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Haïti: la France a lâché le président Aristide

Texte intégral de la déclaration de Dominique de Villepin, ministre français des Affaires étrangères

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PARIS, jeudi 26 février 2004 (LatinReporters.com) - "Le Président Aristide porte une lourde responsabilité dans la situation actuelle. Il lui appartient d'en tirer les conséquences... Chacun voit bien qu'il s'agit d'ouvrir une nouvelle page dans l'histoire d'Haïti..." affirme le chef de la diplomatie française, Dominique de Villepin, dans une déclaration écrite diffusée mercredi à Paris par le ministère des Affaires étrangères.

Le président Jacques Chirac avait estimé la veille qu'Haïti était gouvernée "depuis bien longtemps de manière désastreuse". La France ne soutient donc plus le président haïtien Jean-Bertrand Aristide face à la rébellion qui encerclait jeudi la capitale, Port-au-Prince.

La déclaration ministérielle qualifie l'administration du président Aristide de "régime aujourd'hui dans l'impasse qui s'est déjà affranchi de la légalité constitutionnelle." Pour "sortir de l'impasse actuelle", Dominique de Villepin propose une initiative en plusieurs points, dont la "mise en place immédiate d'une force internationale civile de paix chargée d'assurer le retour à l'ordre public" en Haïti. Une telle force pourrait difficilement être déployée sans l'accord des Etats-Unis qui, jeudi, prenaient également leurs distances à l'égard du président Aristide.

Voici le texte intégral de la déclaration de Dominique de Villepin, telle que diffusée par son ministère, phrases et mots en gras y compris.


Déclaration du ministre des Affaires étrangères sur la situation en Haïti
(Paris, le 25 février 2004)

La situation en Haïti ne cesse de se détériorer.

Une course de vitesse est engagée entre les partisans de la violence et ceux qui espèrent encore une solution pacifique. C'est bien aujourd'hui le risque du chaos qui menace Haïti. Le devoir de la communauté internationale est d'assumer toute sa responsabilité pour préserver ce pays du désordre et de la violence.

Je me suis entretenu à plusieurs reprises, hier et aujourd'hui, avec Colin Powell, d'autres collègues étrangers et plusieurs responsables politiques haïtiens. J'aurai en principe vendredi des rencontres à Paris avec des représentants des deux parties. La voie est étroite car il nous faut à la fois prendre en compte le respect des principes démocratiques et constitutionnels, refusant que la force pure puisse avoir le dernier mot, et faire face à la réalité telle qu'elle est, un régime aujourd'hui dans l'impasse qui s'est déjà affranchi de la légalité constitutionnelle.

Dans ce contexte, quel doit être l'objectif de la communauté internationale ? Il s'agit de définir une solution politique qui rassemble toutes les forces du pays qui refusent le retour aux temps les plus sombres.

Pour y parvenir, la meilleure formule demeure la mise en place d'un gouvernement d'union nationale de transition présidé par un Premier ministre désigné, selon le plan d'action de la caricom. Mais pour sortir de l'impasse actuelle, il faut relancer le processus politique en accélérant le calendrier : c'est pourquoi, si ce gouvernement de transition, représentant d'une large majorité nationale, décidait de procéder avant l'été aux consultations électorales qui s'imposent, la France lui apporterait le soutien nécessaire.

La France est prête à prendre toute sa part dans l'effort de mobilisation internationale. Elle propose à ce titre une initiative qui prolonge le plan d'action de la caricom. Celle-ci s'articulerait autour des points suivants :

  • mise en place immédiate d'une force civile de paix. Cette force internationale sera chargée d'assurer le retour à l'ordre public et d'accompagner l'action sur le terrain de la communauté internationale. Elle viendrait à l'appui d'un gouvernement d'union nationale.
  • assistance internationale pour préparer l'élection présidentielle à travers la mise en place d'une commission électorale, l'établissement de listes électorales régulières, et l'organisation de missions d'observation internationales.
  • acheminement d'une aide humanitaire internationale
  • envoi de missions d'observateurs des droits de l'homme
  • engagement à long terme pour une aide internationale à la reconstruction économique et sociale du pays.
L'ensemble de ce dispositif devrait être légitimé et mis en œuvre par la communauté internationale :
nos propositions pourraient être soumises à l'OEA et la caricom et le plan ainsi renforcé serait alors transmis aux Nations Unies pour être adopté par le Conseil de sécurité.
Il appartiendra alors au Secrétaire Général des Nations Unies de nommer un représentant spécial. Il serait chargé de la mise en œuvre sur le terrain et plus particulièrement de la coordination des différentes organisations qui seront amenées à intervenir (Croix Rouge, Commission des Droits de l'Homme, ONG…).
Cette mobilisation internationale pourrait mettre en jeu à la fois les organisations régionales (OEA, caricom), les différents organes des Nations Unies ou encore l'Union européenne.

Aujourd'hui à Haïti, la menace d'une aggravation de la violence est réelle. Il n'y a pas pour autant de fatalité. Alors que trop de sang a déjà coulé, nous devons interrompre cet engrenage.
C'est pourquoi la France appelle aujourd'hui chacun au sursaut :
- les églises ont un rôle important à jouer ; nous les invitons à renouveler leurs efforts ;
- l'opposition politique doit ouvrir une nouvelle phase de négociations.

Quant au Président Aristide, il porte une lourde responsabilité dans la situation actuelle. Il lui appartient d'en tirer les conséquences dans le respect du droit. C'est sa décision, c'est sa responsabilité. Chacun voit bien qu'il s'agit d'ouvrir une nouvelle page dans l'histoire d'Haïti, et cela, dans la dignité et le respect de l'intégrité de tous les protagonistes.

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