Argentine: le péroniste Eduardo Duhalde, 5e président en deux semainesIl confirme le moratoire de la dette et revendique "la doctrine sociale de l'Eglise"
Avocat, notaire et sénateur péroniste, ex-vice-président de la République, ex-gouverneur de la puissante province de Buenos Aires et candidat malheureux du péronisme à l'élection présidentielle de décembre 1999, Eduardo Duhalde a été désigné chef de l'Etat par 87% des parlementaires. Les deux grands partis historiques argentins, le péroniste (tenant d'un populisme appelé aussi "justicialisme") et le radical (social-démocrate) ont donc compris que la démocratie était en danger. Ils ont étouffé leurs différences face une crise économique, sociale et politique sans précédent, plébiscitant un candidat qui promettait un gouvernement de "salut national".
Au terme de cette législature, Eduardo Duhalde ne briguera plus la présidence. Cette promesse a réduit l'intensité du combat de coqs au sein du péronisme et rallié l'adhésion de ses poids lourds à la désignation d'Eduardo Duhalde. L'élection présidentielle anticipée du 3 mars prochain décidée fin décembre par l'Assemblée législative est annulée. Conscient de n'avoir pas été porté à la charge suprême par le suffrage universel, Eduardo Duhalde estime que sa légitimité découle de la concrétisation de l'union nationale, "que le peuple réclamait". Sollicitant "la compréhension et la collaboration internationales", le nouveau président assume le moratoire de la dette publique décrété par son prédécesseur Adolfo Rodriguez Saa, ainsi que son plan de création d'un million d'emplois, moyennant certains aménagements. Fin de la parité dollar-peso Critique de l'économie de marché, il constate, dans une Argentine "ruinée et anéantie" par un "modèle (économique) épuisé", la disparition de fait du système de convertibilité qui garantit depuis 1991 la parité dollar-peso. Les analystes en déduisent que le peso sera prochainement dévalué et ils remarquent qu'Eduardo Duhalde n'a pas fait la moindre allusion au lancement d'une troisième monnaie, l'argentin, que préparait le déjà ex-président Adolfo Rodriguez Saa. Eduardo Duhalde n'a pas pu promettre de lever le blocage partiel des comptes bancaires, principale cause des manifestations qui ont emporté deux présidents en décembre, car, dit-il, l'Argentine ne peut plus payer ni salaires ni retraites. En contrepartie, pour tenter de rassurer tout de même les épargnants et la classe moyenne en général, il a garanti le maintien de la valeur des dépôts bancaires, en pesos ou en dollars. Cette affirmation semble contredire celle constatant la fin de la parité dollar-peso. Décrivant la situation du pays avec un réalisme peu habituel dans la classe dirigeante, le nouveau chef de l'Etat a révélé qu'en 2001 la classe moyenne a perdu 730.000 Argentins, venus grossir les rangs des 15 millions de pauvres, soit 40% de la population du pays. "La classe moyenne est détruite, la chaîne des paiements est rompue" a-t-il insisté, après avoir noté que les rentrées fiscales de décembre dernier étaient de 30% inférieures à celles de décembre 2000. Les ministres d'Eduardo Duhalde assumeront leur charge dès jeudi. On attend avec intérêt les noms de l'équipe gouvernementale pour mesurer l'ampleur de son ouverture à diverses forces politiques. Le programme économique détaillé sera annoncé vendredi. Dans l'attente, revendiquant l'image de Juan Domingo et Eva Peron, fondateurs du péronisme, Eduardo Duhalde a rejeté "la pensée unique", prôné "l'indépendance économique" et promis que son "guide" et son "nord" sera "l'humanisme chrétien", la "doctrine sociale de l'Eglise". En Argentine, la Conférence épiscopale a coutume de critiquer avec virulence la corruption politique et le néolibéralisme économique.
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