Sur cette vidéo diffusée le 6 mai 2012, un chef de peleton des Farc confirme la capture de Roméo Langlois. Un communiqué de la
guérilla a en outre annoncé la prochaine libération du journaliste français. (Vidéo réalisée par
les journalistes indépendants Karl Penhaul et Carlos Villalon)
BOGOTA, lundi 7 mai 2012 (LatinReporters.com) - "Le prisonnier de guerre
Roméo Langlois, journaliste français, sera bientôt libéré
sain et sauf". Cette phrase essentielle de la guérilla des Farc est l'ultime
de sa revendication, cette fois incontestée, de la capture du correspondant
en Colombie de la chaîne d'information France 24 et du quotidien Le
Figaro.
Roméo Langlois était porté disparu depuis
le 28 avril, après une attaque attribuée aux Forces armées
révolutionnaires de Colombie (Farc, marxistes) dans le département
de Caqueta (sud). En reportage sur la lutte antidrogue, il accompagnait une
patrouille de l'armée prise sous le feu des guérilleros.
Le communiqué des Farc est tombé dimanche après-midi sur
leur compte Twitter @FARC_COLOMBIA.
(Nous l'avons aussitôt retweeté
sur @LatinReporters; ndlr). Il a été diffusé en espagnol sur neuf
tweets successifs, numérotés de 1 à 9. (Ndlr.: un tweet ne peut
dépasser 140 caractères). En voici la traduction intégrale :
(1) Le 28 avril 2012, dans la zone rurale de La Montañita - Caqueta,
un combat nous a opposés à l'armée et à la police.
(2) Lors de ce combat fut capturé un membre de l'armée qui
était blessé. Il s'est ensuite identifié comme journaliste
international.
(3) Après investigation, nous avons validé l'identité
de ce prisonnier comme étant Roméo Langlois, d'origine française,
journaliste de profession.
(4) Au moment de sa capture, ce journaliste portait des vêtements de
l'armée colombienne et non l'uniforme bleu réglementaire de
presse.
(5) En fonction de ce qui précède, nous clarifions devant l'opinion
internationale qu'il ne s'agit pas d'une séquestration. Ce fut une
capture en combat.
(6) Après la capture, ses blessures ont été traitées
par notre personnel et le prisonnier Roméo Langlois est hors de danger.
(7) Ayant éclairci cette situation, nous accusons l'armée colombienne
d'avoir mis en danger la vie de ce journaliste français.
(8) Et quoique certains tentent de brouiller notre processus de changement,
le dialogue et la vérité seront toujours nos armes de victoire.
(9) Enfin, nous informons que le prisonnier de guerre Roméo Langlois,
journaliste français, sera bientôt libéré sain et
sauf.
Une vidéo avait précédé le communiqué
Deux heures avant la publication de ce communiqué, le site You Tube
du journaliste indépendant anglais Karl Penhaul diffusait une
vidéo (celle que nous reproduisons plus haut) dans laquelle un commandant
d'escadron des Farc, s'identifiant sous le nom Ancizar, alias Monazo, confirmait déjà,
après un bilan de récents combats, la capture de Roméo Langlois. Mais il n'annonçait pas
sa prochaine mise en liberté, se limitant à espérer un dénouement "rapide".
L'intervention de ce guérillero, reconnu comme tel à Bogota, a été
filmée par Karl Penhaul et un autre journaliste indépendant,
le Chilien Carlos Villalon, correspondant en poste depuis onze ans en Colombie
et auteur de nombreux reportages sur les Farc, notamment pour des chaînes
américaines.
"Le Front 15 informe l'opinion publique que
le journaliste français Roméo Langlois, en uniforme militaire
et capturé en plein combat, est entre nos mains et est prisonnier de
guerre. Il est légèrement blessé au bras. On lui a procuré
l'attention médicale nécessaire et il est hors de danger. Signé
: état-major du Front 15, bloc sud des Farc-EP. Montagnes du Caqueta,
30 avril 2012" déclare sur la vidéo Monazo en lisant un
communiqué.
C'est en ces mêmes termes qu'une supposée
militante des Farc avait revendiqué le 1er mai la capture du correspondant
français dans des appels téléphoniques à des
journalistes colombiens. Mais cette première revendication laissait
planer le doute, car elle n'avait pas pu être authentifiée,
comme le reconnut le général Alejandro
Navas, commandant en chef des trois armes (aviation, marine, armée
de terre). Un site Internet proche de la guérilla
accusa même les services gouvernementaux d'avoir fabriqué cette
revendication téléphonique pour nuire aux Farc.
