Etat qui montrent de manière soutenue dans leurs
bilans financiers des pertes, un capital de travail insuffisant, qui ne
peuvent pas honorer avec leurs actifs les engagements contractés
ou dont les audits financiers sont négatifs seront soumises à
un processus de liquidation. (Page 9, point 16)
• Les revenus des travailleurs des entreprises d'Etat seront liés
aux résultats finaux obtenus. (Page 9, point 19)
• Les coopératives seront basées sur la libre disposition
des travailleurs à s'associer en leur sein. Elles pourront être
propriétaires des moyens de production, les louer ou les utiliser
en usufruit permanent. (Page 9, point 25)
• Etudier les taux d'intérêt des comptes d'épargne,
la création de comptes de capitalisation et d'épargne à
fin spécifique et l'accès aux crédits personnels pour
l'achat de biens et de services.
Offrir les services bancaires nécessaires incluant l'octroi de crédits
au secteur de l'économie ne relevant pas de l'Etat pour contribuer
à son fonctionnement adéquat. (Page 12, points 50 et 51)
• Le système d'imposition se basera sur les principes de généralité
et d'équité de la charge fiscale. De plus grandes charges grèveront
les revenus les plus élevés pour contribuer à atténuer
les inégalités entre les citoyens. (Page 12, point 57)
• [En matière d'intégration économique] Donner priorité
à la participation à l'Alliance Bolivarienne pour les Peuples
de Notre Amérique (ALBA) et travailler avec célérité
et intensément à la coordination, coopération et complémentarité
économique à court, moyen et long terme afin d'atteindre et
d'approfondir les objectifs économiques, sociaux et politiques qu'elle
promeut.
Poursuivre la participation active à l'intégration économique
avec l'Amérique latine et les Caraïbes, comme objectif stratégique.
(Page 16, points 107 et 108)
• Diminuer la participation relative du budget de l'Etat au financement de
la sécurité sociale, qui continuera à croître
en fonction de l'augmentation du nombre de personnes retraitées, ce
qui rend nécessaire de continuer à élargir la contribution
des travailleurs du secteur étatique et l'application de régimes
spéciaux de contribution dans le secteur ne relevant pas de l'Etat.
(Page 21, point 154)
• Pour les augmentations de salaire, donner la priorité aux postes
de travail qui génèrent des revenus en devises ou permettent
d'épargner celles-ci, qui produisent des aliments et d'autres
biens de consommation indispensables et qui contribuent au développement du processus
d'investissement. (Page 21, point 157)
• Modifier la structure de l'emploi, réduire les effectifs enflés
et accroître le travail dans le secteur non-étatique. Pour cela,
il faut élargir le travail indépendant et son utilisation comme
une alternative de plus pour l'emploi, contribuant à élever
l'offre de biens et de services. (Page 21, point 158)
• Renforcer le rôle du salaire dans la société, ce
qui rendra nécessaire de réduire des gratuités indues
et des subsides personnels excessifs, avec des compensations aux personnes
dans la nécessité.
Eliminer de façon ordonnée le carnet d'alimentation en
tant que mode de distribution normalisée, égalitaire et à
prix subventionnés, qui favorise tant le citoyen dans la nécessité
que celui qui ne l'est pas, induit les personnes à des pratiques
de troc et de revente et favorise un marché souterrain. (Pages 21 et 22,
points 161 et 162)
• Obtenir que la remise de terres en usufruit favorise des résultats
productifs comparables aux résultats actuels du secteur coopératif
et paysan, dans lequel le producteur ne sera pas salarié et dépendra
de ses revenus. Le prix de la majorité des produits répondra
à l'offre et la demande et, comme norme, il n'y aura pas de subsides.
(Page 23, point 177)
• [Tourisme]. L'objectif fondamental du secteur est la captation de devises
fraîches, avec une position compétitive sur le marché.
(...) Diversifier les offres complémentaires de logement avec de nouvelles
options la distinguant [la politique touristique] de la concurrence, notamment en ce qui concerne
les activités marines, nautiques, le golf et l'immobilier,
le tourisme d'aventure et écologique, les parc thématiques,
les croisières, la culture et le patrimoine et le tourisme médical.
(Page 28, points 235 et 239)
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