MADRID, dimanche 3 avril 2011 (LatinReporters.com) - "Je
ne serai pas candidat aux prochaines élections générales
[de mars 2012]. Merci pour votre respect et votre affection" annonçait
le 2 avril à Madrid le président du gouvernement, José
Luis Rodriguez Zapatero, devant le comité fédéral de
son Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE). Elu en 2004 et réélu
en 2008, M. Zapatero, 50 ans, a vu fondre sa popularité à cause
de sa gestion jugée catastrophique de la crise économique.
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M. Zapatero pendant le discours annonçant qu'il ne se présentera pas aux élections législatives de mars 2012. (Madrid, 2 avril 2011 - Capture d'écran - LatinReporters.com) |
Il assure qu'il gouvernera jusqu'à la fin de son mandat actuel. Le quotidien madrilène La
Razon n'en titre déjà pas moins, dimanche 3 avril, "Adiós, Zapatero". Le
nouveau chef de file socialiste aux législatives de 2012 devrait être
désigné par les 220.000 militants du parti lors de primaires
organisées après les élections municipales et régionales
du 22 mai prochain. Ce premier round électoral risque de déloger
le PSOE de nombre de ses places fortes. Dans les derniers sondages, il est
devancé de parfois plus de 16 points par le Parti Populaire (PP, droite)
de Mariano Rajoy. Pareille avance de la droite serait, si elle se concrétisait,
inédite en 35 ans de démocratie postfranquiste.
Deux favoris pour succéder à M. Zapatero
La plupart des barons socialistes prédisent
que la succession de M. Zapatero à la tête du PSOE se jouera
entre, d'une part, le ministre de l'Intérieur, Alfredo Perez Rubalcaba,
59 ans, fort de ses succès dans la lutte contre les indépendantistes
basques de l'ETA, et, d'autre part, la relativement jeune ministre de la
Défense, Carme Chacon, Catalane de 40 ans. Avant la chute de popularité
de M. Zapatero, elle était considérée comme sa dauphine.
Depuis 2008, M. Zapatero a subi une érosion d'une rare intensité.
La crise économique lui a éclaté dans les mains comme
dans celles des autres leaders de la planète, mais dans son cas, relève
l'analyste Fernando Garea, la crise s'est aggravée par sa résistance
initiale à admettre qu'elle touchait l'Espagne et par l'obligation
postérieure de recourir à des doses d'autant plus fortes d'austérité,
enterrant le projet socialiste pour lequel il avait été élu.
Dit d'une autre façon, les électeurs de M. Zapatero lui tourneraient
désormais le dos en lui reprochant de se préoccuper moins des
syndicats que des banquiers et moins des mesures sociales que des agences
de notation financière. Le chef du gouvernement espagnol aurait démontré
trop clairement, en se soumettant au diktat de l'Union européenne
et des marchés, qu'il ne disposait d'aucune réponse socialiste
à la crise.
En outre, malgré la baisse des salaires des fonctionnaires, le gel
des retraites, la hausse de la TVA, la suppression d'aides diverses et la
réduction des indemnités de licenciement, l'économie
espagnole peine à se redresser. Le produit intérieur brut a
reculé de 0,1% en 2010 et le taux de chômage en Espagne dépasse
toujours les 20%, un record dans les pays industrialisés.
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M. Zapatero entouré des deux favoris à sa succession, la ministre
de la Défense Carme Chacon et le ministre de l'Intérieur Alfredo
Perez Rubalcaba. (Madrid, 12 janvier 2011 - Photo Presidencia del Gobierno) |
65% des électeurs socialistes n'ont plus confiance en M. Zapatero
Stagnation et austérité nourrissent l'impopularité de
José Luis Rodriguez Zapatero. Le dernier sondage du Centre d'investigation
sociologique (CIS, organisme public) lui octroie une cote de 3,3 sur 10,
plus basse que la cote de son prédécesseur conservateur José
Maria Aznar en pleine guerre d'Irak dans laquelle il avait engagé
l'Espagne. Un autre sondage, en mars, indiquait que 65% des électeurs
socialistes n'ont plus confiance ou très peu en M. Zapatero.
D'autres facteurs ont érodé l'image du chef du gouvernement.
En retard sur la perception de la crise, il le fut aussi au moment d'écourter
une longue et inutile négociation impopulaire avec les Basques de
l'ETA. Retard encore dans l'évaluation que l'autonomie débordante
qu'il offrait à la Catalogne pour des raisons électorales allait
indisposer la majorité des Espagnols et justifier le holà du
Tribunal constitutionnel.
Faisant de nécessité vertu, le leader socialiste a prétendu
samedi n'avoir jamais envisagé d'exercer le pouvoir pendant plus de
deux mandats. Selon lui, sa décision de ne pas se présenter
aux législatives de 2012 est la meilleure pour l'Espagne, pour le
PSOE et pour sa famille. Les barons socialistes se gardent de le contredire.
M. Zapatero n'était plus pour eux un atout, mais un handicap. L'annonce
de son retrait adoucira peut-être, mais n'empêcherait pas, selon
les éditorialistes, la défaite du PSOE aux prochaines échéances
électorales. D'autant que les socialistes risquent que leurs primaires
se transforment en pugilat pour le contrôle du parti et du gouvernement.
A droite, l'annonce du départ en 2012 de M. Zapatero, qui gouvernera
encore pendant un an, est jugée insuffisante. La secrétaire
générale du Parti Populaire, Maria Dolores de Cospedal, réclame
des élections législatives anticipées, car, argumente-t-elle
en substance, si les socialistes ont cru utile de se débarrasser de
M. Zapatero, il faudrait pouvoir offrir rapidement la même opportunité
à l'ensemble des Espagnols.
A l'autre extrémité de l'éventail politique, le leader
socialiste n'est pas davantage applaudi. "Peu importe qui lui succédera
comme candidat du PSOE, car personne au sein de ce parti n'a mis en question
sa politique néolibérale" déclare Cayo Lara, coordinateur
général des écolos-communistes d'Izquierda Unida (IU,
Gauche Unie). Ce parti fut l'un des alliés de M. Zapatero au
cours de sa première législature.