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Démission du ministre de la Justice à la veille d'élections régionales
Espagne/Pays basque/Galice: ministre "abattu" en pleine chasse électorale

MADRID, mardi 24 février 2009 (LatinReporters.com) - Chasseurs chassés et arroseurs arrosés. La stratégie des socialistes espagnols de José Luis Rodriguez Zapatero pour remporter comme à la promenade les élections régionales du 1er mars au Pays basque et en Galice a fait long feu lors d'une partie de chasse. L'un des chasseurs, le ministre socialiste de la Justice Mariano Fernandez Bermejo, a démissionné le 23 février. Un autre, le juge vedette Baltasar Garzon, voit renforcée sa réputation de partialité politique.

En haut, le ministre Bermejo sur une publication d'août 2008 de l'armurerie Jara y Sedal. En bas, le juge Garzon parmi des cerfs abattus le 8 février 2009 lors de la chasse à laquelle participa aussi le ministre Bermejo (photo El Mundo).
Comment gagner encore des élections, fussent-elles régionales, lorsque la crise économique, longtemps niée par M. Zapatero, fait de l'Espagne l'incontestée championne d'Europe du chômage avec un taux proche de 15% et, fin janvier, une armée de 3.327.000 sans emploi qui grossit au rythme stupéfiant de 200.000 chômeurs de plus chaque mois? Parler le moins possible de la crise à la veille des scrutins est la réponse apparente du Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) dirigé par M. Zapatero, qui est aussi président du gouvernement.

Au cours de la campagne électorale, le PSOE a en effet tenté de mettre une sourdine à la débâcle économique et sociale. Une soudaine corruption supposée de leur principal adversaire, le Parti Populaire (PP, droite), a occupé le centre de la campagne des socialistes, appuyés par leurs haut-parleurs électoraux habituels du groupe médiatique Prisa (journal El Pais, radio Cadena Ser, télévision Cuatro).

Font ainsi grand bruit depuis janvier un espionnage illégal présumé entre clans rivaux du PP madrilène et l'instruction ouverte par le juge Baltasar Garzon, célébrissime pourfendeur de génocidaires latino-américains, sur un réseau de corruption et de trafic d'influence qu'auraient tissé de petits chefs d'entreprise organisateurs de meetings et d'actes officiels du PP. Deux élus madrilènes de ce parti ont été impliqués. Le président de la région de Valence, également du PP, le serait aussi, mais il le nie, pour s'être fait offrir... trois ou quatre costumes!

L'instruction du juge Garzon est en principe placée sous le sceau légal du secret. Mais chaque jour, des "fuites" alimentent les médias du groupe Prisa. Ils jettent l'opprobre sur le nom de personnes "proches du PP" ou appartenant à ce parti. La plupart des victimes de ce lynchage public ignoraient l'existence même de poursuites à leur égard et se découvrent accusées, sans défense possible, en écoutant la radio ou en lisant le journal.

Mais, sous réserve de développements ultérieurs, le cadre délictuel restreint dessiné par ces fuites médiatiques et la relative modestie des sommes qui auraient été perçues indûment ne suggèrent jusqu'à présent, malgré les gros titres à la une d'El Pais, que l'existence de quelques corrompus au sein du PP, appâtés par un lucre personnel, mais non d'un système de corruption généralisée élaboré par ce parti. On est loin des malversations massives, symbolisées par le scandale Filesa, qui firent du PSOE dans les années 1980 et 1990 le précurseur de la cohabitation de la démocratie postfranquiste avec la corruption politique centralisée et planifiée à grande échelle.

La machine politico-médiatico-judiciaire mise en marche contre le PP avant les élections régionales du 1er mars s'est grippée à partir du 11 février grâce au quotidien de centre droit El Mundo. Il révéla qu'au moment où s'opéraient les premières mises en examen dans l'entourage du PP, le juge Garzon et le ministre socialiste de la Justice, Mariano Fernandez Bermejo, chassaient ensemble le cerf, le dimanche 8 février, dans la province andalouse de Jaen. Le vendredi précédent, ils avaient dîné en tête-à-tête. Le commissaire en chef de la brigade de police judiciaire Juan Antonio Gonzalez Garcia et Mme Dolores Delgado, procureur du tribunal de l'Audience nationale, l'instance pénale à laquelle appartient le juge Garzon, participèrent au même week-end cynégétique.

Le président du PP, Mariano Rajoy, eut alors beau jeu de lancer l'accusation de collusion électorale entre le pouvoir socialiste et un juge, Baltasar Garzon, qui fut en 1993 député socialiste et tsar anti-drogues du gouvernement socialiste de Felipe Gonzalez. (*) Selon M. Rajoy, le gouvernement de M. Zapatero a voulu instrumentaliser la justice à des fins politiques pour détourner l'attention de la violente crise économique avant les élections en Galice et au Pays basque.

