Entouré du vice-président Nicolas Maduro (droite de la photo)
et de Diosdado Cabello, président de l'Assemblée nationale,
Hugo Chavez montre une édition de poche de la Constitution lors de
l'intervention radio-télévisée au cours de laquelle
il a annoncé, au soir du 8 décembre 2012, la récidive
de son cancer et son choix de Nicolas Maduro comme dauphin. (Photo Prensa
Presidencial)
CARACAS, dimanche 9 décembre 2012 (LatinReporters.com) - Le président vénézuélien Hugo Chavez a annoncé
samedi soir par surprise, en direct à la radio et à la télévision,
une récidive de son cancer, qui rend nécessaire une nouvelle intervention
chirurgicale à Cuba où il repart ce dimanche. Envisageant
publiquement pour la première fois un scénario institutionnel
dans lequel il serait absent, le leader bolivarien a désigné
comme dauphin le vice-président Nicolas Maduro, demandant
aux Vénézuéliens de voter pour lui le cas échéant.
S'adressant à la nation vêtu de bleu marine et entouré
dans une salle du palais présidentiel de Caracas de proches collaborateurs,
dont le vice-président Maduro, Hugo Chavez a admis implicitement
l'éventualité d'une issue fatale en affirmant, à propos
de sa prochaine intervention chirurgicale, qu'"une opération de ce
type et contre ce mal implique des risques".
"Nicolas, l'épée de Bolivar est là !"
"Si quelque chose arrivait qui me fasse déclarer inapte de quelque
manière, Nicolas Maduro devra conclure la période [présidentielle
en cours, sexennat qui arrivera à échéance le 10 janvier 2013; ndlr] ...
Dans ce scénario qui obligerait à convoquer une élection
présidentielle, vous élirez Nicolas Maduro président
[de la République]. Je vous le demande de tout coeur" a déclaré
le leader bolivarien en montrant une édition de poche de la Constitution.
C'est aussi la première fois que le chef de l'État désigne
un dauphin, mettant fin sur ce point à de longues spéculations
autour de diverses personnalités civiles et militaires.
Nommé vice-président en octobre, poste qu'il cumule avec
celui de ministre des Affaires étrangères, Nicolas Maduro,
50 ans, est, a dit Chavez, "l'un des leaders jeunes aux plus grandes
capacités", avec un "coeur d'homme du peuple". "Nicolas, l'épée de Bolivar
est là !" s'est exclamé le président vénézuélien,
tandis que la télévision montrait l'arme du libertador historique
de l'Amérique du Sud.
Tour à tour chauffeur d'autobus, syndicaliste, député, président de l'Assemblée
nationale et, depuis août 2006, chef de la diplomatie vénézuélienne,
le vice-président Nicolas Maduro fut aussi l'un des fondateurs du MVR (Mouvement Cinquième
République), parti avec lequel Chavez remporta sa première
élection présidentielle, en décembre 1998.
Le dauphin de Hugo Chavez est souvent situé
par les observateurs au sein de "l'aile modérée" du chavisme. Cela ne l'empêche
pas d'être bien en cour à Cuba auprès des frères
Fidel et Raul Castro, soucieux du maintien de l'aide économique privilégiée
octroyée à leur île par le Venezuela.
Lors de son intervention radio-télévisée du 8 décembre
2012, Hugo Chavez a imploré Dieu et baisé un crucifix.
(Photo Prensa Presidencial)
L'article 233 de la Constitution
Le mandat présidentiel actuel de Hugo Chavez prendra fin dans un mois,
le 10 janvier 2013, date de l'investiture ouvrant un nouveau mandat de six ans pour
lequel il fut réélu
avec 55,26% des suffrages le 7 octobre dernier.
Une incapacité absolue frappant "le président élu" avant l'investiture du 10
janvier déboucherait sur une nouvelle élection présidentielle
dans les 30 jours, l'intérim devant en principe être assuré, conformément à l'article 233
de la Constitution
bolivarienne, par le président de l'Assemblée nationale. Chavez a toutefois estimé que l'intérim reviendrait au vice-président,
chargé, selon le même article 233, de mener à terme le
mandat d'un président en exercice défaillant au cours des deux
dernières années de sa période présidentielle.
Il est vrai que Chavez est à la fois "président élu"
pour le prochain sexennat 2013-2019 et président en exercice en fin de mandat.
Si sa santé le permet, l''homme fort du Venezuela sera investi dans un mois pour six années
supplémentaires, mais si Chavez était déclaré
inapte au cours des quatre premières années de ce nouveau mandat,
une nouvelle élection présidentielle devrait également
avoir lieu dans les 30 jours, l'intérim étant alors assuré, toujours selon l'article 233,
par le vice-président. Et si Chavez était relevé après
quatre ans, soit au-delà du 10 janvier 2017, le vice-président
assumerait, on l'a dit plus haut, le pouvoir jusqu'à la fin du sexennat en cours.
Poursuivre "la construction de la voie vénézuélienne
vers le socialisme"
Déjà opéré trois fois à Cuba depuis
juin 2011 d'un cancer dont il n'a jamais révélé la nature
et dont il se prétendait guéri jusqu'à hier soir, Hugo
Chavez, 58 ans, était reparti à l'improviste à
La Havane dans la nuit du 27 novembre dernier pour y suivre des séances peu expliquées
d'"oxygénation hyperbare". Revenu vendredi matin à Caracas,
le voilà de nouveau en partance ce dimanche pour la Havane, une semaine
seulement avant les élections régionales du 16 décembre.
