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Sandinistes favoris des élections présidentielle et législatives
Nicaragua: réélection polémique d'Ortega favorisée par Chavez
 

   

 
MANAGUA, vendredi 4 novembre 2011 (LatinReporters.com) - Le président du Nicaragua, le sandiniste Daniel Ortega, est clairement favori de l'élection présidentielle du 6 novembre. Polémique car inconstitutionnelle, sa candidature à la réélection bénéficie de la division de l'opposition et de l'aide économique et financière de Hugo Chavez, président du Venezuela et chef de file de la gauche radicale latino-américaine.

Le président nicaraguayen Daniel Ortega et sa femme, l'écrivain Rosario Murillo. Très influente, elle a dirigé la campagne pour la réélection du leader sandiniste. (Photo www.presidencia.gob.ni)

Pays d'Amérique centrale dont plus de la moitié des 5,8 millions d'habitants vit sous le seuil de pauvreté (2 dollars / jour), le Nicaragua doit élire ce dimanche, pour un mandat de cinq ans, le président et le vice-président de la République, 90 députés de l'Assemblée nationale (monocamérale) et 20 représentants au Parlement centraméricain.

Leader incontestable du Front sandiniste de libération nationale (FSLN, gauche), qui mit fin par les armes en 1979 à la dictature de la famille Somoza, le vieillissant ex-commandant révolutionnaire Daniel Ortega (66 ans le 11 novembre prochain) est crédité de 48% des intentions de vote dans le dernier sondage de Cid-Gallup.

Ses quatre rivaux, tous issus de la famille libérale atomisée, séduiraient ensemble moins d'électeurs que Daniel Ortega à lui seul. Le même sondage attribue en effet un score de 30% au candidat du Parti libéral indépendant (PLI), le journaliste et patron de radio Fabio Gadea (il va, lui, sur ses 80 ans !); 11% à l'ex-président Arnoldo Aleman, du Parti libéral constitutionnaliste (PLC); à peine moins de 1% à Enrique Quiñonez, de l'Alliance libérale nicaraguayenne (ALN) et moins de 1% également à Roger Guevara, de l'Alliance pour la République (Apre).

Cette division du libéralisme, qui avait remporté la présidence en 1996 et 2001, est une base fondamentale de l'actuelle suprématie des sandinistes. Ils espèrent conquérir aussi et enfin la majorité parlementaire. Quoiqu'incertaine, une majorité qualifiée des deux tiers leur permettrait de réformer la Constitution à leur guise.

Interdit constitutionnel contourné

Comme d'autres sondages, celui de Cid-Gallup augure de la victoire de Daniel Ortega sans besoin d'un second tour. Selon l'article 147 de la Constitution du Nicaragua, un candidat est en effet déclaré vainqueur de l'élection présidentielle s'il arrive en tête au premier tour avec au moins 40% des voix ou avec un minimum de 35% et 5 points d'avance sur le concurrent le plus proche.

Mais le même article 147 stipule que ne peuvent être candidats à la présidence ni le président sortant ni celui qui a déjà exercé deux mandats présidentiels. Or, ayant présidé le régime sandiniste de 1979 à 1990, période au cours de laquelle il remporta l'élection présidentielle de 1984, puis revenu à la tête de l'Etat comme vainqueur de la présidentielle de novembre 2006, Daniel Ortega est en principe frappé du double interdit constitutionnel. L'opposition et nombre d'organisations nationales et internationales attentives au respect des droits des citoyens taxent en conséquence sa candidature à la réélection d'"inconstitutionnelle" et de "coup porté à la démocratie".

Pour contourner le verrou de l'article 147, Daniel Ortega avait obtenu dès octobre 2009 qu'il soit déclaré "inapplicable" par la chambre constitutionnelle de la Cour suprême de justice, réunie par surprise afin que des magistrats suppléants sandinistes puissent se substituer aux titulaires libéraux non convoqués. La Cour estima qu'en limitant la réélection présidentielle, l'article 147 de la Constitution enfreignait le principe d'égalité des citoyens, puisque les parlementaires, eux, peuvent se représenter indéfiniment.

