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Vidéo et texte intégral
Obama président: discours d'investiture et réactions (Amérique latine et Espagne)
MADRID, jeudi 22 janvier 2009 (LatinReporters.com) - A l'exception notable
du Venezuela officiel de Hugo Chavez, les présidents et gouvernements
d'Amérique latine saluent avec optimisme, ainsi que l'Espagne, le discours
d'investiture prononcé le 20 janvier à Washington devant quelque
deux millions de personnes par le premier président noir des Etats-Unis,
Barack Obama, sur l'honnêteté duquel Fidel Castro dit n'avoir
"aucun doute".
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Aux côtés de sa nouvelle définition de la sécurité,
qu'il faudrait lier aux grands idéaux, de son appel à la surveillance
du marché, de sa profession de foi dans les énergies renouvelables,
de sa confirmation d'un prochain désengagement militaire des Etats-Unis
en Irak et d'une offre de respect mutuel adressée au monde musulman,
Barack Obama a pourtant pu irriter plus d'un régime latino-américain,
en particulier ceux de la gauche radicale (Cuba, Venezuela, Bolivie, Nicaragua,
Equateur), en affirmant que la capacité du marché à
générer la richesse et à étendre la liberté
est sans égale, en désignant comme ennemis historiques tant
le communisme que le fascisme et en plaçant "du mauvais côté
de l'histoire" ceux qui musèlent leurs dissidents ou font reposer
sur l'Occident les maux de leur société.
Comme nous l'avons fait pour son discours
de la victoire prononcé le 4 novembre 2008 à Chicago au soir de l'élection
présidentielle, LatinReporters facilite l'accès à la
vidéo et au texte intégral du discours d'investiture de Barack Obama, désormais
44e président des Etats-Unis.
Nous relevons aussi, précédant celles recueillies en ESPAGNE,
les principales réactions officielles dans des pays significatifs
de la gauche latino-américaine radicale ou modérée:
CUBA, VENEZUELA, BOLIVIE, ARGENTINE et BRÉSIL.
Quant aux Latino-Américains vivant aux Etats-Unis, leur souhait majoritaire
est que Barack Obama légalise par une réforme migratoire plus
de 12 millions d'immigrés sans papiers d'identité, en majorité
mexicains, et en finisse avec les rafles policières et les rapatriements
forcés qu'ils subissent.
CUBA - Fidel Castro: "Aucun doute sur l'honnêteté d'Obama,
mais..."
Dans un article daté du 21 janvier publié par la presse
officielle cubaine et dédié à la visite à Cuba
de la présidente de l'Argentine, Cristina Kirchner, l'ex-président
cubain Fidel Castro écrit: "En parlant des Etats-Unis, j'ai signalé
a Cristina l'importance historique pour Cuba que hier à 12h [moment
de l'investiture de Barack Obama; ndlr] dix présidents aient défilé
en 50 ans, au cours desquels, malgré l'immense pouvoir de ce pays [les
Etats-Unis], ils n'avaient pas pu détruire la Révolution cubaine.
J'ai dit [à Cristina Kirchner] que je n'avais personnellement aucun
doute sur l'honnêteté avec laquelle Obama, onzième président
[des Etats-Unis] depuis le 1er janvier 1959 [date du triomphe de la révolution
cubaine], exprimait ses idées, mais que malgré ses nobles intentions
de nombreuses questions demeuraient sans réponse. A titre d'exemple,
je me demandais: comment un système gaspilleur et consommateur par
excellence pourrait-il préserver l'environnement?"
Raul Castro, frère et successeur à la présidence de
Fidel hospitalisé depuis juillet 2006, voit pour sa part en Barack
Obama "un homme bon" et il lui a souhaité "bonne chance".
Le discours d'Obama a été très applaudi par des représentants
de la dissidence cubaine qui l'ont vu en direct grâce à une invitation
du Bureau des intérêts des Etats-Unis à La Havane. Elizardo
Sanchez, dirigeant de la Commission cubaine des droits de l'homme, estime
que Barack Obama a lancé "des avertissements clairs" à Cuba
sans citer ce pays, notamment en critiquant ceux qui bâillonnent les
opinions dissidentes.
