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54% de oui à la réélection présidentielle illimitée
Venezuela-référendum: vainqueur, Chavez briguera sa réélection en 2012
CARACAS, lundi 16 février 2009 (LatinReporters.com) - Le socialiste
radical Hugo Chavez, président du Venezuela depuis dix ans, s'est
déjà déclaré "précandidat" à sa
réélection en 2012 au soir de sa victoire, le 15 février,
au référendum sur un amendement constitutionnel autorisant
les élus à briguer un nombre illimité de mandats consécutifs.
L'opposition a admis sa défaite. Pendant la campagne référendaire,
elle qualifiait le chef de l'Etat de "dictateur" voulant "se perpétuer
au pouvoir".
Hugo Chavez estimait en jeu son "destin politique". L'amendement qu'il prônait
a recueilli 54,36% de oui contre 45,63% de non, avec une participation de
67,05% des quelque 17 millions d'électeurs vénézuéliens,
selon les chiffres diffusés par le Conseil national électoral
après dépouillement de 94,2% des bulletins de vote.
Comme le président de la République, les gouverneurs des Etats,
les maires, ainsi que les députés nationaux et régionaux
pourront désormais briguer autant de mandats successifs qu'ils le
souhaitent. Le nombre était jusqu'à présent limité
par la Constitution à deux mandats (3 pour les députés).
Si l'amendement n'avait pas été plébiscité,
Hugo Chavez, 54 ans, n'aurait pas pu envisager d'être candidat à
sa propre succession en décembre 2012.
"La vérité a triomphé du mensonge, la dignité
de la patrie l'a emporté sur ceux qui la nient... Avec cette victoire
débute le 3e cycle historique de la révolution bolivarienne,
de 2009 à 2019. Je suis prêt. En 2012 auront lieu des élections
présidentielles pour la période 2013-2019 et, à moins
que Dieu ou le peuple n'en disposent autrement, ce soldat que je suis est
déjà précandidat à la présidence" clamait
dimanche soir Hugo Chavez au balcon du palais présidentiel de Miraflores
devant des milliers de partisans qui l'acclamaient.
Avec leur oui majoritaire, les Vénézuéliens ont renouvelé
leur confiance au président, dont le bilan de dix ans de gestion fut
au centre de la campagne référendaire. Quinze convocations
aux urnes depuis décembre 1998 se soldent par 14 victoires de Hugo
Chavez ou de ses partisans. L'unique défaite remonte au référendum
de décembre 2007, sur une vaste réforme socialisante de la
Constitution qui prévoyait déjà la réélection
présidentielle illimitée.
"C'est une grande victoire du peuple, une grande victoire de la révolution...
Une victoire du Venezuela, y compris, même s'ils ne l'admettent pas,
de ceux qui ont voté non, car ils font partie du Venezuela... Nous
avons ouvert de part en part les portes du futur. Vous avez écrit
mon destin" exultait Chavez dans son discours de la victoire, que les médias
audio-visuels publics et privés devaient obligatoirement retransmettre
en direct.
Entouré au balcon présidentiel de ses filles, de ses petits-enfants
et de ministres, Hugo Chavez jurait "qu'à partir de ce moment" il
allait se "mettre intégralement au service du peuple" et il appelait
les Vénézuéliens "à redoubler le rythme de la
construction du véritable socialisme, de la révolution de la
démocratie socialiste", qui est "le chemin de la dignité".
"Le premier message [de félicitations] que j'ai reçu pour le
peuple vénézuélien vient de Fidel Castro" poursuivait
Chavez. Et de lire avec emphase théâtrale ces mots envoyés
par le leader historique cubain: "Cher Hugo, félicitations à
toi et à ton peuple pour une victoire qu'il est impossible de mesurer
vu sa magnitude". Hugo Chavez ajoutait aussitôt: "Cette victoire est
aussi la tienne, Fidel, et celle du peuple cubain et des peuples d'Amérique
latine".
Avec une visible déception, le verdict des urnes était accepté
au siège du "Bloc du non", formé par une trentaine de partis
et d'organisations.
"Nous sommes des démocrates. Oui, Hugo Chavez a obtenu plus de votes
[provisoirement 6,003 millions de oui contre 5,040 millions de non; ndlr],
nous devons le reconnaître" admettait Omar Barboza, président
du parti Un Nouveau Temps (UNT, social-démocrate).
Il dénonçait néanmoins l'utilisation "sans scrupules"
des moyens de l'Etat pour permettre au oui de l'emporter et affirmait que
"franchir le cap de 5 millions de voix tandis que se réduit l'appui
au président Chavez signifie que l'alternative démocratique
progresse", que "tôt ou tard nous triompherons" et que l'UNT s'opposera
"au projet totalitaire de Chavez" lors de l'élection présidentielle
de 2012.
"Nous sommes sûrs que l'histoire nous donnera raison. Nous croyons
que les leaderships personnels sont erronés. Les étudiants
restent mobilisés pour le Venezuela. Il s'agit d'un marathon et non
d'une course de cent mètres. Il est clair que la relève et
le futur sont garantis" prédisait pour sa part le dirigeant estudiantin
David Smolansky. La fronde anti-régime des étudiants, y compris
parmi le secteur que l'on croyait favorable à Chavez, avait largement
contribué dans la campagne référendaire à la
visibilité des partisans du non face à la mobilisation massive
par le gouvernement des ressources et des médias publics.
Marge pour gérer l'usure naturelle du pouvoir
A Caracas, des milliers de chavistes ont fêté la victoire du
"oui" avec des pétards, des feux d'artifice, des cris de joie et une
multitude de drapeaux rouges, couleur du Parti socialiste uni du Venezuela
(PSUV) de Hugo Chavez. Lors de la campagne, il affirmait avoir besoin de
temps pour approfondir sa "révolution bolivarienne". Ses partisans
insistèrent sur les progrès sociaux réalisés
en dix ans en matière de santé, d'éducation et de logement,
tandis que l'opposition dénonçait l'insécurité,
la corruption et l'inflation (30% en 2008).
La victoire de Hugo Chavez met provisoirement son ambition présidentielle
à l'abri des aléas socio-politiques que risque de provoquer
au Venezuela l'effondrement de la manne pétrolière dû
à la crise financière et économique mondiale. La valeur
moyenne du baril de brut vénézuélien fut la semaine
dernière de 35,92 dollars, contre près de 140 dollars en juillet
2008. Or, le Venezuela, 5e exportateur mondial de pétrole, a planifié
son budget 2009 sur la base d'un baril à 60 dollars.
Par ailleurs, l'élection présidentielle se jouant au Venezuela
en un seul tour et la victoire revenant au candidat obtenant le plus haut
pourcentage sans nécessité de majorité absolue, Hugo
Chavez, de loin encore l'homme le plus populaire du pays (et à la fois l'un
des plus détestés), dispose d'une marge
confortable pour gérer dans le temps l'usure naturelle du pouvoir.
Une nouvelle victoire à la présidentielle de 2012 semble à
sa portée si la polarisation idéologique qu'il entretient pour
mobiliser sa "base" ne débouche pas sur l'affrontement fratricide
entre les deux Venezuela qu'à peine un million de voix séparent.
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