L'absence de Hugo Chavez dans une campagne électorale est aussi une
première en 14 ans de pouvoir.
"À cause de quelques autres symptômes, nous avons décidé
avec l'équipe médicale de procéder à des examens
(...) et, malheureusement, dans ce bilan exhaustif, est apparue la présence
de quelques cellules malignes récentes" a expliqué
Chavez à propos de son dernier séjour à Cuba. "Il est
absolument indispensable que je subisse une nouvelle intervention chirurgicale
et elle doit intervenir dans les prochains jours" a-t-il ajouté.
Ses médecins avaient même préconisé qu'elle ait
lieu dès la fin de la semaine, a-t-il révélé.
Comme si son absence risquait d'être sinon définitive, du moins
longue, le chef de l'État a exhorté dans son intervention radio-télévisée
les Vénézuéliens à "garantir en toute circonstance
la marche victorieuse de la révolution bolivarienne" et à poursuivre
"la construction de la voie vénézuélienne vers le socialisme".
Il appelé "les patriotes" à "l'unité, l'unité
l'unité", notamment pour faire face à ceux "qui ne manqueront
pas de tenter de tirer profit de circonstances difficiles".
"Ainsi va la vie. Moi, néanmoins, agrippé
au Christ, agrippé à Mon Seigneur, agrippé à
l'espoir et à la foi, j'espère, et je le demande à Dieu,
vous donner de bonnes nouvelles ces prochains jours et que nous pourrons
continuer à construire ensemble ce que nous avons enfin aujourd'hui,
la patrie" a imploré le chef de la gauche radicale
latino-américaine, qui a baisé un crucifix.
L'intervention radio-télévisée intégrale du président
Hugo Chavez au soir du 8 décembre 2012 (35 minutes, espagnol)
Défenseur de l'union de l'Amérique latine
A la tête du premier exportateur de pétrole sud-américain,
Hugo Chavez a bâti sa popularité sur de nombreux programmes
sociaux dans la santé et l'éducation. Les plus défavorisés
lui vouent une reconnaissance sans limites, répétant à
l'envi qu'il leur a rendu leur "dignité", malgré une inflation
galopante note l'AFP. En revanche, ses opposants lui reprochent son omniprésence
et son instrumentalisation des moyens de l'État au service d'une
seule cause : son maintien au pouvoir.
Après la tentative de coup d'État qui l'avait visé,
en 2002, le président avait décidé que le monde se
divisait en amis ou adversaires, qualifiant ses opposants de "traîtres"
et d'"apatrides".
Au-delà des frontières, il est le modèle - et bailleur
de fonds - de plusieurs dirigeants latino-américains de gauche.
Fervent défenseur de l'union de l'Amérique latine, il a
mis en place des structures d'intégration régionale et tissé
des alliances stratégiques avec la Russie, la Chine ou l'Iran, ne
manquant jamais d'apporter son soutien à des dirigeants controversés,
comme le Libyen Mouammar Kadhafi, l'Iranien Mahmoud Ahmadinejad ou le Syrien
Bachar al-Assad.
En même temps, rappelle encore l'AFP, il a su faire preuve de pragmatisme,
ne suspendant jamais ses livraisons de pétrole aux États-Unis,
en dépit de ses critiques acerbes contre "l'impérialisme yankee".
Appui populaire à Chavez dans les rues de Caracas après l'annonce de la récidive de son cancer. (Ph. AVN)
Dernière heure
HUGO CHAVEZ OPÉRÉ POUR LA 4ème FOIS, "AVEC SUCCÈS", D'UN CANCER À CUBA
CARACAS / LA HAVANE, mardi 11 décembre 2012 (AFP) - Le président
vénézuélien Hugo Chavez a été opéré
"avec succès" mardi à Cuba, pour la 4e fois depuis la détection
en juin 2011 d'un cancer dans la zone pelvienne, selon son vice-président
Nicolas Maduro.
Au cours d'une allocution radio-télévisée, M. Maduro
a précisé que Hugo Chavez avait regagné sa chambre
d'hôpital au terme de six heures d'intervention chirurgicale et
que l'étape post-opératoire durera "plusieurs jours".
Tous les programmes radio-télévisés du Venezuela avaient
été interrompus vers 22h00 GMT pour retransmettre une allocution
du ministre de la Communication, Ernesto Villegas, indiquant que "l'équipe
médicale qui soigne le commandant Hugo Chavez, président de
la République, est en train de mener l'opération programmée
pour aujourd'hui" mardi.
Aucune des trois précédentes interventions chirurgicales
qu'a subies M. Chavez depuis 18 mois n'avait été annoncée.
Comme à chaque opération, Hugo Chavez a été
pris en charge à l'hôpital Cimeq de La Havane, le plus moderne
et le mieux équipé de Cuba, pays réputé pour
la compétence de ses médecins. Fidel Castro lui-même
y avait été soigné lorsqu'il avait connu de graves
ennuis de santé en 2006.
Depuis l'annonce de sa rechute, les témoignages de solidarité
en faveur du président ont afflué. Mardi, plusieurs
messes ont été célébrées au Venezuela
et des foules ont manifesté leur émotion sur les places Bolivar
de nombreuses villes du pays.
Réélu le 7 octobre, Chavez doit amorcer officiellement le sexennat
2013-2019 le 10 janvier prochain. Il a toutefois intronisé son vice-président
Nicolas Maduro en tant que candidat officiel en cas d'élections anticipées
s'il devait se trouver dans l'incapacité d'assumer le pouvoir.