Convaincu en outre par El Mundo d'avoir chassé en Andalousie sans permis et de faire aussi parfois furtivement le coup de fusil dans un domaine public utilisé à des fins personnelles, celui de Quintos de Mora, près de Tolède, le ministre Bermejo s'est vu progressivement lâché par les barons socialistes. Le soutenir encore devenait imprudent au vu des derniers sondages. C'est en effet probablement l'impact sur l'opinion publique de la révélation des abus du ministre et de sa partie de chasse politiquement et éthiquement incorrecte avec le juge Garzon qui expliquerait la possibilité du PP, selon les sondages, de résister mieux que prévu aux difficiles élections basques et de retrouver peut-être en Galice sa majorité absolue et le pouvoir régional perdus en 2005.

Affaibli aussi par la première grève de l'histoire des juges espagnols, largement suivie le 18 février, le ministre Bermejo jetait l'éponge lundi. "Bermejo abattu" titrait mardi El Mundo. Depuis l'arrivée au pouvoir de M. Zapatero en 2004, il s'agit, parmi un nombre réduit de démissions, de la première à caractère forcé d'un ministre socialiste. Il a été remplacé par Francisco Caamaño, 46 ans, un spécialiste de droit constitutionnel qui occupait jusqu'à présent le poste de secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement. Le nouveau ministre est galicien et fédéraliste, particularités qui serviront en principe les socialistes aux élections régionales de dimanche.

Quant à l'autre chasseur controversé, le juge Baltasar Garzon, la droite exige qu'il soit écarté de l'instruction en cours sur la corruption présumée dans l'entourage du PP et que soit éclaircie la supposée "connivence" du magistrat avec le pouvoir.




(*) En tant que candidat député du Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE), Baltasar Garzon déclarait lors d'un meeting, deux jours avant les élections législatives du 6 juin 1993: "Nous allons leur donner [à la droite et au PP] une raclée dont ils se souviendront... Nous voulons que la droite demeure dans l'opposition pour apprendre comment on gouverne... Il vaut la peine de ne plus être neutre sans perdre l'indépendance et de se joindre à une idée de futur... J'ai choisi l'option du futur, qui est celle du PSOE et de Felipe Gonzalez".

Responsable du Plan national contre la drogue et nº2 du ministère de l'Intérieur dans le gouvernement de Felipe Gonzalez, Baltasar Garzon démissionnait en 1994, selon certains pour n'avoir pas eu les coudées franches dans la lutte contre la corruption ou, selon d'autres, par dépit de n'avoir pas été nommé ministre. Redevenu juge, Baltasar Garzon fera condamner de hauts dignitaires socialistes, dont un ex-ministre de l'Intérieur et un ex-secrétaire d'Etat à la Sécurité, pour leur implication dans le terrorisme des GAL (Groupes antiterroristes de libération). De 1983 à 1987, cette organisation parapolicière assassina 28 Basques liés aux séparatistes de l'ETA ou soupçonnés de l'être.


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CITÉ DANS L'AFFAIRE DE
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MADRID, jeudi 26 février 2009
Plusieurs médias espagnols croient jeudi que l'affaire de corruption présumée qui a éclaté au niveau national pendant la campagne des élections régionales du 1er mars au Pays basque et en Galice (article ci-contre) impliquerait Luis Barcenas, sénateur et actuel trésorier du Parti Populaire (PP, droite), ainsi que l'eurodéputé du PP Gerardo Galeote.

Ces noms ont été publiés avant toute éventuelle confirmation judiciaire. Un document du juge Baltasar Garzon mentionnait seulement mercredi la "possible" implication d'élus nationaux du PP, principal parti de l'opposition au gouvernement socialiste de José Luis Rodriguez Zapatero.

Jusqu'à présent, seuls des élus locaux ou régionaux du PP de Madrid et de Valence étaient impliqués dans cette affaire ayant comme point de départ un réseau supposé de corruption tissé par des entrepreneurs considérés comme proches de la droite pour obtenir les faveurs d'autorités publiques.

Le PP accuse le juge Garzon de collusion avec le pouvoir socialiste et a porté plainte mercredi contre le magistrat pour "prévarication".

Déjà poursuivi par Garzon en 1999, le PP fut blanchi

Peu avant les élections européennes de juin 1999, le parquet anticorruption dénonçait sur requête de l'exécutif socialiste de la région de Castilla-La Mancha une "fraude généralisée" portant sur de présumées subventions irrégulières à la culture du lin (d'où le nom "Caso del lino" donné au dossier), avec détournement supposé de fonds en faveur de personnalités du Parti Populaire, dont Loyola de Palacio, ministre de l'Agriculture avant de conduire la liste du PP au scrutin européen qu'elle remporta néanmoins en Espagne.

L'instruction par le juge Garzon du "Caso del lino" durant six ans, les soupçons de corruption généralisée pour financer le PP nuisant à l'image de ce parti pendant cette longue période. En avril 2007, le tribunal de l'Audience nationale acquitta les 18 inculpés, déjà blanchis auparavant par une commission d'enquête parlementaire.
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