Tirer profit de la libération?
L'essentiel est donc la prochaine libération de Roméo Langlois
annoncée par la guérilla. Avant même que soit confirmée
la capture du journaliste, la Croix-Rouge internationale et le gouvernement
brésilien, plusieurs fois associés dans la récupération d'otages
libérés par les Farc, avaient
à nouveau offert leurs services si les rebelles et le gouvernement
du président Juan Manuel Santos le jugeaient nécessaire.
Le grand écho international soulevé par ce qui fut d'abord
appelé "la disparition" de Roméo Langlois devrait logiquement
inciter la guérilla à tenter de faire de sa libération
un acte solennel rapportant aux insurgés un supposé bénéfice
politique et/ou médiatique. Le journaliste français explicitera sûrement
s'il avait dû ou non revêtir une tenue militaire comme le
prétendent les Farc. Les autorités de Bogota nient cette entorse grave
aux conventions internationales.
L'objectivité de Roméo Langlois est unanimement reconnue. En
poste en Colombie depuis plus de dix ans, il a fait parler dans ses reportages
tant le gouvernement et l'armée que la guérilla, sans oublier
les plus démunis, qui sont encore légions dans ce pays
sud-américain de 46,5 millions d'habitants.
Briefing dans un camp de la guérilla des Farc (Archives / photo FARC-EP)
LES FARC CONDITIONNENT LA LIBÉRATION DE R. LANGLOIS
BOGOTA, mardi 8 mai 2012 ( AFP / LatinReporters)
- La situation du journaliste français Roméo Langlois en Colombie
a pris lundi un tour inquiétant après la diffusion d'un message
ambigu de la guérilla des Farc qui semble lier sa libération
à l'ouverture d'un "large débat" sur la presse.
Muette jusqu'à présent, la direction centrale de la rébellion
marxiste a envoyé lundi son premier communiqué depuis la disparition
de M. Langlois, capturé le 28 avril lors de l'attaque d'une brigade
qu'il accompagnait pour un reportage dans le sud du pays, à la lisière
de la forêt amazonienne.
"Nous pensons que le minimum que l'on peut attendre pour qu'il puisse récupérer
pleinement sa liberté de mouvement est l'ouverture d'un large débat
national et international sur la liberté d'informer", indique le texte
reçu par plusieurs médias colombiens.
Les Farc persistent à considérer le journaliste comme
un "prisonnier de guerre", au motif que ce dernier était vêtu
d'"une tenue militaire de l'armée au milieu d'un combat".
Correspondant de la chaîne France 24, M. Langlois, 35 ans, portait
au moment de l'offensive un casque et un gilet pare-balles de l'armée,
qu'il a retirés avant de se rendre aux assaillants en se présentant
comme civil, selon les autorités colombiennes. Quatre militaires ont
péri durant l'accrochage et le journaliste a lui-même été
blessé au bras.
Plus généralement, les rebelles dénoncent avec virulence
la pratique du journalisme embarqué avec l'armée, estimant que
le gouvernement "vise à s'assurer le concours de tous pour la guerre,
y compris la presse".
"Les journalistes que les forces armées colombiennes emmènent
lors de leurs opérations militaires n'exercent pas leur mission impartiale
qui est d'informer sur la réalité mais celle consistant à
la manipuler", affirme le communiqué.
Douche froide
Cette annonce des Farc constitue une surprise au lendemain de la diffusion
de la vidéo d'un guérillero du "front 15", l'unité
des Farc ayant capturé M. Langlois dans le département de Caqueta.
Il y évoquait la possibilité d'un dénouement "rapide"
pour le journaliste français. (Voir article ci-contre)
La diffusion de cette vidéo avait en outre été suivie
de la publication d'un communiqué plus encourageant encore sur le
compte Twitter des Farc. Il annonçait que "Le prisonnier de guerre
Roméo Langlois, journaliste français, sera bientôt libéré
sain et sauf". (Voir également article ci-contre)
Donc, douche froide après l'optimisme. A noter toutefois que le communiqué
conditionnant la libération de Roméo Langlois est daté
du 3 mai. Quoique connu postérieurement, il est donc antérieur au message porteur d'espoir diffusé
dimanche sur Twitter.
REPRODUCTION
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