Le Venezuela reste divisé après la victoire de Chavez au référendum révocatoire
Inquiète quant à la régularité du référendum révocatoire, l'opposition a vu ses élans de protestation anesthésiés par l'ex-président américain Jimmy Carter et par le secrétaire général de l'Organisation des Etats américains (OEA), Cesar Gaviria, qui rejetèrent devant la presse l'hypothèse d'une fraude et invitèrent les Vénézuéliens à "assumer les résultats et à travailler désormais ensemble". Chavez a gagné, avalisé par 58% des votes et une participation électorale record. Et l'opposition a perdu. Ce que beaucoup se plaisent à qualifier de "gifle électorale" lui fait vivre son second pire moment, le premier étant le putsch antichaviste avorté d'avril 2002 et l'échec, alors, de Pedro Carmona, l'ex-patron des patrons. Après la défaite de dimanche, il faudra probablement beaucoup de temps à l'opposition pour se consolider ou, pire encore, pour seulement se maintenir. Si la Coordination démocratique qui chapeaute cette opposition multiple n'a pas été capable, dans ses meilleurs moments, de dégager une figure suffisamment représentative pour agglutiner autour d'elle ceux qui n'approuvaient pas Chavez, il lui sera difficile d'y parvenir à court et moyen terme après cette nouvelle gorgée amère. Le Venezuela reste divisé et le restera longtemps. Et les haines politiques se feront sentir, prenant en otages -comme toujours- les citoyens. Ceux-là mêmes qu'ont charriés l'un ou l'autre camp en d'interminables marches pour le OUI ou pour le NON. Si on continue à les soumettre à ces disputes, ils cesseront de croire en ce qui existe et se mettront à parier et à créer ou faire revivre des forces politiques qui les représenteraient plus sainement. Il est difficile que le résultat du référendum modifie le pouvoir ou l'opposition. Difficile que les deux camps aient l'humilité de s'asseoir pour négocier une issue moins dévastatrice. "La politique est l'art du possible" disait en France le bouillant Gambetta lorsqu'il s'érigeait en penseur. Mais ici, il ne s'agit ni de la France ni de penseurs. Et l'impact négatif de la guérilla politique sur le pays et sur la qualité de vie des Vénézuéliens marque profondément les esprits. Il ne faut faire des pronostics qu'avec prudence: Hugo Chavez fit beaucoup de bonnes choses. Notamment, sans imaginer que cela lui donnerait pareilles sueurs, il inséra dans la Constitution la clause permettant de soumettre le chef de l'Etat à un référendum révocatoire. Il a ouvert ainsi pour la démocratie représentative une possibilité non explorée en Amérique latine, sauf dimanche au Venezuela. En bon leader populiste, il a aussi doté de voix les classes humbles marginalisées et exclues pendant des décades dans un Venezuela oligarchique qui oscillait entre gouvernements imposés et démocraties corrompues. Mais Chavez s'est aussi trompé plusieurs fois de chemin. Principalement, peut-être, en se laissant emporter par une attitude de confrontation manquant d'humilité et l'empêchant de jeter des ponts pour communiquer avec ceux qui ont une autre idéologie. Cela vient de la faire vaciller une seconde fois -le putsch avorté de 2002 fut la première alerte- et en dépit de son nouveau triomphe, cette attitude restera pour Chavez un péril latent. Vous pouvez réagir à cet article sur notre forum
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