Mardi 12 février 2013 (LatinReporters.com) - En qualifiant d'"exemple"
et de preuve de "responsabilité" la démission du pape Benoît
XVI annoncée lundi pour faiblesse physique liée à l'âge,
l'opposition et l'épiscopat vénézuéliens visent
manifestement, sans le nommer, le président Hugo Chavez, hospitalisé
depuis deux mois à Cuba et invisible du commun des mortels suite à
une quatrième opération d'un cancer.
"C'est un moment très lumineux, une grande leçon. Le
pape a été très humain. Il a reconnu son manque de force
physique et avec humilité il a passé la main. C'est un bon
exemple" a commenté lundi l'archevêque Diego Padron, président
de la Conférence épiscopale du Venezuela.
S'exprimant sur Globovision, chaîne de télévision antichaviste,
le prélat a estimé que la démission de Benoît
XVI, effective le 28 février prochain, prouve que le pape n'assume
pas "le pouvoir pour le pouvoir" (une expression régulièrement
utilisée par les adversaires d'Hugo Chavez pour dénoncer son
autoritarisme; ndlr).
Le décision du souverain pontife "doit être considérée
comme un exemple pour les Vénézuéliens" a insisté
Mgr Diego Padron, communiant ainsi presqu'explicitement avec l'opposition.
Au sein de celle-ci, des voix réclament la démission du président Chavez
pour raison évidente de santé.
L'opposant le plus en vue, Henrique Capriles Radonski, actuel gouverneur
de l'État de Miranda et adversaire malheureux de Chavez à la
présidentielle d'octobre 2012, est sur la même longueur d'onde
que le chef de l'épiscopat. La démission du pape est "pour
moi une démonstration de responsabilité et d'honnêteté,
un exemple" a noté Capriles sur son compte Twitter.
En démissionnant, Benoît XVI "a coupé court aux rumeurs
malsaines et aux suppliques de résistance jusqu'à la mort, donnant
en même temps un exemple admirable à des personnes contemporaines,
dont plus d'un chef d'État réfractaire" écrit pour sa
part l'éditorialiste Antonio Cova Maduro dans El Universal, l'un des
principaux quotidiens d'opposition.
"L'héritage que laisse Benoît XVI se déploiera avec le
temps, quoique cet acte [la démission] - une première en près
de 6 siècles - sera peut-être finalement son legs majeur. Renoncer
lorsqu'on le peut encore - et en sentant qu'il le faut - ne sera désormais
plus impensable, mais évident" poursuit l'éditorialiste.
Comme l'archevêque Diego Padron et Henrique Capriles Radonski,
il s'adresse certainement au président Chavez et à son régime
sans les citer.
Paradoxe : allié privilégié du Venezuela bolivarien,
le Nicaragua sandiniste semble faire la leçon tant à son propre
président, Daniel Ortega, qu'à Hugo Chavez en commentant l'abdication papale.
"En ces temps d'accumulation de pouvoir, se défaire d'une investiture
aussi haute que celle d'un pontife de l'Église catholique [sic], reconnaître
la fragilité humaine, la vulnérabilité de la condition
humaine, admettre que le corps n'a parfois pas la même vitalité,
que l'âge impose des limites", cela n'a pas de précédent
affirmait en effet lundi avec admiration Rosario Murillo, épouse du
président Ortega et coordinatrice de la communication gouvernementale
nicaraguayenne.
Bref, la démission élevée au rang de valeur morale et
politique suprême. Au-delà de Chavez, puissent s'en inspirer
quelques pontifes d'une austérité européenne moins stimulante
que les rêves bolivariens.