|
Espagne - L'exhumation de Federico Garcia Lorca acceptée enfin par la famille du poète
qui toutefois ne souhaite pas l'ouverture de la fosse commune
|
Federico García Lorca (1898 - 1936) Wikisource - Creative Commons |
|
MADRID, jeudi 18 septembre 2008 (LatinReporters.com) - "Nous n'empêcherons
pas l'exhumation des restes de Federico, mais cela ne nous plairait pas"
déclare au quotidien El Pais Laura Garcia Lorca, nièce du poète
dont l'assassinat, le 18 août 1936 au début de la guerre civile
espagnole, demeure un symbole de la barbarie, en l'occurence franquiste, de l'époque.
La famille Garcia Lorca s'opposait jusqu'à présent à l'ouverture
de la fosse commune où reposerait Federico, près de Grenade.
Son revirement se produit au moment où la justice est appelée
à se prononcer.
"Quoique l'exhumation ne nous plairait pas, nous respectons les souhaits
des autres parties impliquées... Nous respectons les sentiments de
tous et, bien sûr, la loi" explique à El Pais Laura Garcia Lorca,
porte-parole de la famille et présidente de la
Fondation
Federico Garcia Lorca.
Entre les villages grenadins de Viznar et Alfacar, trois autres victimes de la violence
antirépublicaine ont été, selon les historiens, fusillés avec le poète et jetés dans la même fosse commune: l’instituteur Dioscoro Galindo, défenseur de l'école laïque, ainsi que les banderilleros Francisco Galadi et Joaquin Arcollas,
militants d'un syndicat anarchiste.
Se réclamant de la loi dite de la Mémoire historique votée
par le Parlement espagnol en octobre 2007, les descendants de Dioscoro Galindo
y de Francisco Galadi (le banderillero Arcollas n'a pas laissé de
descendance) ont saisi la justice le 12 septembre dernier pour réclamer
l'ouverture de la fosse.
Le dossier est entre les mains du célèbre juge Baltasar Garzon,
persécuteur de bourreaux sud-américains tels que
le (défunt) général Pinochet. C'est la décision
de ce magistrat que Laura Garcia Lorca se dit prête à accepter,
à contrecoeur s'il se prononçait pour l'exhumation, qui aurait
sans nul doute un retentissement international.
Au-delà du cas particulier mais emblématique de la fosse commune
du poète, le juge Garzon, sur instance de l'Association pour la récupération
de la mémoire historique (ARMH), a requis depuis le 1er septembre
de divers ministères et villes, ainsi que de l'Eglise, un gigantesque
et inédit recensement de dizaines de milliers de disparus lors de la guerre civile de 1936-1939
et sous le franquisme. El Pais estime que cette initiative du juge, appuyée par
le gouvernement socialiste de José Luis Rodriguez Zapatero et décriée
par l'opposition conservatrice, a contribué au revirement de la famille
Garcia Lorca.
Pourquoi les profondes réticences familiales à l'égard
de l'exhumation des restes de Federico?
"D'une part, la réalité de ne pas savoir exactement où
il se trouve [la localisation de la fosse commune pouvant être erronée;
ndlr]. En plus, dans le ravin [où se trouverait la supposée
fosse commune] il y a entre 1.000 et 3.000 morts. Qu'en sera-t-il d'eux?
Une exhumation partielle [limitée à la fosse présumée
de Federico] dénaturerait le cimetière réel où
gisent tant de victimes de la même répression... Marquer une
différence entre les uns et les autres nous préoccupe" répond
Laura Garcia Lorca à El Pais.
Elle ajoute: "A notre sens, il s'agit de la tombe définitive [de Federico],
dans ce ravin et avec ceux qui l'accompagnent. Il ne nous plairait pas de
le distinguer par dessus qui que ce soit. Il doit reposer là comme
un de plus, par ordre alphabétique, uni aux autres... Sa gloire servirait
à préserver le lieu et à éviter que les autres
victimes tombent dans l'oubli".
La nièce du poète dit en outre "ne pas croire que les restes
exhumés apporteraient de nouvelles données essentielles à
la biographie" de Federico.
Elle redoute aussi que l'éventuelle exhumation "se convertisse en
spectacle... Le cas échéant, nous voulons qu'on procède
avec beaucoup de respect, en privé, dans l'intimité".
L'ouverture de la fosse "changerait les choses", au point de porter Laura
Garcia Lorca à parler "d'autres possibilités", à
savoir "l'emmener [Federico] à New York avec son père, à
Madrid avec sa mère et ses soeurs... Répandre ses cendres en
divers endroits où il vécut".
Mais la nièce du poète de conclure: "Nous voulons qu'il reste
là [dans la fosse commune]. Il est mort ainsi, ils l'ont tué
de cette manière et il est important qu'il reste là".
version imprimable
Réagissez en rappelant titre et/ou date de l'article
ARTICLES ET DOSSIERS LIÉS
|
|