"Je recommanderais à tous les Cubains et en particulier aux autorités
cubaines de lire et de méditer le discours [de Barack Obama]" a commenté,
en s'avouant "très remué" et émotionné", l'économiste
Oscar Espinosa, l'un des 75 dissidents incarcérés en 2003
et aujourd'hui en liberté conditionnée pour raison de santé.
Dans les rues de La Havane, des Cubains anonymes se demandent si Barack
Obama lèvera, ou pour le moins allégera comme il l'avait suggéré
lors de sa campagne électorale, l'embargo commercial et financier imposé
par les Etats-Unis contre Cuba depuis 1962.
Voir aussi "Obama, Fidel Castro, sa
mort et une photo qui la dément à nouveau".
VENEZUELA - Hugo Chavez: "Que personne ne se fasse d'illusions"
Se déclarant satisfait de la fin de l'ère de George W. Bush,
qu'il a accusé d'avoir semé dans le monde "la terreur et la
violence", Hugo Chavez, président du Venezuela et allié du régime
communiste cubain, a émis l'espoir que l'avènement de Barack
Obama produise "un changement réel dans les relations des Etats-Unis
avec les pays du Tiers-Monde". Il a néanmoins ajouté: "Que
personne ici ne se fasse d'illusions, car il s'agit de l'empire nord-américain".
"Indépendamment de qui gouverne les Etats-Unis, la révolution
bolivarienne continuera à aller de l'avant et à construire l'indépendance
nationale du Venezuela" a affirmé le président Chavez.
Le ministre vénézuélien des Affaires étrangères,
Nicolas Maduro, a saisi l'occasion de l'investiture du nouveau président
américain pour le prier de "rectifier" de récentes déclarations
dans lesquelles, selon Hugo Chavez, Barack Obama a accusé le Venezuela
d'être un facteur négatif dans la région et d'appuyer
des groupes terroristes tels que la guérilla des Forces armées
révolutionnaires de Colombie (FARC, marxistes).
Aux yeux de Nicolas Maduro, ces déclarations de Barack Obama s'inscrivent
"dans le même schéma que celui imposé par le clan Bush".
Le ministre estime insolite d'accuser le Venezuela de soutenir le terrorisme
alors que le déjà ex-président américain George W. Bush a laissé
en Irak "un million de morts", a créé des "prisons clandestines
où l'on torture et on assassine" et a coopéré au "massacre"
du peuple palestinien à Gaza.
BOLIVIE - Evo Morales salue avec optimisme le "frère noir"
Comme le président cubain Raul Castro, l'Amérindien Evo Morales,
président socialiste de la Bolivie, a souhaité "bonne chance"
à Barack Obama, avec l'espoir mêlé d'optimisme "qu'il
puisse garantir un changement profond" de la politique des Etats-Unis et "résoudre
les affrontements et guerres provoquées par l'ex-président
Bush".
"Pour la première fois aux Etats-Unis, un frère noir a gagné
les élections démocratiquement. Je sens que le monde commence
à changer" a commenté Evo Morales. Il a relevé que "les
indigènes d'Amérique latine et ceux qu'on appelle les Afro-Américains
ont été soumis à l'esclavage et à la discrimination
au cours de l'histoire".
"J'ai grand espoir qu'avec le nouveau président des Etats-Unis les
relations diplomatiques s'amélioreront" a affirmé le président
Morales, se déclarant disposé "à travailler ensemble,
sans conditionnement ni imposition de politiques".
Socialiste radical proche des frères Castro et de Hugo Chavez, Evo Morales avait
expulsé en septembre dernier l'ambassadeur des Etats-Unis en Bolivie, Philip Goldberg,
l'accusant de conspiration contre l'unité du pays. Washington expulsa
à son tour l'ambassadeur bolivien et supprima d'importants abattements
de droits de douane dont bénéficiait l'importation de produits
boliviens.
Le ministre bolivien des Affaires étrangères, David Choquehuanca,
a pour sa part salué le changement "historique" que signifie l'investiture
de Barack Obama, qui "représente un espoir non seulement pour le peuple
nord-américain, mais aussi pour tous les pays du monde".
ARGENTINE - Cristina Kirchner: "Confirmation des bonnes expectatives"
Le discours d'investiture de Barack Obama est "positif" et "confirme les
bonnes expectatives" qu'il a soulevées a déclaré le
20 janvier la péroniste de gauche et présidente de l'Argentine,
Cristina Kirchner, alors en visite officielle à Cuba. Elle a souligné
"par-dessus tout" le passage du discours dans lequel le nouveau président
des Etats-Unis a constaté, dit-elle, "que le monde a changé
et que personne ne peut l'ignorer".
