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Prochain référendum sur la réélection présidentielle illimitée
Venezuela - Uh! Ah! Chavez no se va, n'en déplaise à Bolivar

CARACAS, mardi 9 décembre 2008 (LatinReporters.com) - "Uh! Ah! Chavez no se va" (Ouh! Ah! Chavez ne s'en va pas). Ce cri -et aussi chanson- de ralliement chaviste domine une nouvelle précampagne électorale. En février ou mars 2009, le Venezuela retournera aux urnes pour dire oui ou non par référendum à un amendement constitutionnel qui permettrait à Hugo Chavez, au pouvoir depuis dix ans, de briguer la présidence autant de fois qu'il le voudra. Et, si les urnes lui sourient, de rester au pouvoir "jusqu'en 2021" suggère-t-il, n'en déplaise peut-être à son mentor historique, le libertador Simon Bolivar.

Meeting chaviste à Caracas - Photo Marcelo Garcia
Hugo Chavez - Photo Marcelo Garcia
Meeting de Hugo Chavez le 6 décembre 2008 à Caracas pour le 10e anniversaire de sa première élection à la présidence du Venezuela (Photos Marcelo Garcia - Prensa Presidencial)
 Uh! Ah! Chavez no se va (chanson, fév. 2008)
Elu pour la première fois à la présidence le 6 décembre 1998, l'ex-officier putschiste Hugo Chavez, lui-même brièvement victime d'un putsch en 2002, ambitionne ce que les Vénézuéliens appellent la réélection illimitée, qualifiée aussi d'indéfinie ou continue. Aussi veut-il amender l'article 230 de sa propre Constitution bolivarienne, article qui lui interdit de briguer un troisième mandat consécutif en décembre 2012 et donc de se succéder à lui-même en janvier 2013. (Chavez a remporté depuis 1998 trois élections présidentielles, mais la première n'était pas régie par la Charte suprême actuelle).

La révision de l'article 230 afin de permettre la réélection illimitée faisait déjà partie du vaste projet de réforme de la Constitution, portant sur 69 de ses 350 articles, que les Vénézuéliens rejetèrent par 51% de non lors du référendum de décembre 2007. Par cette réforme frustrée, Chavez visait à faire de son socialisme dit bolivarien l'option constitutionnelle et partisane irréversible du Venezuela.

Convaincue que la principale ambition de Hugo Chavez serait désormais de se perpétuer au pouvoir comme l'a fait son allié cubain Fidel Castro pendant près d'un demi-siècle, l'opposition qualifie le prochain référendum d'illégal, arguant de l'interdiction constitutionnelle de soumettre deux fois au verdict des urnes une même réforme de la Charte suprême lors du même mandat présidentiel.

Le droit, qui n'épouse pas toujours la légitimité morale, conforte toutefois le président Chavez. L'amendement du seul article 230 ne peut pas être confondu avec la réforme qui portait sur 69 articles de la Constitution. Cette dernière distingue d'ailleurs clairement l'un de l'autre amendement et réforme. En outre, dans l'unique amendement qui sera soumis à référendum au premier trimestre 2009, la durée du mandat présidentiel restera de six ans. Il serait passé à sept ans si la tentative de réforme de 2007 avait abouti.

En résumé, la question que devront trancher bientôt les Vénézuéliens est inédite, même si elle s'apparente à l'un des 69 amendements rejetés en bloc il y a un an. Si le oui l'emporte, l'article 230 de la Constitution sera rédigé comme suit: "La période présidentielle est de six ans. Le Président ou la Présidente de la République peut être réélu ou réélue". Les mots "immédiatement et pour une seule fois pour une nouvelle période" qui clôturent la rédaction actuelle du même article seront supprimés.

L'effondrement du prix du pétrole explique l'urgence. Obama aussi?

L'accusation de soif de pouvoir absolu et perpétuel portée contre Chavez par ses opposants doit être tempérée par le respect, observé jusqu'à présent, d'une condition logique: pour être réélu, le président Chavez devra à nouveau remporter l'élection présidentielle et ce chaque fois qu'il briguera la charge suprême.

Le problème ou la chance, selon qu'on soit anti ou prochaviste, est que Hugo Chavez, déjà élu trois fois à la majorité absolue, pourrait continuer à cumuler les victoires avec une majorité seulement relative, jugée suffisante par la Constitution pour sortir vainqueur de l'élection présidentielle vénézuélienne à tour unique. Comme le conservateur mexicain Felipe Calderon, élu président en 2006 avec 35,8% des suffrages contre 35,3% à son adversaire de gauche Lopez Obrador, comme encore le sandiniste Daniel Ortega, revenu en 2006 aussi à la présidence du Nicaragua avec 38% des voix, Hugo Chavez pourrait sortir vainqueur de futurs scrutins présidentiels même avec un score inférieur à 40%. Les 62,8% qu'il récolta en décembre 2006 lui confèrent théoriquement une marge confortable pour gérer dans la durée l'effritement lié à l'usure du pouvoir.