Onze mois avant cette sentence polémique, applaudie à Caracas par Hugo Chavez, la victoire sandiniste aux élections municipales de novembre 2008 avait été qualifiée de "frauduleuse" par l'opposition libérale, ainsi que par l'Eglise, par diverses ONG et par les Etats-Unis et l'Union européenne, qui gelèrent alors partiellement leur coopération avec le régime de Daniel Ortega.

La popularité du chef d'Etat sandiniste, élu en 2006 avec seulement 38% des voix, est néanmoins en forte hausse. L'aide économique et financière du président vénézuélien Hugo Chavez y contribue beaucoup. Au cours des cinq ans de l'actuel mandat de Daniel Ortega, le Venezuela lui a offert l'équivalent de 1,94 milliard de dollars, administrés sans contrôle public par une société privée liée aux sandinistes, ALBANISA (Alba de Nicaragua S.A.).

Daniel Ortega et le président du Venezuela, Hugo Chavez (Archives, 2007 - Photo Alfonso Ocando / Prensa Presidencial de Venezuela)

"Ce n'est pas l'ombre de Chavez qui est présente, mais lui personnellement, avec ses pétrodollars"

L'importance de l'aide vénézuélienne peut être appréciée en fonction du budget de l'Etat nicaraguayen. D'un montant de 1,62 milliard de dollars en 2011, ce budget est programmé à 1,85 milliard pour 2012.

"Multimillionnaire et privatisée" au profit du FSLN, la coopération vénézuélienne "finance des programmes d'assistance sociale dans un schéma de clientélisme politique, offrant 'des cadeaux du commandant' [Ortega]. Ces programmes - Plan toit, Faim zéro, Usure zéro, Maisons pour le peuple, subsides aux transports publics - ont eu un impact politique sur l'électorat non sandiniste" note le journaliste Carlos F. Chamorro, ancien membre du FSLN et fils de l'ex-présidente Violetta Chamorro.

Vania Soza, représentante de Cid-Gallup dans la capitale, Managua, se réfère aux sondages de sa société pour confirmer que l'appui des Nicaraguayens à la réélection de Daniel Ortega a pour base essentielle les bénéfices de programmes sociaux, la plupart financés par le Venezuela. A ces programmes s'ajoutent diverses faveurs très électoralistes, tel notamment un plus extrabudgétaire mensuel de 30 dollars octroyé depuis la mi-2011 aux 130.000 serviteurs publics, soldats et policiers compris.

Daniel Ortega a promis d'accroître, s'il est réélu, les bénéfices sociaux et économiques, notamment en matière d'éducation et d'infrastructures, découlant de l'aide vénézuélienne. "L'ALBA a été pour nous un miracle" disait-il récemment à des investisseurs européens. [Ndlr - L'ALBA, Alliance bolivarienne pour les peuples de notre Amérique, fut créée en décembre 2004 sous l'impulsion de Hugo Chavez et de Fidel Castro. Cette organisation politico-économique hostile aux Etats-Unis compte aujourd'hui huit pays membres : Venezuela, Cuba, Bolivie, Nicaragua, Equateur, la Dominique, Antigua-et-Barbuda et Saint-Vincent-et-les-Grenadines].

Le poids de Hugo Chavez dans ces élections "est énorme" reconnaît le législateur libéral Francisco Aguirre Sacasa, candidat du PLC à la vice-présidence. "Ce n'est pas l'ombre de Chavez qui est présente, mais lui personnellement, avec ses pétrodollars" renchérit l'analyste politique Maria Lopez Vigil.

Dérapage inconstitutionnel paradoxalement estompé par l'UE et l'OEA

"Bien que des doutes persistent encore sur le poids du vote occulte et sur le degré de confiance que l'on peut octroyer aux sondages quand prévaut un climat intense d'intimidation étatique et de clientélisme politique, l'interrogation principale ne porte pas aujourd'hui sur le résultat électoral, mais sur le degré de légitimité qu'aurait une réélection à l'ombre d'un processus frauduleux dès son origine" écrit Carlos F. Chamorro dans le quotidien El Nuevo Dario.

La polémique sur la candidature de Daniel Ortega n'a toutefois pas dissuadé l'Union européenne (UE) et l'Organisation des Etats américains (OEA) de dépêcher au Nicaragua des missions d'observation électorale. Cette initiative estompe de facto le caractère inconstitutionnel de la probable réélection du leader sandiniste lors d'un scrutin dont l'UE et l'OEA prétendent paradoxalement garantir la légitimité.

