SAN SALVADOR, lundi 12 mars 2012 (LatinReporters.com) - En remportant dimanche les élections législatives au Salvador,
l'Alliance républicaine nationaliste (ARENA, droite) a réduit
la marge de gouvernance du premier président de gauche de l'histoire
du pays, l'ex-journaliste Mauricio Funes, dont le mandat de cinq ans court
jusqu'en 2014.
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Le président salvadorien Mauricio Funes dans le bureau où il
a voté, le 11 mars 2012 à San Salvador. (Photo Presidencia) |
Si elle n'est pas élargie, l'alliance parlementaire sur laquelle
s'appuie le Front Farabundo Marti de libération nationale (FMLN) du
président Funes risque de ne plus contrôler
l'Assemblée législative, le Parlement monocaméral
que les électeurs salvadoriens renouvellent tous les trois ans.
Au pouvoir pendant vingt ans avant de perdre en 2009 la présidence
du pays et la primauté parlementaire conquises alors par le FMLN
issu de l'ex-guérilla du même nom, l'ARENA réussit aujourd'hui
un come-back partiel d'autant plus remarqué qu'elle conserve la très
convoitée mairie de la capitale, San Salvador, aux élections
municipales simultanées aux législatives. Quasi deux tiers des électeurs de la ville
ont plébiscité pour un nouveau mandat le candidat de la droite,
le maire sortant Norman Quijano.
Après dépouillement de 95% des bulletins du vote législatif, l'ARENA
est créditée par le Tribunal suprême électoral
de 39,72% des suffrages et de 33 des 84 députés de l'Assemblée,
contre 38,55% et 32 élus en 2009. Le FMLN présidentiel obtient
lui 36,86% des voix et 31 députés, soit une baisse très
sensible par rapport aux 42,60% et 35 parlementaires obtenus il y a trois
ans.
Retrouvant ainsi son statut de premier parti national, l'ARENA assumera
la présidence de l'Assemblée législative. "Nous remercions
les électeurs de leur confiance qui a assuré notre victoire
et notre maintien à la mairie de San Salvador" s'est exclamé
le leader de l'ARENA, l'homme d'affaires et ex-président salvadorien
Alfredo Cristiani. On entendit alors repris en choeur au siège du
parti le slogan habituel de l'ARENA ; "Patrie oui, communisme non !".
Le président Funes relève pourtant de la gauche modérée,
préférant la social-démocratie brésilienne à
la révolution bolivarienne du Vénézuélien Hugo
Chavez. Il bénéficie d'ailleurs de l'appui parlementaire de
la GANA (Grande alliance pour l'unité nationale), un parti de droite
né en janvier 2010 d'une dissidence de l'ARENA. L'alliance FMLN-GANA,
qui rassemblait 49 parlementaires avant les législatives de dimanche,
n'en comptera plus que 42, soit exactement un de moins que la majorité
absolue. L'appoint probable de l'unique député du Changement
démocratique (CD, gauche modérée) rassurerait néanmoins
le chef de l'État.
Présidentielle en mars 2014
Les observateurs électoraux nationaux et internationaux applaudissent
l'ordre et le calme qui ont entouré le double scrutin, législatif et
municipal, considéré par divers analystes comme un test de
la popularité du gouvernement de gauche de Mauricio Funes. Des enquêtes
récentes ont révélé un mécontentement
populaire découlant de l'absence de concrétisation de promesses
gouvernementales sur l'amélioration de la situation économique
et sur le contrôle de la criminalité.
Plus petit pays d'Amérique centrale, le Salvador compte 6,1 millions
d'habitants, dont plus du tiers des actifs potentiels sont sous-employés
ou au chômage. Si durant les trois premières années de
la gestion de Mauricio Funes le sous-emploi est passé de 40 à
36% de la population active, la situation reste critique, avec une croissance
économique de 2% en 2011 et 38% de la population sous le seuil de
pauvreté, d'après la Banque mondiale.
Le Salvador, note l'AFP, constitue avec ses voisins du Honduras et du Guatemala
le "Triangle du Nord", zone où sévissent à la fois les
narcotrafiquants (notamment depuis que le Mexique a intensifié sa
lutte contre le trafic de drogue) et les "maras" (groupes criminels mafieux),
particulièrement implantés au Salvador, où l'on enregistre
plus de 4.000 meurtres par an. D'après l'ONU, ces trois pays affichent
des taux d'homicides parmi les plus forts au monde : Honduras, 82 pour 100.000
habitants en 2011 (record mondial), Salvador 65 et Guatemala 40.
Le retour au premier plan de l'ARENA lors des élections démocratiques
de dimanche étonnera ceux qui lient ce parti aux anciens groupes
armés clandestins d'extrême droite (escadrons de la mort de
Roberto d'Aubuisson) formés pour combattre la guérilla lors
de la longue guerre civile de 1980-1992. Ce conflit fit au Salvador 75.000 morts,
8.000 disparus et 12.000 invalides.
L'ARENA et le FMLN se mesureront à nouveau à l'élection
présidentielle de mars 2014. L'article 152 de la Constitution prohibant la réélection
immédiate, Mauricio Funes ne pourra pas briguer à cette date un second mandat.