BOGOTA, dimanche 9 juin 2013 (LatinReporters.com) - La
guérilla marxiste des Farc (Forces armées révolutionnaires
de Colombie) a accusé, dans un communiqué diffusé samedi,
le président colombien Juan Manuel Santos d'avoir "dégonflé"
l'optimisme dans les négociations de paix de La Havane en créant
des
tensions
avec le Venezuela et en
envisageant
l'adhésion de la Colombie à l'OTAN.
Les relations entre Bogota et Caracas se sont
effectivement tendues après l'entrevue octroyée le 29 mai par
le président Santos au leader de l'opposition vénézuélienne,
Henrique Capriles, qui juge frauduleuse et ne reconnaît pas la victoire
de Nicolas Maduro à l'élection présidentielle du 14 avril
au Venezuela.
La crispation s'est accentuée lorsque le président Santos
envisagea, le 1er juin lors d'une cérémonie militaire, une
adhésion de son pays à l'Organisation du traité
de l'Atlantique Nord (OTAN), éventualité exclue ensuite au
profit d'un rapprochement limité à la coopération, selon
un communiqué rectificatif du ministère colombien de la Défense.
Le Venezuela et le Nicaragua avaient appuyé la proposition de la Bolivie
de convoquer le Conseil de défense de l'Union des nations sud-américaines
(Unasur) pour "évaluer la menace que signifie pour la paix et la stabilité
de l'Amérique du Sud" l'atlantisme soudain de Bogota.
"L'attitude de Santos a dégonflé l'optimisme, l'atmosphère
favorable à la paix construite par tant d'efforts à La Havane.
La question se résume dans le fait que sans la contribution du Venezuela
le dialogue de paix dans la capitale cubaine n'aurait pas lieu" écrit
le secrétariat de l'état-major central des Farc sur le blog
(
http://pazfarc-ep.blogspot.com) de sa délégation aux pourparlers de
paix ouverts en novembre avec la Colombie dans la capitale cubaine.
La Norvège et Cuba appuient ces pourparlers en qualité de
garants. Le Venezuela et le Chili y sont associés en tant qu'accompagnateurs.
La guérilla exprime sa "perplexité" en constatant que Santos
a soufflé le froid alors que venait d'être conclu un accord sur
le problème de la terre, noyau historique d'un demi-siècle de
conflit, qui augurait du possible succès d'encore longues négociations.
"Les pourparlers de La Havane sont dans les limbes à cause de l'homme
qui veut passer à l'histoire comme le président qui a obtenu
la paix en Colombie" affirme la direction des Farc dans son communiqué,
intitulé "Entre le ciel et l'enfer".
"Le Venezuela, principal facteur de confiance" aux yeux de la guérilla
Le texte des chefs des insurgés qualifie de "juste" la protestation
de Caracas pour l'audience octroyée par le président colombien
Santos à l'opposant vénézuélien Henrique Capriles,
qui ne reconnaît pas le président Maduro. "Juan Manuel Santos
savait que sa provocation contre le gouvernement légitime du Venezuela
éclaterait comme un pétard à la table de dialogue de
La Havane, car la question du Venezuela, pays accompagnateur et facilitateur
du processus, est très sensible pour les Farc, qui voient dans les
Vénézuéliens le principal facteur générateur
de confiance et, en conséquence, des artisans fondamentaux du processus
de paix" ajoute la déclaration de la guérilla.
L'attitude du président colombien est associée par
beaucoup, affirment les Farc, "au passage à Bogota [le 27 mai] de
Joe Biden, vice-président des États-Unis" et à
"un plan de Washington ayant pour tête un cheval de Troie nommé
Alliance du Pacifique [association de libre-échange créée
par le Pérou, le Chili, le Mexique et la Colombie; ndlr], qui, guidé
par Washington, se propose de déstabiliser et de faire dérailler
des gouvernements populaires tels que ceux, entre autres. du Venezuela, de
l'Équateur, de la Bolivie et de l'Uruguay."
Et les Farc de se demander alors "Qu'est-ce qui poussait Santos a annoncer
l'entrée fantasque de la Colombie dans l'OTAN ? Menacer le Venezuela
? Le Brésil ?"
Le communiqué de la guérilla estime néanmoins que le
processus de paix doit être défendu par "tous, gouvernement,
guérilla des Farc et les organisations sociales et politiques du pays".
"Il faut comprendre qu'il ne s'agit pas d'un processus de soumission,
mais de construction de la paix. Il ne s'agit pas d'une incorporation de l'insurrection
au système politique en vigueur, tel qu'il est, sans aucun changement
en faveur de minorités exclues. A quoi aurait alors servi la lutte
? Le meilleur épilogue de cette guerre doit être paraphé
par des changements structurels dans la politique, l'économie et
le social qui favorisent le surpassement de la pauvreté et de l'inégalité"
prévient la guérilla.