Sur la base d'une mission effectuée au Nicaragua, un rapport de l'Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'homme présenté le 2 novembre à Paris dénonce, en les imputant au régime sandiniste, "les atteintes au pluralisme politique, le manque d'indépendance de la justice et les irrégularités du processus électoral".

Des analystes relèvent que ni l'opposition nicaraguayenne ni les ONG ne remettent en question les acquis essentiels de la politique sociale de Daniel Ortega. Le doute et les critiques portent sur le pouvoir personnel, le contrôle grandissant sur les institutions démocratiques et le droit au harcèlement politique, juridique, policier et même parfois physique d'opposants que le leader sandiniste s'octroie, comme son allié vénézuélien Hugo Chavez, à la faveur d'un processus de transformation sociale.

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RÉÉLECTION
DE DANIEL ORTEGA
PROCLAMÉE
PAR LE POUVOIR

MANAGUA, lundi 7 novembre 2011 (LatinReporters / AFP) - Après dépouillement d'à peine 6,7% des suffrages, la porte-parole de Daniel Ortega, président sortant du Nicaragua, revendiquait lundi la victoire de ce dernier à l'élection présidentielle de dimanche pour un deuxième mandat consécutif de 5 ans (le 3e depuis 1984).

"C'est une victoire du christianisme, du socialisme et de la solidarité" a déclaré à une radio la porte-parole et épouse du président Ortega, Rosario Murillo. "Nous promettons de continuer à oeuvrer pour le bien commun", a ajouté cette femme très influente, à laquelle les analystes attribuent "50% du pouvoir".

Son mari, leader du Front sandiniste de libération nationale (FSLN, gauche), était alors crédité de 66,4% des voix, selon les résultats officiels du Conseil suprême électoral (CSE) portant sur seulement 6,7% des suffrages. Une seconde annonce du CSE portant sur 38,8% des bulletins de vote établissait ensuite le score de Daniel Ortega à 63,95%.

Allié du président vénézuélien Hugo Chavez, l'ancien guérillero sandiniste, qui aura 66 ans vendredi, affrontait quatre candidats de la famille libérale divisée, dont Fabio Gadea, entrepreneur octogénaire et professionnel de radio, qui arrive 2e avec 29,09% des voix, selon ces mêmes résultats partiels.

Avant l'annonce de tout résultat, des milliers de Nicaraguayens étaient déjà descendus dans les rues de Managua, la capitale, et d'autres villes pour fêter à coups d'avertisseurs et de feux d'artifice la victoire de Daniel Ortega. Son  triomphe semblait ainsi à la fois attendu et planifié. Il est vrai que les sondages le prédisaient depuis longtemps.

Quelque 3,4 millions d'électeurs de plus de 16 ans du pays le plus grand d'Amérique centrale, mais aussi le plus pauvre, étaient appelés à cette élection présidentielle, sous la surveillance d'observateurs internationaux.

Daniel Ortega avait obtenu de la Cour suprême une décision très controversée l'autorisant à briguer un deuxième mandat consécutif, ce que prohibe expressément la Constitution du Nicaragua.

Dans l'attente du dépouillement d'une proportion plus substantielle de suffrages, l'opposition ne reconnaissait pas encore lundi matin (soit l'après-midi à l'heure de Paris) la victoire proclamée de Daniel Ortega. Fabio Gadea s'est plaint de l'expulsion de nombreux bureaux votes, par les sandinistes, d'assesseurs accrédités de son Parti libéral indépendant.

Le chef de la mission d'observation de l'Organisation des Etats américains, l'ex-ministre des Affaires étrangères argentin Dante Caputo, ainsi que le responsable des observateurs de l'Union européenne, l'eurodéputé socialiste espagnol Luis Yañez, ont relevé que l'accès à des dizaines de bureaux de vote a été refusé à leurs observateurs pendant une partie au moins de la journée électorale.

Les Nicaraguayens ont élu aussi dimanche 90 députés de l'Assemblée nationale et 20 représentants au Parlement centraméricain. Les résultats de ces scrutins n'étaient toujours pas connus lundi matin.
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