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C'est à Cuba que faillit éclater la première guerre "préventive" de l'histoire contemporaine

Cuba - Exécutions et condamnations de dissidents: peur ou réplique de Castro à la guerre en Irak?

par Christian Galloy

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Dossier Cuba

MADRID, dimanche 13 avril 2003 (LatinReporters.com) - C'est à Cuba, lors de la "crise des missiles" de 1962, que faillit éclater la première guerre préventive de l'histoire contemporaine. Aujourd'hui, en accroissant soudain la répression dans son île -trois dissidents exécutés et 75 autres condamnés à un total de 1.454 années de prison- le président cubain Fidel Castro trahit-il sa peur d'une instabilité de son régime ou signifie-t-il qu'il ne serait pas impressionné par la guerre dite préventive des Etats-Unis et de la Grande-Bretagne en Irak? Fidel Castro estimait samedi que son pays est confronté à des "provocations" de Washington visant à déboucher sur "une agression militaire".

Deux jours après la chute de Bagdad et du régime de Saddam Hussein, trois dissidents cubains reconnus coupables du détournement frustré d'un ferry-boat à bord duquel ils voulaient gagner les Etats-Unis ont été fusillés vendredi à La Havane. Il s'agit des premières exécutions capitales à Cuba depuis le moratoire de facto d'avril 2000. Le gouvernement castriste présente ces mises à mort, ainsi que la condamnation de huit complices -dont quatre à perpétuité- comme nécessaires dans le cadre de son affrontement idéologique avec Washington.

Et le 21 mars dernier, au lendemain même des premiers bombardements américains sur Bagdad, la police cubaine concluait une rafle qui a permis cette semaine la condamnation de 75 autres dissidents -dont 28 journalistes indépendants -à des peines comprises entre 6 et 28 ans de prison, totalisant 1.454 années d'incarcération.

Les organisations humanitaires internationales, les principales personnalités de la dissidence cubaine, des gouvernements et des éditorialistes occidentaux ont accusé Fidel Castro d'intensifier la répression en profitant de l'éloignement supposé de l'attention médiatique internationale, quasi monopolisée par la guerre en Irak. Les observateurs soulignent que les principales victimes de la dernière vague d'arrestations sont, en majorité, des militants du Projet Varela de démocratisation de Cuba, qui a surpris le régime castriste en réussissant à fédérer de grands courants de la dissidence.

Le ministre cubain des Relations extérieures, Felipe Perez Roque répliquait mercredi en accusant le chef de la Section des intérêts des Etats-Unis à La Havane, James Cason, de "nous obliger à appliquer nos lois, sans autre alternative" pour avoir converti sa résidence en centre de réunion et "poste de commandement" de "contre-révolutionnaires". Selon le chef de la diplomatie cubaine, "ce qui est jeu aujourd'hui est de savoir si un petit pays peut être libre et indépendant aux côtés de la superpuissance hégémonique", qui aurait "l'obsession de fabriquer à Cuba une cinquième colonne, des groupes soi-disant d'opposition répondant à ses intérêts annexionnistes".

Fidel Castro en personne dramatisait samedi en imputant aux Etats-Unis des "provocations" visant à justifier une éventuelle "agression militaire".

Le climat entre La Havane et Washington s'est envenimé fortement après l'arrivée de George W. Bush à la Maison blanche. Le président américain prône le maintien de l'embargo imposé depuis 1962 par les Etats-Unis à Cuba, malgré les appels des lobbies de l'agriculture et de l'énergie en faveur de la levée de l'isolement économique du régime castriste. La multiplication des détournements d'avions par des Cubains cherchant refuge aux Etats-Unis, l'appui déclaré de George W. Bush aux dissidents, l'audience grandissante de ces derniers dans l'île, l'autoritarisme de Fidel Castro -qui a coulé l'an dernier dans la Constitution le caractère "irrévocable" du socialisme cubain- et la guerre déclarée par les Etats-Unis au terrorisme international depuis les attentats du 11 septembre 2001 (dans l'optique américaine, la guerre "préventive" en Irak n'est qu'un épisode de ce combat global) sont les autres ingrédients du drame cubain actuel.

Dans ce contexte, les inquiétudes exprimées ouvertement l'automne dernier par l'administration américaine sur la prétendue capacité de Cuba de développer des armes chimiques risquent à tout moment de prendre une dimension nouvelle.

Le président de la Commission de contrôle et d'inspection des Nations unies, Hans Blix, coordinateur (jusqu'à l'éclatement du conflit) de la recherche et de la neutralisation d'armes de destruction massive en Irak, déclarait mercredi dernier au quotidien madrilène El Pais: "Je crois que l'idée d'une guerre contre la prolifération d'armes de destruction massive était dans l'air depuis longtemps. Je remonte à la crise des missiles de Cuba dans les années soixante. Il fut alors clairement question de freiner la prolifération...".

Déclenchée par la présence de fusées soviétiques à Cuba, la "crise des missiles" de 1962 mit le monde au bord de l'apocalypse nucléaire. Devant la détermination de John F. Kennedy, Nikita Khrouchtchev ordonna le retrait des fusées russes, obtenant en échange que les Etats-Unis n'envahissent pas Cuba. Cet épisode consacra la dimension à la fois mondiale et polémique de Fidel Castro. L'appui de la grande puissance qu'était alors l'Union soviétique assura sa continuité. Mais aujourd'hui, les Etats-Unis retirent les dividendes, y compris comme on le voit par la manière forte, de leur statut d'unique hyperpuissance de la planète.

Des observateurs optimistes estiment néanmoins que Cuba ne vaut toujours pas une guerre. Après 44 ans de pouvoir absolu, Fidel Castro, qui soufflera avec peine 77 bougies le 13 août, affiche en effet une fragilité physique et surtout politique qui hypothéquerait la continuité de son régime. Preuve en serait son recours, aujourd'hui, aux méthodes brutales du communisme le plus obscur.

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