Mais pourquoi l'empressement de Chavez à s'assurer un droit constitutionnel continu à briguer la présidence, alors que la prochaine élection présidentielle n'aura lieu que dans quatre ans, en décembre 2012? Il y a peu, Chavez lui-même ne comptait rouvrir ce dossier qu'en 2010.

L'effondrement soudain de la manne pétrolière dû à la crise financière et économique mondiale est l'explication principale. Le baril de brut vénézuélien vaut actuellement environ 35 dollars, contre près de 140 dollars en juillet dernier. L'aggravation de la crise planétaire l'an prochain est prévue par tous les analystes. Or, le Venezuela, 5e exportateur mondial de pétrole, a planifié son budget 2009 sur la base déjà irréelle d'un baril à 60 dollars. De prochaines coupes sombres dans les programmes sociaux sont inévitables. Elles saperont la popularité de Chavez. Il lui faut arracher le oui référendaire à son droit à la réélection continue avant que la crise n'impose le non.

Par ailleurs, l'entrée de Barack Obama à la Maison blanche, le 20 janvier prochain, et les espoirs suscités par le premier président noir des Etats-Unis servent peu l'antiaméricanisme primaire du populisme chaviste. Le risque de déphasage rapide de son discours antiyankee contribue peut-être aussi à l'urgence référendaire de Chavez.

Enfin, tant sa première défaite électorale au référendum de décembre 2007 que les progrès de l'opposition aux élections régionales et municipales du 23 novembre dernier incitent également Chavez à sauvegarder ses ambitions sans plus tarder.

Bolivar avait deux visages. Lequel inspire Chavez?

Si le principe de la nouvelle démarche référendaire de Chavez s'inscrit, quoiqu'en dise l'opposition, dans la légalité vénézuélienne, il n'en va pas de même quant à la course à l'autoritarisme qui accompagne cette démarche.

Ses menaces de "guerre", de "prison", de "lancer les chars d'assaut dans la rue" et de suppression de deniers publics visant les administrations locales et les candidats ou élus "ennemis" avaient déjà rendu plus nets, pendant la campagne des récentes élections municipales et régionales, les penchants despotiques du chef de l'Etat. Le glissement vers l'intransigeance s'accentue aujourd'hui par les actions de la justice, à la simple demande de Hugo Chavez, contre des élus de l'opposition, des propriétaires de médias, des représentants du patronat, des militaires et un ex-diplomate accusés de complot contre le chef de l'Etat ou de corruption sans autres indices que les déclarations de Chavez lui-même.

Retransmis de manière obligatoire par tous les médias audio-visuels publics et privés, les appels quasi militaires de Chavez à des foules vêtues de rouge qu'il prétend organiser en "bataillons" pour que "cette révolution ne s'en aille jamais" alourdissent un climat de haine et d'intimidation. "Je serai ici jusqu'à ce que Dieu le veuille et le peuple l'ordonne ... Nous allons célébrer ce Noël en campagne pour l'amendement [constitutionnel] et avec la consigne Ouh! Ah! Joyeux Noël, Ouh! Ah! Chavez ne s'en va pas" clamait le président le 6 décembre à Caracas lors d'un meeting marquant le 10e anniversaire de sa première élection.

Chavez qualifiant sa révolution de "bolivarienne" par référence au libertador historique Simon Bolivar, qui unifia temporairement au 19e siècle une partie considérable de l'Amérique du Sud après y avoir défait les armées espagnoles, l'opposition ne cesse ces derniers jours de rappeler au chef de l'Etat ces phrases du célèbre discours prononcé par Bolivar le 15 février 1819 à Angostura: "L'autorité continue d'un même individu a fréquemment mis fin aux gouvernements démocratiques... Rien n'est aussi dangereux que de laisser longtemps le pouvoir aux mains d'un même citoyen. Le peuple s'accoutume à lui obéir et lui s'accoutume à le commander; en découlent l'usurpation et la tyrannie".

Néanmoins, en 1828, deux ans avant sa mort, Simon Bolivar s'autoproclama dictateur de la Grande Colombie, qui englobait l'actuel Venezuela. Bolivar avait donc deux visages. Quel est celui dont s'inspire aujourd'hui Chavez?


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