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Uruguay frappé de plein fouet - Le Brésil montre des signes de récession

Crise argentine: risques et mécanismes de contagion

Par Diego Benavente, économiste

SANTIAGO DU CHILI, mercredi 5 juin 2002 (latinreporters.com) -  Analystes et autorités du monde entier ont répété maintes fois que la crise profonde de l'Argentine ne produirait pas un effet de contagion sur d'autres économies, en particulier dans les pays émergents. Les arguments se basent sur le fait que l'effondrement argentin était largement attendu et donc prévisible, en sorte que les investisseurs prirent leurs précautions à temps. Néanmoins, au vu de l'approfondissement de la crise, qui frappe désormais l'Uruguay et complique le panorama économique du Brésil, les opinions commencent à être plus contrastées.

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Dans un entretien accordé récemment au quotidien de Buenos Aires "Clarin", José Antonio Ocampo, directeur de la Commission économique pour l'Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC, organe de l'ONU), déclarait que la crise argentine "est importante en soi de par son ampleur et son impact en Amérique latine" et que l'isoler du reste de la région est en conséquence "une fiction évidente".

L'effet de la crise argentine sur les titres des pays de la région a été faible, mais le risque et l'incertitude demeurent. Par ailleurs, cette crise se développe au moment où les pays latino-américains sont confrontés à la chute du prix des matières premières et à la décélération des économies développées.

Le cas de l'Uruguay doit être pris en compte en fonction de sa forte intégration économique à l'Argentine. La récession argentine, qui dure depuis quatre ans, entraîne l'Uruguay. Le taux de chômage y atteint 15%. Au cours des quatre premiers mois de 2002, des retraits massifs ont fait fondre de 18,7% les sommes déposées dans les banques uruguayennes et la Banque centrale d'Uruguay a perdu 47% de ses réserves internationales nettes.

Le Fonds monétaire international (FMI) a dû voler au secours de l'Uruguay, dont le commerce et l'économie sont affectés. Dépendant de l'Argentine et du Brésil, ses deux grands voisins du Mercosur (marché commun sud-américain), l'Uruguay pourrait enregistrer cette année la croissance la plus négative de la région après celle de l'Argentine.

En ce qui concerne le Chili, membre associé du Mercosur, à peine 4% de ses exportations totales vont vers l'Argentine. Les liens économiques entre les deux pays sont donc trop faibles pour que la crise argentine affecte les indicateurs économiques fondamentaux chiliens tels que la croissance et l'inflation. Néanmoins, les inquiétudes viennent d'un autre côté. D'une part, on redoute un impact négatif réel sur de nombreux agents économiques chiliens présents en Argentine et même sur ceux qui sont simplement en relation avec ce pays en crise sans y être installés. Aussi faible soit cette relation, son impact négatif  se concrétisera avec le temps, la durée de la crise argentine étant exceptionnelle. D'autre part, un problème plus délicat peut prendre de l'importance à court terme, à savoir un risque de contagion associé à la spéculation et aux craintes de certains agents économiques qui décideraient des retraits de capitaux.

Les effets de la crise argentine sur la Colombie, le Venezuela, l'Equateur et le Pérou ont été jusqu'à présent beaucoup plus réduits, l'Argentine n'ayant pas de relations commerciales significatives avec ces pays. La contraction du flux de ressources vers ces pays et vers la région en général ne s'explique pas par la crise argentine, car cette tendance était observée antérieurement, allant de pair avec la récession de l'économie mondiale.

Signes de récession au Brésil

Quant au Brésil, la crise argentine a assombri son panorama économique et on parle désormais d'un début de récession de la principale économie sud-américaine. Le premier dérapage se produisit entre octobre et décembre 2001, avec une baisse de la croissance brésilienne de 0,63%. Le deuxième faux pas, un nouveau recul de 0,73%,  fut enregistré entre janvier et mars derniers. Deux trimestres négatifs consécutifs sont habituellement considérés par les analystes comme une entrée en récession.

Il existe deux mécanismes principaux de contagion de l'économie brésilienne.
1. La contagion financière, qui eut une forte influence l'an dernier et qui persiste encore, étant donné que le Brésil appartient à une région souvent considérée comme homogène par les marchés financiers.
2. Le commerce extérieur, l'Argentine ayant été le principal marché étranger de l'économie brésilienne, qui fournissait 20% des produits manufacturés consommés en Argentine. Ces ventes ont chuté de 70%, frappant entre autres les industries des téléphones portables, de la chaussure et des véhicules.

Un catalyseur de la contagion est l'importante dette publique brésilienne, qui s'élève à 73% du produit intérieur brut, avec des échéances à court terme, ce qui accroît la pression sur le taux de change. Par ailleurs, l'incertitude règne parmi les investisseurs étrangers à propos du résultat de l'élection présidentielle d'octobre prochain, dont le politicien de gauche Luiz Inacio Lula da Silva est l'actuel favori dans les sondages.

L'accentuation de la récession au Brésil accompagnée d'une dévaluation progressive du real est probablement la principale voie de contagion du reste des économies latino-américaines, affectant principalement les exportations à destination du marché brésilien et augmentant le discrédit de la région aux yeux des investisseurs étrangers.

L'histoire économique montre qu'aucune crise n'est éternelle et que tous les pays ont réussi à surmonter les conséquences de politiques économiques erronées. Cependant, tous les acteurs concernés par la crise argentine, citoyens, entreprises, investisseurs, groupes économiques, gouvernements et organismes internationaux doivent être conscients qu'à court terme il est impossible d'éliminer complètement l'impact négatif de la récession.

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