"Que la sécurité ne puisse pas s'obtenir aux dépens
des idéaux dans un monde où au nom de la sécurité
se sont produites des invasions, des attaques, des violations de souverainetés
nationales, est un élément hautement positif" des paroles de
Barack Obama a ajouté la présidente argentine. Elle a apprécié
aussi "d'entendre dire que le marché est générateur
de richesses, mais qu'il agit souvent de manière irresponsable et qu'il
est donc nécessaire de le surveiller et de le contrôler".
Quant au ministre argentin des Relations extérieures, Jorge Taiana,
il s'est déclaré confiant que l'arrivée d'Obama à
la Maison blanche "se traduira" par "davantage de multilatéralisme",
"davantage d'économie réelle" et un dialogue "franc et horizontal"
avec l'Amérique latine.
BRÉSIL - Lula da Silva: "Trouver des solutions urgentes à
la crise financière"
Le président du Brésil, le socialiste modéré
Luiz Inacio Lula da Silva, a félicité Barack Obama et a souligné
les objectifs communs et les similitudes entre leurs deux pays "multiethniques,
démocratiques et d'une grande diversité culturelle". Le chef
d'Etat brésilien, qui réclame depuis longtemps, comme la plupart de ses
homologues de la région, la levée de l'embargo américain contre Cuba, affirme partager avec Barack Obama l'intention de rechercher des solutions politiques,
dans une perspective multilatérale, "aux grands problèmes qui
menacent la sécurité collective" mondiale.
"Je partage également son souci de trouver des solutions urgentes
et profondes permettant d'affronter la grave crise financière et
économique née dans le monde développé et qui
menace les pays en développement", a ajouté le président
Lula da Silva. Selon lui, on ne peut pas admettre que soit "frustré
l'effort de dizaines de millions d'hommes et de femmes" qui, au Brésil
et dans le reste de l'Amérique latine, ont "reconstruit" ces dernières
années leur économie, bénéficiant "d'indéniables
progrès sociaux et politiques".
ESPAGNE - Zapatero: "Identité social-démocrate très
pure"
Le président du gouvernement socialiste espagnol, José Luis
Rodriguez Zapatero, a exprimé sa satisfaction pour le "signe d'identité
social-démocrate très pure" qu'il décèle dans
le discours d'investiture de Barack Obama. Il lui a offert son appui, estimant
que l'espoir de paix et de dialogue que fait surgir le nouveau président
américain est "une opportunité que nous n'allons pas perdre".
M. Zapatero a souligné l'appel de Barack Obama à une nouvelle
relation avec le monde musulman et a loué sa nouvelle vision de l'ordre
international qui, précise-t-il, met "le pouvoir des idées au-dessus de la force,
sans renoncer à elle".
Le dirigeant socialiste espagnol s'est dit intéressé à
construire avec la nouvelle administration américaine "une entente
et une action commune" non pas "vers" ni "pour", mais plutôt "avec"
l'Amérique Latine, que M. Zapatero a qualifiée de "très
importante" pour les Etats-Unis et l'Espagne.
Selon le ministre espagnol des Affaires extérieures, Miguel Angel
Moratinos, une rencontre bilatérale aura lieu en 2009 entre Barack
Obama et José Luis Rodriguez Zapatero. Ce dernier, au pouvoir depuis
avril 2004, n'a jamais eu le moindre entretien en tête-à-tête
avec George W. Bush. Les modalités expéditives du retrait, dès
avril 2004, des militaires espagnols dépêchés en Irak, sans respecter
le délai initialement annoncé par M. Zapatero et sans coordination avec les
alliés, avaient irrité Washington autant sinon davantage que le retrait
lui-même.
Sans exclure ni affirmer que l'Espagne pourrait accueillir des islamistes
détenus sur la base américaine de Guantanamo (Cuba) afin d'aider
Barack Obama à mettre fin à leur détention jugée
illégale par divers gouvernements et organismes internationaux, le
ministre Moratinos a indiqué qu'il faut analyser "cas pas cas" la situation
de ces prisonniers avant d'étudier l'accueil éventuel de l'un
ou l'autre d'entre eux.
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