MADRID, dimanche 19 septembre 2010 (LatinReporters.com) -
Relevant qu'au cours des 20 dernières années plusieurs
"nouveaux Etats
ont surgi au coeur de l'Europe et ont trouvé l'acceptation internationale",
l'organisation indépendantiste basque ETA sollicite dans un communiqué
la médiation de la communauté internationale, l'appelant à
"impulser et participer à la structuration d'un processus démocratique"
qui déboucherait sur la solution négociée du
"conflit
séculaire" basque.
"L'ETA tente de faire pression sur le gouvernement [espagnol] en faisant
appel à des médiateurs internationaux" titre dimanche l'influent
quotidien de centre gauche El Pais. Des sources proches du gouvernement socialiste
de José Luis Rodriguez Zapatero ont toutefois rapidement indiqué
que
"ce n'est pas le moment des communiqués, aucun communiqué
ne servira à rien", car la seule chose que doit faire l'ETA est
"abandonner son activité armée et se dissoudre".
Gouvernement, opposition et la majorité des éditorialistes
avaient reçu avec le même scepticisme et la même exigence
d'un adieu définitif aux armes l'annonce, deux semaines plus tôt
par l'ETA, d'un cessez-le-feu unilatéral d'une durée non précisée,
assorti d'un appel à une nouvelle négociation avec Madrid.
Selon le ministre espagnol de l'Intérieur, le socialiste Alfredo Perez
Rubalcaba, la trêve actuelle de l'ETA s'inscrirait dans la tentative
de sa branche politique interdite, Batasuna, de retrouver le droit légal
de briguer des dizaines de mairies basques et navarraises aux élections
municipales de mai 2011.
Résumé samedi, puis publié intégralement dimanche
19 septembre par le journal basque Gara, le nouveau communiqué de
l'ETA s'adresse plus particulièrement aux signataires de la Déclaration
de Bruxelles du 29 mars 2010. Celle-ci demandait à l'ETA de déclarer
"un cessez-le-feu permanent et complètement vérifiable"
et au gouvernement espagnol d'y
"répondre adéquatement"
afin d'aboutir à une
"paix durable" qui mettrait fin à
"l'ultime conflit en Europe".
Avalisée par vingt-et-une signatures, dont celles de la Fondation Nelson
Mandela, de quatre Prix Nobel de la Paix (Desmond Tutu, Frederik W. De Klerk,
John Hume, Betty Williams), de l'ex-présidente irlandaise Mary Robinson,
de l'ancien Premier ministre irlandais Albert Reynolds et d'un ancien chef
de cabinet de Tony Blair, Jonathan Powell, la Déclaration de Bruxelles
fut présentée au siège bruxellois du Parlement européen
par l'avocat sud-africain Brian Currin, médiateur dans les conflits
d'Irlande du Nord et d'Afrique du Sud et assesseur de la gauche indépendantiste
basque proche de l'ETA.
Exprimant dans leur nouveau communiqué leur respect envers les signataires
de la Déclaration de Bruxelles, les séparatistes se disent
"disposés à étudier de façon conjointe les
pas nécessaires au processus démocratique, y compris les engagements
que doit prendre l'ETA". L'organisation armée invite en fait ainsi
les illustres signataires à s'asseoir avec elle autour d'une table
pour analyser leur demande d'un cessez-le-feu permanent et vérifiable
et la réponse adéquate qu'on pourrait en attendre de Madrid.
Des analystes relèvent que la concrétisation de cette proposition
de l'ETA exposerait le gouvernement de José Luis Rodriguez Zapatero
à une forte pression politique et médiatique internationale,
mettant à l'épreuve son refus proclamé de rouvrir le
dialogue avec l'ETA après l'échec de plusieurs mois de négociations
en 2006.
Les mêmes analystes soulignent que dans les cycles attentats-trêve-négociation
qui caractérisent la stratégie de l'ETA, la négociation,
que veut donc relancer aujourd'hui l'organisation armée, est l'étape
la plus importante. C'est en effet logiquement d'une négociation,
mais non d'une impossible victoire militaire, que l'ETA espère obtenir
un jour la reconnaissance par l'Espagne du droit des Basques à l'autodétermination,
assorti des moyens d'exercer ce droit.
M. Zapatero ouvrit la voie à l'internationalisation du dossier basque
En 2006, M. Zapatero, très critiqué sur ce point par l'opposition
conservatrice, sembla plus enclin que ses prédécesseurs à
faire des concessions politiques à l'ETA. Le leader socialiste offrit
à l'époque aux indépendantistes une respectabilité
internationale inédite quoique passagère, faisant voter le
25 octobre 2006 au Parlement européen, sur le score étriqué
de 321 oui contre 311 non et 24 abstentions, une résolution appuyant
les négociations alors en cours entre Madrid et l'ETA.
Pour tenter de désarmer en Espagne la vive opposition à ces
négociations, le président du gouvernement espagnol avait donc
lui-même ouvert la voie à une internationalisation du dossier
basque dépassant largement la traditionnelle coopération policière
hispano-française. Cela explique sans doute pourquoi la Déclaration
de Bruxelles, jamais avalisée par Madrid qui ne l'anathématise
pourtant pas, put être présentée le 29 mars dernier dans
l'enceinte du Parlement européen, en dépit de l'étiquette
de terroriste que les 27 pays de l'Union européenne collent sur l'ETA,
au nom de personnalités dont certaines furent probablement associées
aux négociations frustrées de 2006.
L'eurodéputé et ex-ministre de l'Intérieur espagnol
Jaime Mayor Oreja, chef de file des eurodéputés espagnols du
Parti Populaire, a affirmé à plusieurs reprises, malgré
les démentis officiels, que des négociations sont actuellement
en cours entre l'ETA et des émissaires de M. Zapatero.
Il est vrai que, terrassé dans les sondages pour sa gestion jugée
catastrophique de la crise économique, le chef du gouvernement espagnol
remettrait plus facilement en selle son Parti socialiste si l'ETA abandonnait
définitivement les armes avant les élections législatives du début
2012. Mais il est vrai aussi que les succès actuels de l'option policière
contre les indépendantistes sont applaudis par la majorité
des Espagnols.
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