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Bouleversement favorable au candidat d'une nouvelle droite à l'élection présidentielle de mai

Colombie: effondrement des partis historiques aux élections législatives

Les concessions vaines du président Pastrana à la guérilla marxiste expliquent ce résultat

BOGOTA, mardi 12 mars 2002 (latinreporters.com) - Unique pays d'Amérique latine encore confronté à des guérillas d'extrême gauche, la Colombie a vu s'effondrer ses deux partis historiques, le Libéral et le Conservateur, lors des élections législatives du 10 mars. Pour la première fois dans l'histoire parlementaire colombienne, ces deux partis totalisent ensemble moins de la moitié des élus.

Trois ans de concessions désastreuses du président conservateur Andres Pastrana à la guérilla marxiste des FARC expliquent ce bouleversement, qui favorise les chances du candidat d'une nouvelle droite, Alvaro Uribe Velez, à l'élection présidentielle du 26 mai prochain.

Alors qu'ils contrôlaient 80% du Congrès sortant, le Parti Libéral et le Parti Conservateur n'ont obtenu dimanche que 40 % des élus au Sénat et à la Chambre des Représentants, demeurant néanmoins les deux formations les plus importantes. Les libéraux n'ont plus que 30 sénateurs (sur un total de 102) et les conservateurs 13. Parmi les 166 députés, les libéraux n'en comptent aujourd´hui que 53 et les conservateurs 21.

La débâcle est telle que le président du Parti conservateur, Carlos Holguin, démissionnait dès dimanche soir. Le chef de l'Etat, Andres Pastrana, conservateur lui aussi, aurait sans doute été poussé également à la démission s'il n'était pas en fin de mandat. Son successeur sera désigné au suffrage universel le 26 mai prochain ou le 16 juin en cas, peu probable, de second tour.

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Malgré le bon score personnel, à gauche, d'ex-guérilleros du M-19 convertis depuis plus de dix ans à la démocratie, la chute vertigineuse des partis historiques profite surtout aux indépendants qui soutiennent la candidature à la présidence de la République d'Alvaro Uribe Velez, dissident du Parti Libéral. Tenant d'une nouvelle droite exigeante mais démocratique, Alvaro Uribe Velez fut le principal critique des trois ans de pourparlers de paix inutiles ouverts par le président conservateur Pastrana avec la guérilla marxiste des FARC (Forces armées révolutionnaires de Colombie).

Le 20 février dernier, Andres Pastrana rompait ces pourparlers très impopulaires menés sans cessez-le-feu et appuyés par la direction du Parti Conservateur et du Parti Libéral. Mais les concessions politiques et territoriales octroyées pendant trois ans à la guérilla lui ont permis de se renforcer au point de mener aujourd'hui une vaste offensive contre l'infrastructure économique, coupant les liaisons routières, électriques et téléphoniques de dizaines de localités colombiennes.

Le président Pastrana demande désormais aux Etats-Unis une aide matérielle militaire directement utilisable contre les rebelles et prie Washington d'inclure la Colombie dans les priorités de la lutte contre le terrorisme international menée par le président George W. Bush.

Cette réaction tardive d'Andres Pastrana n'a pas convaincu les Colombiens. Les résultats des législatives de dimanche semblent indiquer que les électeurs ne jugent leur président capable ni de faire la paix ni de mener la guerre. La faible participation électorale, 42% contre 45% en 1998, et les 13% de votes blancs ou nuls confirment le faible pouvoir de mobilisation du président Pastrana, qui avait appelé les Colombiens à combattre la violence par leur vote.

A peine plus d'un Colombien sur trois aura donc émis un suffrage valable. C'est une demi-victoire pour la guérilla des FARC, qui avait exhorté au boycott des urnes et multiplié les actions violentes d'intimidation pour décourager les électeurs. En outre, manquant cruellement de solidarité, les Colombiens n'ont réélu aucun des cinq parlementaires actuellement séquestrés par les FARC et dont la candidature, possible par contumace grâce à une loi spéciale, visait à accroître le discrédit de la guérilla. Une otage des rebelles, Gloria Polanco de Losada, fut néanmoins élue députée pour le département de Huila. 

Tant à la Chambre qu'au Sénat, les meilleurs scores personnels enregistrés aux législatives de dimanche ont été réalisés par des partisans du favori de la nouvelle droite à l'élection présidentielle, Alvaro Uribe Velez.

Luis Alfredo Ramos, ex-maire de Medellin, est ainsi élu sénateur avec 217.952 voix de préférence, record absolu de l'histoire électorale colombienne. A la Chambre, le record national de voix de préférence, 82.057, revient à l'ex-général Jaime Ernesto Canal Alban. Il avait démissionné il y a plus d'un an, lorsque le président Pastrana lui ordonna de suspendre la poursuite de guérilleros qu'il était sur le point de capturer et qui emmenaient des otages enlevés près de Cali.

Briguant la magistrature suprême à la tête du mouvement Primero Colombia (La Colombie d'abord), Alvaro Uribe Velez n'a pas encore structuré un véritable parti politique. Il espère néanmoins que des transfuges conservateurs et libéraux, s'ajoutant aux indépendants qui se réclament de lui, assureront sa force au Congrès. Ce dernier pourrait par ailleurs être réduit à une seule chambre -ce qui provoquerait de nouvelles élections législatives- si Alvaro Uribe Velez était effectivement élu chef de l'Etat. Mettre fin au bicaméralisme serait sa manière de réformer le Congrès, cette institution corrompue étant actuellement jugée inutile par 77% des Colombiens.

Dans un pays à régime présidentiel fort comme la Colombie, l'élection du président de la République est plus décisive que celle du Congrès. Le discours dur d'Alvaro Uribe Velez à l'égard de la corruption et de la guérilla explique sa probable victoire à la présidentielle de mai. Contre la recrudescence du conflit intérieur colombien, il propose notamment "la solidarité citoyenne avec l'armée" et n'exclut pas un appel à l'envoi en Colombie de casques bleus des Nations unies.


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