Argentine: péroniste populiste, le nouveau président suspend les paiements
Ces décisions et d'autres ont été annoncées dimanche à Buenos Aires par le nouveau président par intérim du pays, le péroniste Adolfo Rodriguez Saa, dès son élection par le parlement argentin. Il s'agit d'un train de mesures populistes qui renouent avec les origines historiques du péronisme.
Selon Jose Manuel Sota, influent gouverneur péroniste de la province de Cordoba, l'Argentine honorera dans un avenir non précisé des engagements renégociés avec ses créanciers et comprenant "des réductions du capital, une diminution des intérêts et un report des échéances". Les fonds de la dette extérieure serviront à redonner du travail à un million d'Argentins, a dit en substance Adolfo Rodriguez Saa, élu chef de l'Etat par intérim pour préparer une élection présidentielle anticipée au 3 mars 2002. Emporté par les émeutes de la faim qui ont fait 27 morts et plus de 400 blessés cette semaine en Argentine, le président de centre gauche Fernando De la Rua avait démissionné jeudi.
La suspension du paiement de la dette extérieure pour créer des emplois nationaux est une mesure qui renoue avec le populisme patriotique du péronisme, appelé aussi justicialisme, créé en 1945 par le général et chef d'Etat Juan Domingo Peron. Jurant sur Dieu et les Evangiles de gouverner avec patriotisme, alors que députés et sénateurs criaient "Argentine! Argentine!", Adolfo Rodriguez Saa a annoncé d'autres mesures populistes alliant dirigisme économique et justice sociale, dans la pure tradition péroniste. Ainsi, il fixe son salaire mensuel à 3.000 pesos (=3.000 dollars), soit trois fois moins que les émoluments des sénateurs et députés, précisant que nul désormais, dans les rouages de l'Etat, ne gagnera plus que le président. Adolfo Rodriguez Saa réduit aussi de moitié le nombre de ministères et met en vente le parc automobile et les avions de l'Etat argentin. Il annonce encore la prochaine mise en circulation d'une "troisième monnaie". Selon un proche collaborateur du nouveau président, elle pourrait s'appeler "argentino". Elle cohabitera avec le peso et le dollar et s'inspirerait des titres actuellement émis par des provinces désargentées pour payer leurs fonctionnaires. Cet artifice populiste, qui gonflera la dette intérieure, permet d'éviter dans l'immédiat une dévaluation du peso, mais la rendra d'autant plus inévitable à terme. Une telle dévaluation ruinerait actuellement des dizaines de milliers de familles endettées en dollars, mais dont les ressources sont en pesos. Il est possible aussi qu'une généralisation de l'argentino, dont la valeur serait flottante, soit une forme "civilisée" et progressive de dévaluer les instruments monétaires argentins. Enfin, dans un pays qui compte 14 millions de pauvres, Adolfo Rodriguez Saa lance un vaste programme alimentaire qui rappelle le dévouement pour les déshérités, les "descamisados" (sans chemises), qui rendit célèbre, il y a un demi-siècle, Evita Peron, femme du général qui présidait alors l'Argentine.
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