MADRID, mardi 18 septembre 2012 (LatinReporters.com) - Dans une Espagne frappée
par un chômage record (25,1% selon Eurostat) et des plans de rigueur draconiens, la
crise engendre une défiance sans précédent à
l'égard des institutions. Une écrasante majorité d'Espagnols
n'a plus confiance ni dans le gouvernement national (82,2%) ni dans les institutions
européennes (71,6%), selon les résultats d'un sondage diffusés
lundi. Par ailleurs, 91,7% des interrogés indiquent que la crise a modifié
leur mode de vie.
Réalisé du 7 au 12 septembre sur un échantillon de 1.100
Espagnols pour la Cadena Ser, radio la plus écoutée du pays,
le sondage précise que ce discrédit des instances dirigeantes
nationales et européennes transcende les barrières idéologiques.
Il est commun aux électeurs conservateurs du Parti Populaire (PP,
parti gouvernemental de Mariano Rajoy), aux socialistes (PSOE), aux écolo-communistes
(IU) et aux néocentristes (UPyD).
Si les institutions européennes sont jugées sévèrement,
l'appartenance même à l'Union européenne (UE) est encore
estimée positive pour l'Espagne par 41,7% des interrogés. Une
proportion identique considère toutefois négative (24,3%) ou
ni bonne ni mauvaise (17,4%) cette même appartenance. "L'appui à
l'appartenance à l'Union européenne a perdu son hégémonie
traditionnelle" en conclut la Cadena Ser.
La crise bouscule aussi la perception de la régionalisation de
l'Espagne, découpée après la fin de la dictature
franquiste en 17 régions jouissant d'une grande autonomie afin
de diluer la spécificité basque et catalane.
"Pour la première fois depuis le retour de la démocratie, les
Espagnols remettent en question le modèle d'État des
autonomies" relève la Cadena Ser. Car, selon le sondage, à
peine 10,8% des interrogés souhaitent maintenir la régionalisation
actuelle. Ce pourcentage est inférieur à celui des partisans
des autres options proposées : suppression des régions autonomes
dans un État recentralisé (24,8%), réduction de l'autonomie
des régions (23,9%), élargissement de cette autonomie (11,4%)
ou autonomie régionale avec option pour l'indépendance (15,2%).
Le solde correspond aux personnes sans opinion ou ayant préféré
ne pas répondre.
Comment les Espagnols réduisent leurs dépenses
Quant aux changements, mineurs ou importants, de mode de vie à cause de la crise, il est reconnu
par 91,7% des interrogés. Il en ressort que quasi deux tiers (63,1%)
des Espagnols ont amputé leurs économies pour couvrir leurs dépenses,
25,3% se sont endettés auprès de parents ou d'amis et 19,4%
admettent des problèmes pour payer leur hypothèque ou leur
loyer.
Au cours des 12 derniers mois, la réduction des dépenses et
la modification des habitudes de consommation se sont concrétisées
notamment par une baisse de la fréquentation des bars et restaurants
(pour 71,2 % des interrogés), le renoncement au cinéma, au
théâtre et/ou aux concerts (pour 59,9%), la suppression des
voyages (46,4%), la réduction de consommation de boissons alcoolisées
et/ou de tabac (31,8%), des changements dans la composition du panier de
la ménagère au profit de boissons et d'aliments moins onéreux
(60,8%), l'annulation du contrat de téléphonie mobile (6,5%),
le retour à des tâches ménagères confiées
auparavant à des tiers rémunérés (34,2%), la
réduction de l'usage de la voiture (37,5%) ou ... l'abandon
des visites chez le dentiste (23%).
Le sondage évalue également le
coût électoral virtuel
de la rigueur exigée et applaudie par l'UE. Si des élections
législatives (non prévues avant 2015) étaient convoquées
aujourd'hui en Espagne, le Parti Populaire du conservateur Mariano Rajoy
dégringolerait à 31,1% des voix (contre 44,6% aux législatives
de novembre 2011). Avec 24,8%, les socialistes perdraient eux-mêmes
4 points. Centristes, écolo-communistes et le vote blanc seraient
en nette progression.
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Voir résultats complets du sondage; 19 pages pdf en espagnol]